Val di Sole 2021 – Les leçons de Myriam Nicole & Greg Minnaar !

La poussière et les quelques gouttes – qui ont pu nous faire frémir – sont retombées à Val di Sole. Myriam Nicole et Greg Minnaar sont champions du monde. On pourrait refermer le livre de ces mondiaux de Descente et enchainer ave la reprise EWS et la suite de la coupe du Monde qui arrivent très vite. Pourtant, à bien des égards, les prestations de Myriam Nicole et Greg Minnaar ont tout d’exemplaires. Si bien qu’ils méritent qu’on s’attardent sur ces deux coups de maitres, ou cas d’école, c’est selon…

Maitre Minnaar…

Secteur 1

De la cabane de départ à la sortie du premier vrai gauche dans le bois, ce secteur comporte la première partie Bike Park aux relevés lisses et rapides, ainsi que la première ligne droite boisée où Loic Bruni a tutoyé Mars… Pas de quoi faire une différence significative – surtout lorsque l’on sait ce qui suit – mais tout de même de quoi bien se mettre dans le bain. D’ailleurs ça ne trompe pas : le top 5 du secteur correspond au top 5 final ! Il s’agit maintenant d’en déterminer l’ordre… Jusqu’ici : Brosnan, Hart, Vergier, Minnaar et Coulanges se tiennent en moins d’une seconde.


Secteur 2

Dans la clairière, sous les cabines, ce secteur alterne les anciennes portions avec les nouveaux appuis et relevés créés pour l’occasion. La pluie y a compacté la terre. La première partie est la plus turbulente, la seconde fait plus artificielle. Entre les deux, le ponts qui constitue le premier replat de la piste. Dans les deux cas, il faut y être précis pour tirer partie des portions lisses où freiner pousser, tourner… Un exercice dans lequel Loris Vergier excelle, il nous l’a montré à Maribor. Pareil pour Danny Hart, qui sait être dynamique, et pour Benoit Coulanges, qui a su l’être mieux que quiconque à Valberg. Plus étonnant, Troy Brosnan y lâche une seconde pleine alors qu’il est aussi réputé pour ça, tandis que Greg Minnaar semble avoir décroché et mène désormais le second paquet…


Secteur 3

Le secteur débute par les trois impressionnants pierriers faits mains, avant deux plongeons et le second replat de la piste. C’est là que Greg Minnaar passe à l’offensive ! Seul Benoit Coulanges parvient à suivre et s’empare de la tête au jeu du cumul. Les autres sont à près d’une seconde sur le secteur. Les deux plus grands de ce top 10 profitent de leurs envergures pour enrouler les énormes mouvements de terrain, parviennent à survoler le terrain sans buter dans les trous, tout ça en faisant tourner leurs vélos XXL dans deux des courbes les plus serrées de la piste ! Relégués à plus d’une seconde et demie, Loris Vergier et Danny Hart marquent le pas…


Secteur 4

Avec Benoit Coulanges, Troy Brosnan n’a pas dit son dernier mot. Meilleur temps de ce quatrième secteur juste devant Greg Minnaar. Le top 3 ici, est celui de l’arrivée, dans le désordre. Preuve que c’est là que ça s’est joué pour la médaille. Troy et Greg fondent sur Benoit Coulanges. Les deux pilotes de l’hémisphère Sud semblent plus précis que le Français, rapide mais plus à la limite. Surtout, Greg Minnaar semble trouver du relâchement, de quoi sauver de l’énergie et de la fraicheur, là où les deux autres en dépensent plus que de raison…


Secteur 5

Dernière section boisée, dernière section défoncée, puis mythique plongeon vers l’arrivée et son dernier sprint. Si Loic Bruni s’invite à la fête, il est déjà trop tard, le mal est fait. Troy Brosnan est à deux doigts d’imiter son illustre ainé australien dans le dernier virage, mais l’avant rattrape l’arrière. Dans le dernier sprint pour la ligne, Greg Minnaar emprunte la technique de Sam Blenkinsop pour le dernier rush dont Benoit Coulanges, à bout de force, se passe. La différence est faite.

… Et Madame Nicole !

Secteur 1

Si Greg Minnaar l’emporte pour un rien chez les garçons, Myriam Nicole s’offre un boulevard chez les filles. Et ce, dès le premier intermédiaire ! Hormis Tahnee Seagrave à une demi-seconde, tout le monde est déjà relégué à plus d’une seconde et demi dès le premier secteur. Et vu le profil du terrain, aucun doute : une bonne partie de la différence se fait dans le bois, là où il faut engager dans la pente et les rochers…


Secteur 2

La preuve, Myriam Nicole remet ça dès le second intermédiaire ! Cette fois, près de deux secondes sur sa première concurrente, et pas n’importe laquelle ! Camille Balanche, championne en titre et dont on constate depuis le début de saison que la pente est son domaine. La preuve ici encore, même si c’est à bonne distance de Myriam. C’est ici, aussi, que Marine Cabirou commence à se montrer. Le podium est déjà en train de se jouer, là où on l’imagine à Val di Sole : dans la pente !


Secteur 3

Partie sur un telle rythme, on pourrait penser que Myriam Nicole va survoler la course. C’est presque le cas, à une exception : le troisième secteur, celui des monstres pierriers du milieu. Elle y fait l’effort de laisser rouler le vélo et de rattraper/freiner aux bons endroits, mais ici, l’impression de propreté et précision de Marine Cabirou l’emporte. C’est là que la différence se fait avec Camille Balanche pour les médailles d’argent et de bronze. Dos à dos jusqu’ici, le relâchement de la Suissesse concède deux secondes pleines à l’engagement de la Française.


Secteur 4

Deux secondes, c’est suffisant pour couvrir la petite erreur du secteur suivant. Juste avant les deux derniers virages qui le composte, Marine marque un léger temps d’arrêt, là où Myriam et Camille passent sans hésitation. Ça, plus une trajectoire plus sûre mais moins directe dans les souches et rochers au coeur du secteur lui font perdre un peu de temps là où Myriam Nicole enfonce le clou. Près de quatre secondes et demi d’avance à l’entrée du dernier secteur… La messe est dite !


Secteur 5

Dernier secteur de la piste, les dès sont jetés. Il n’y à qu’à voir les courbes au cumul : plus aucun changement de position au sein du top 10 féminin ici. Les temps sont d’ailleurs très serrés sur cette dernière portion de piste. les huit premières se tiennent en une demie seconde. Seules Emilie Siegenthaler et Marine Cabirou sont plus distancées. Pour la Française, un écart logique puisqu’elle, suite à sa blessure aux Gets, ne s’est pas entrainée comme elle l’aurait souhaité cet été. Qu’importe, elle a su faire la différence avant…

Leçons du jour…

À l’issue de ces championnats du monde de Val di Sole 2021, un constat s’impose. Chez les garçons comme chez les filles, les vainqueurs ont donné une leçon à leurs poursuivants. Maitre Minnaar et Madame Nicole ont distribué les bons points, et tiré les oreilles des plus turbulents. Si l’on fait exception d’Emilie Siegenthaler qui tirera sa révérence en fin de saison, Myriam Nicole et Greg Minnaar sont les doyens des top 10 qu’ils mènent respectivement. Et ça se voit ! Tous deux ont su, mieux que quiconque, composer avec la recette qui fait mouche un jour de championnat du monde.

Ce n’est pas l’attaque et l’engagement de Myriam Nicole, en tête – et d’une belle marge – de bout en bout, qui dira le contraire. Le voilà, le run plein et dominant, qui vient concrétiser la montée en puissance et le potentiel qu’on lui prêtait depuis le début de saison. Un run qui tombe au meilleur moment, comme savent le faire les champions… Et c’est d’ailleurs ce que l’on pouvait pressentir dans ses propos, plein de clairvoyance et d’expérience, au moment d’expliquer la particularité que constitue une semaine de coupe du monde, et sa journée d’entrainement supplémentaire… Madame la professeur avait pourtant bien expliqué comment faire !

En parlant d’exemple, que dire de Greg Minnaar cette semaine ? Si ce n’est de relever la chance qu’on a d’avoir pu suivre ses travaux, assez ouvertement, à travers les diverses productions vidéos dont il a fait l’objet durant la semaine ?! Son run est un modèle de gestion, de maitrise et d’initiative. Clairement pas le run idéal qui surclasserait le reste du monde, mais toujours ce qu’il faut, où il faut. Propre et précis par endroits, plus engagé et limite à d’autres avec juste ce qu’il faut de folie par endroits… Et surtout, capable de sauver de l’énergie pour en remettre là où ça comptait ! Au bout du bout, c’est ce qui fait la différence, sur la ligne ! En début de semaine, il constatait de la piste qu’elle était plus propre en haut, et plus brutale en bas. Il fallait composer avec, et lui mieux que quiconque, a su le faire ! Dans son pilotage lors du run final, mais pas seulement…

Toute la semaine aussi, en sachant être à l’écoute de son matériel, et trouver comment jouer de ses capacités pour rester en phase avec la piste qui évolue. Quand on voit avec quelle maitrise et quelle différence il parcours les secteurs 3 et 4, il y a de quoi réfléchir plus d’une fois à l’importance de certains détails. Vendredi, en quête d’assiette, de maintien et de stabilité, il n’avait pas souhaité ajouter de compression à l’arrière, pour garder du confort, mais avait positionné les plongeurs 2mm plus haut dans les tés à la place… Dimanche, sur une piste rendue plus compacte par la pluie : détentes légèrement plus freinées pour calmer un peu le vélo. Des cas d’école, la base ! On aurait presque parfois tendance à l’oublier, mais dans ce sport, l’homme et la machine dévalent la pente et passent ensemble la ligne d’arrivée. Et pour être les plus rapides, le deux doivent s’entendre. The GOAT nous l’a clairement montré. Voilà qui justifie, au delà des années, que ce quatrième titre – conquis 20ans après ses premiers championnats du monde – soit plus que jamais celui de l’expérience ! WOW !