Retour vers le futur ?!
Depuis quelques années maintenant, la gamme du VPCiste allemand s’est trouvé sa figure de proue et il se pourrait que le Canyon Spectral 29 reprenne le flambeau. All Mountain par excellence, les deux précédentes versions de ce vélo à tout faire ont clairement conquis le marché par un positionnement entre deux mondes que l’on a déjà eu l’opportunité d’aborder en long, large et travers dans nos colonnes.
Logique donc que l’annonce d’une nouvelle version – le Canyon Spectral 29 – fasse l’objet de convoitises. Les commentaires suite à sa présentation et prise en main en attestent. D’autant qu’au lancement du précédent, déjà, une seule petite ombre venait ternir un tableau presque parfait : pourquoi pas en 29 pouces ? La question se posait à l’époque, la réponse est désormais entre nos mains… Le Canyon Spectral 29 est à l’essai FullAttack !
Canyon Spectral 29 CF9
- All Mountain & Enduro
- 29 pouces
- 150/160 mm, RochShox Pike & Deluxe
- Triangle avant & arrière Carbone
- Reach 485 mm en L, Offset 42mm
- Roues DT Swiss XMC 1501
- Maxxis Minion DHF/Dissector Exo
- Sram Code RS, 200/200 mm
- 4 modèles, 4 tailles, 3299 à 5999 €
- 13,48 kg, taille L, tubeless + préventif
- Dispo immédiatement
- Détail sur www.canyon.com
Playbike !
C’était mon sentiment au moment de livrer mes premières impressions au sujet du Canyon Spectral 29, ça l’est encore plus au moment de livrer ce verdict : le Canyon Spectral n’a rien perdu de son tempérament joueur en passant aux roues de 29 pouces. C’est peut-être même celui qui dispose du tempérament polyvalent/ludique le plus marqué du marché.
Après tout, j’ai balayé plusieurs réglages de suspension, plusieurs trains de roues, plusieurs montes de pneus, plusieurs cockpits et sets de suspensions… Mais au final, la première impression reste bien présente et garde le dessus : facile à manier, que ce soit pour décoller en un clin d’oeil ou tourner d’un simple coup de rein.
Dans tous les cas, le Canyon Spectral se distingue par une stabilité d’assiette exceptionnelle et naturelle. À la pédale, à la relance, dans les appuis, quand le sol est défoncé… Il est toujours là où on l’attend, facile à solliciter, puisque sain dans sa présence et sa réponse. Un peu comme ce couteau suisse qu’on a toujours sous la main, et qu’on ne passe pas son temps à chercher…
D’où ça vient ?
Les différents essais menés pour aboutir à ce verdict n’ont fait que confirmer : la majeure partie de ce tempérament provient de la suspension arrière du Canyon Spectral 29. Une cinématique qui veut fonctionner en trois temps : début de course très souple jusqu’au SAG / maintien bien présent ensuite / fin de course qui verrouille. C’était déjà sensible sur les Spectral et Torque 27,5 pouces, mais ici le 29 – qui ne s’embarrasse pas de certains obstacles – semble le magnifier. C’est plus évident encore !
Son tempérament sain provient aussi du gentil carbone dont le Canyon Spectral 29 fait usage. Cintre, roues, cadre. Sur ce vélo, tout semble apporter l’avantage que l’on connait du carbone – légèreté, précision, maitrise de la raideur – sans les inconvénients – inconfort, exigence, fragilité. Depuis que j’ai mené l’enquête au sujet du carbone, j’attends avec impatience que nos vélos en exploitent le plein potentiel. Le Canyon Spectral 29 est à l’idée que je m’en faisais. On tient quelque chose ici…
Comment ça se règle ?
La seule chose à savoir avec le Canyon Spectral 29 porte sur les réglages. Le tempérament du vélo a beau être très présent, il se laisse ajuster juste ce qu’il faut. D’origine, le vélo est livré avec des réducteurs de volume dans la fourche et l’amortisseur. Dans cette configuration, en 150 mm à l’avant et en position haute, le vélo est top pour les terrains peu cassants, qui plus est s’ils sont compacts. Le vélo est une belle rocket. Les plus tatillons ajouteront même peut-être un réducteur dans la fourche pour bétonner un peu. Un vrai All Mountain bien dynamique !
Et si le terrain se fait plus cassant, il suffit de retirer les réducteurs. Le vélo n’y perd pas son âme, mais y gagne simplement en capacité d’amortissement. Dans ce cas, une fourche en 160 mm – soit en bricolant, soit en optant pour celles des montages Fox d’origine – puis la position basse lui vont à ravir ! La répartition des masses et l’assiette restent très bonnes – la suspension arrière a de la marge pour gérer ça. Racines, pierres, rochers, marches, etc… C’est là qu’on retrouve pleinement le Canyon Spectral ultra-polyvalent, à la croisée des mondes que l’on connait. Avec quelque chose en plus qui a tout l’air des avantages du 29, sans les inconvénients…
Avant | Arrière | |
SAG | 25 à 30% | 30% |
Détente | 2/3 ouverte | 2/3 ouverte |
Compression | ouverte | ouverte |
Réducteurs de volume | d’origine ou sans | d’origine ou sans |
Clics de détente et compression comptés depuis la position la plus vissée des molettes. SAG arrière réalisé assis/selle haute – SAG avant réalisé debout/bras en appui sur le cintre / épaules à l’aplomb du guidon.
Comment ça se pilote ?
Polyvalent et joueur donc, le Canyon Spectral sait l’être. De par les ajustements dont on vient de parler, et de par les styles qu’il accepte pour se laisser dompter. Plusieurs cas de figure intéressants pour bien saisir…
En l’air
Quand on parle d’un vélo joueur, c’est nécessairement sa capacité à prendre les airs, les tenir, et en revenir, que l’on a en premier à l’esprit. Avec réducteurs de volume, le Canyon Spectral 29 le fait en un clin d’oeil. Il tolère même de ne pas être très académique dans le transfert des masses en bunny-up. Heureusement, parce que son assiette très stable peut ne pas faciliter la tâche s’il faut forcer le geste. Si tel est le cas, c’est signe qu’il est temps de retirer les réducteurs de volume, libérer un peu la bête, et faire étalage de tout son talent.
Quoi qu’il en soit, économe en débattement, bien tenu, agile… Tout ce qu’il faut pour que le vélo soit facile une fois les roues décollées du sol. Il est un régal à placer pour faire retomber les roues à des endroits précis. Qu’il faille poser les deux successivement au même endroit sketchy, ou qu’il faille anticiper en l’air, l’appui qu’il ne faut pas rater pour la suite ! À cet instant précis, la lecture du terrain est un régal de maitrise dans la restitution sans jamais taper dans les mains…
En courbe…
Autre cas de figure évident où le Canyon Spectral 29 a tous les signes d’un vélo passe-partout par excellence : les virages ! Certains vélos demandent ou incitent à s’appliquer dans la gestuelle. Bien sûr, ici, plus c’est exécuté avec talent, plus les sensations sont excellentes. Mais au delà de ça, le Canyon Spectral et sa capacité à tourner d’un coup de rein offre surtout le choix de la méthode. Notamment avec les pieds : extérieur en bas ou manivelles à plat, les deux écoles sont possibles.
Dans tous les cas, sa belle assiette et sa tolérance vis-à-vis du terrain gardent le bonhomme dans un environnement où il fait bon prendre des initiatives, tenter des choses, l’inverse de l’ennui en somme… Et ici encore, de la version 150 mm avec réducteurs à la version 160 mm libérée, le Canyon Spectral couvre un joli spectre. Capable de tourner dans un mouchoir sans trop d’effort dans le premier cas, jusqu’à ce qu’il faut pour mettre de l’angle sans y perdre la facilité de coup de rein pour shralper dans le second !
À la pédale…
Belle assiette = assise excellente. C’est vraiment un trait que l’on retrouve sur le Canyon Spectral 29, quelle que soit sa configuration. Il fait vraiment bon s’y assoir et pédaler sans jamais avoir la sensation de faire du pédalo ou choper le mal de mer. Ça ne bouge pas tout en avalant ce qu’il faut du terrain pour déployer la puissance sans avoir à tricoter ou se lever au premier caillou.
Et ici aussi la polyvalence du vélo s’exprime : assis au train ou debout à la relance, il n’y a pas de situation meilleure qu’une autre. Le Canyon Spectral est simplement bon ! Ça tient encore à sa cinématique plus qu’à ses roues. Certes, les DT Swiss carbone du montage passé à l’essai apportent du peps et limitent l’inertie, mais elles s’accordent surtout au tempérament propre au vélo. Elle le mettent en valeur et l’accompagnent plus qu’autre chose…
Quand ça brasse
On l’a évoqué en parlant des réglages de suspension, le Canyon Spectral offre un beau spectre en matière d’amortissement. Plus ça brasse, plus j’ai tendance à conseiller de le libérer en retirant les réducteurs de volume, et/ou augmentant le débattement avant. Le tout étant, toujours, qu’il conserve par ailleurs le bon maintien qui correspond au style du pilote. Et c’est clairement la complaisance du châssis qui permet ça. Même quand ça brasse fort, le Canyon Spectral a toujours ce toucher, ce premier contact, qui reste doux. Un régal qui permet d’abord de laisser filer, puis de prendre des initiatives pour tirer/sauter/pumper. La seule réelle limite porte sur les plus gros impacts. Ça provient en grande partie des capacités de l’amortisseur, mais globalement, le vélo ne fait alors pas de miracles. Ce que les meilleurs amortisseurs apportent en la matière reste leur apanage et ici, le Canyon Spectral a le mérite de faire fonctionner au delà des attentes, des amortisseurs somme toute modestes à la base…
Dans la pente…
Dernier cas de figure où la polyvalence et le tempérament joueur du Canyon Spectral 29 peuvent s’exprimer : dans la pente. C’est peut-être là d’ailleurs qu’il trouve, ou pas, leurs limites. Ou disons que c’est là aussi, que le choix entre fourche de 150 ou 160 mm a tout son sens. L’angle de direction un poil plus couché et le gain de stack que ça représente sont sensibles puisque par ailleurs, le maintien qu’offre la suspension arrière après SAG n’est pas favorable à tasser le vélo. Et c’est parce que c’est logiquement en 160 mm avec un casting qui se tient bien qu’il est le plus à l’aise dans la pente, que je trouve le Canyon Spectral le plus à son image et à propos. Dans ce cas, un régal à placer, notamment en n’oubliant pas de piloter avec les jambes !
Pour qui ? Pour quoi faire ?
À force de parler de spectre, il faut le définir. Je vois clairement le Canyon Spectral occuper celui qui va du petit All Mountain qui rend la rando du dimanche matin ludique, à l’Enduro qui fait merveille sur les rallyes régionaux en massifs de moyenne montagne. Plus haut en altitude, le Canyon Spectral joue le bon compagnon pour l’aventure en vélo de montagne, à la pédale. C’est donc un vélo bon à tout faire ou presque pour ce qui nous concerne.
D’autant qu’il est accessible, sans être fade ou perdre son latin quand le rythme augmente. Il ne lui manquerait d’ailleurs plus grand chose, peut-être un poil de débattement et de rigidité pour voir encore plus large et rouler sereinement en station. Là, c’est juste qu’on finit par sortir de sa zone de confort, et qu’il faut du talent pour continuer à en profiter. En tout cas, je comprends Dimitri Tordo et Jack Moir qui semblent passer un bon hiver à son guidon 😉
La Concurrence ?
Orbea Occam
Même positionnement, même ambition, et pas loin d’être sur le même résultat. La différence se joue sur la méthode pour y parvenir. Le Occam doit beaucoup au travail effectué sur les settings internes de l’amortisseur, là où le Spectral parvient à faire travailler des amortisseurs plus modestes. Sur le terrain, le Occam est économe car sa suspension sait revenir très vite, là où le Spectral se tient davantage sans avoir à taper dedans pour qu’il fonctionne…
Commençal Meta TR
Neutre et bien réparti : on parle pas un peu des Commençal Meta là ? Sur les capacités, le Spectral en 160 mm avant vaut un Meta TR. Il en a la stabilité d’assiette et la bonne maitrise de la raideur, tout en carbone et deux kilos moins lourd sur la balance. Ceux pour qui ça compte apprécieront. Ceux pour qui la dynamique du vélo compte avant tout apprécieront le caractère encore plus sain et posé des Commençal qui mordent le sol, et qui assoient juste ce qu’il faut de plus sur la roue arrière, sans se tasser.
YT Jeffsy
Visuellement, des faux frères, même s’ils partagent la même patrie. En 150 mm et avec les réducteurs, il me rappelle l’ancien Jeffsy dont la suspension arrière verrouillait encore plus vite passé la mi-course. Mais le Canyon Spectral 29 sait mieux se tenir avant, et se libère facilement avec quelques réglages. La différence se fait aussi sur la position et la répartition des masses. Le Jeffsy assoie son pilote sur la roue arrière, là où le Canyon Spectral est plus neutre, centré.
Lapierre Zesty
Les deux sont joueurs, mais pas de la même manière. Le dynamisme du Spectral vient de son assiette naturellement très stable qui laisse l’opportunité de faire un peu tout, et parfois n’importe quoi. Les Lapierre méritent au contraire de jouer de la dynamique au boitier, du transfert de masse que ça peut impliquer. Ils savent être tolérants avant d’y parvenir, mais méritent qu’on fasse ce petit effort d’apprentissage, là où le Spectral s’en moque un peu. Les deux sont d’un carbone tolérant, mais ici aussi, le Spectral est plus neutre, mieux réparti.
Polyvalent, passe partout, à la croisée des mondes, facile, ludique, sain… Les mots ne manquent pas, mais le Canyon Spectral 29 réussi un sacré tour de force ! Celui d’être dans la droite lignée du playbike qu’est son prédécesseur, tout en faisant usage des roues de 29 pouces. Mieux, il en tire les avantages sans en exprimer les inconvénients ! Un tour de force relevé avec brio qui est à double tranchant : il y a forcément du boulot pour y parvenir, mais ça parait si facile, qu’on regretterait presque qu’il ne soit pas sur le marché depuis plus longtemps, et plus largement > #shortlist des tous bons du moment !
Les capacités du vélo font que rapidement, les Maxxis en carcasses Exo sont à la dérive. On attend plus résistant désormais, sur ce segment de vélos ! Sram G2 en disque de 180 mm à l’arrière : autre élément limitant sur ce Spectral 29 qui mérite plus dès qu’on hausse un peu le rythme… Compatible avec une gourde, mais pas plus de 600 ml, avec le modèle Canyon. Les 750 ml, un minimum pour rouler serein et longtemps, sont trop longues.