Nous avons été conviés durant l’été à Samoëns à la présentation en avant-première de la future gamme Sunn ; l’occasion de rencontrer la nouvelle équipe, discuter de la stratégie, découvrir la future gamme et même essayer le nouveau Sunn Kern LT ! Mais avant de vous parler produit, il nous semble important de replacer Sunn dans son contexte historique récent et de vous expliquer la stratégie des ses nouveaux propriétaires…
Un nouveau départ
Intersport France (on parle bien là du réseau de distribution coopératif français et non pas de la holding international) a racheté en 2013 l’ex-usine Cycleurope de Machecoul (haut lieu historique du vélo puisque Gitane est née là-bas en 1925) près de Nantes afin de rapatrier en interne et maîtriser au mieux le montage de ses vélos (Nakamura notamment). De ce rachat est née la Manufacture Française du Cycle (MFC), l’un des plus gros assembleurs de vélos en Europe. Peu de temps après, fin 2013, MFC s’est portée acquéreur de la marque Sunn suite à la liquidation judiciaire de son propriétaire MCC.
Ainsi, depuis maintenant deux ans, une nouvelle équipe « produit » réduite et indépendante au sein de MFC a été mise en place pour relancer la célèbre marque de VTT avec une vraie stratégie de marque orientée performance et ce au travers d’un réseau de distribution de détails dans un premier temps français. Cela signifie que n’importe quel détaillant respectant le cahier des charges établi avec des critères d’éligibilité précis (surface minimum, présence permanente d’un vendeur et d’un technicien…) pourra distribuer la future gamme Sunn et ce sans notion d’affiliation ou de priorité au réseau Intersport.
Pour cette première mouture de la nouvelle ère Sunn, l’équipe « produit » est composée d’Alexis Touteau (Designer cadres) et Antoine Chapon (Responsable des spécifications techniques) assistés par l’équipe Antidote Solutions (les ex-Sunnistes Fred Bernard et Alex Guiral) en charge du développement de la cinématique des tout-suspendus. Les cadres sont bien évidemment produits en Asie, en revanche les vélos sont assemblés en France à Machecoul. Un atelier de peinture spécifique aux montages haut de gamme est également à l’étude.
Partie sur des bases différentes au début de l’aventure, l’équipe a finalement revu sa copie en cours de route pour repartir d’une feuille blanche afin de coller au mieux à l’identité d’une « vraie » marque de VTT. C’est ce qui explique en grande partie l’absence d’une gamme au Roc 2014, un teasing un peu trop long au goût de certains pratiquants et l’arrivée tardive des vélos du team. Voilà, le décor est planté et l’équipe est formelle, les nouveaux Sunn ne sont ni des vélos de grande surface ni des vélos de catalogue achetés à un sous-traitant asiatique…
Nouvelle signature visuelle
Comme le précise l’équipe, pas mal de boulot a été fait pour que les nouveaux Sunn soient identifiables au premier coup d’oeil et pour ce faire, chaque vélo a reçu une signature visuelle commune à toute la gamme.
Tous les vélos de la gamme et notamment les alu (alliage 6069T6 pour son rapport résistance/poids/confort) adoptent des tubes hydroformés « Edge Tubing » (« ET ») aux arrêtes saillantes. En plus du parti-pris esthétique (tube supérieur fin pour inspirer la performance/fluidité et le tube diagonale épais pour le côté robuste), cette construction améliore les caractéristiques dynamiques du cadre en réduisant selon Sunn l’effet de torsion au pédalage tout en optimisant sa souplesse verticale. La forme conique de la douille de direction participe à l’optimisation de la rigidité du train avant.
Que ce soit sur les semi-rigides ou la famille Kern, le résultat est plutôt sympa avec des lignes qui se prolongent de la douille jusqu’aux drop-outs.
Côté détails cosmétiques, la marque compte s’appuyer sur son riche passé avec pas mal de clin d’oeil et rappels sur les vélos. On retrouve ainsi la patate à certains endroits mais surtout la Sunnille (les quatre formes arrondies rouge qui précèdent le logo Sunn) un peu partout sur les vélos : préformée sur tous les top-tubes, stickée ou découpée sur les douilles, usinée dans les biellettes ou le collier de selle, sur les bases…
On notera au passage que MCF a étonnamment choisi de rependre la typo du logo Sunn du début des années 2000 (après le premier coup dur pour la marque), période où Sunn se « cherchait » un peu avec des vélos qui n’ont pas forcément marqué leur époque.
La gamme 2016
Prix de vente conseillés et poids constructeur
Voici la gamme Trail/AM/Enduro disponible en magasins d’ici octobre prochain…
Kern LT
Orienté Enduro et paré pour la compétition, le Kern LT (pour Long Travel) dispose de 160 mm de débattement…
Kern
Typé All Mountain, le Kern (27,5) est paré pour les longues virées en montagne avec ses 140 mm de débattement et transmission double plateaux…
Kern SL
Doté comme tous les Kern de roues en 27,5 pouces, le Kern SL se veut le parfait vélo de rando avec 120 mm de débattement avant/arrière…
Exact
Semi-rigide polyvalent alu (6069 T6) doté de roues en 27,5 pouces et monté avec une fourche en 120 mm…
Legend
Semi-rigide orienté « Trail » en CrMo proposant 120 mm de débattement et des roues en 27,5 pouces. La déco reprend les différents logos de l’histoire de la marque. Modèle en édition limitée (100 exemplaires).
Et aussi
Sunn propose aussi une gamme complète de semi-rigides XC, un Fat, un VTTAE semi-rigide et de BMX Race…
La famille Kern en détails
En collaboration avec Antidote Solutions, Sunn a développé une cinématique « VRLR » commune à la famille Kern qui s’articule autour de deux concepts : « VR » (« Virtual Rotation » ; principe d’une cinématique à points de pivots virtuels, avec la gestion des Centres instantanés de Rotation) et « LR » (« Leverage Ratio » ; ratio évolutif tout au long du débattement).
Grâce à une gestion précise des Centre instantanés de rotation (CIR) et un ratio (assez haut en début de course) qui évolue tout au long du débattement, cette cinématique (avec une courbe progressive et parabolique ; dans la même logique que la précédente génération de Kern LT) permet d’apporter sensibilité/grip/rendement en début de course, davantage de grip et de confort sans kickback ni pompage en milieu de débattement et une bonne progressivité en fin de course.
On notera que pour optimiser les contraintes et la rigidité, le pied de l’amortisseur (qui passe à travers un tunnel dans le tube de selle) est pris directement sur l’axe inférieur qui relie le triangle avant et le triangle arrière.
Les plus subtiles d’entre-vous auront peut-être remarqué que l’appellation « VRLR » est un clin d’oeil au passé et au célèbre slogan « Va Rouler ».
En matière de géométrie, la famille Kern propose des côtes « modernes » mais pas extrêmes, bien dans la moyenne de ce qu’il se fait actuellement sur le marché : avant assez long, bases plutôt courtes, potence courte, angle de chasse prononcé…
Voilà pour ce qui est des explications factuelles, passons maintenant à l’essai terrain !
Au guidon du Kern LT
A l’occasion de cette présentation, c’est la version Replica du Kern LT que nous avons pu tester sur les pentes de Samoëns, le temps d’une après-midi en compagnie du pilote Kilian Bron.
Pas de quoi réaliser un essai à proprement parler mais une session suffisamment instructive pour se faire une idée précise du boulot réalisé par la nouvelle équipe…
Première chose, en vrai, le Kern LT rend bien mieux (comme souvent d’ailleurs) que sur une photo studio. La multitude de détails et le travail des tubes sont plutôt flatteurs. Tous les passages de gaines se font en interne.
Sur le vélo, on trouve assez facilement ses marques et on se sent bien pour pédaler ; le vélo (en taille M ici) n’est pas excessivement long.
Dès les premiers tours de manivelles, on sent que le vélo répond bien au pédalage, plutôt très bien d’ailleurs pour un alu. Le LT est bien aidé dans l’exercice par les roues Roam 60 en carbone. La position intermédiaire de la plateforme du Monarch Plus permet de gagner en efficacité au pédalage tout en gardant du grip. Comme souvent sur les vélos possédant un « tunnel », en roulant ce n’est pas très facile d’atteindre la manette.
En descente, sur des trails assez pentus et bardés de racines, le Kern LT offre un comportement à la fois facile et rassurant à bonne vitesse. Quelque soit la surface ou l’obstacle, la suspension arrière est confortable et confère un sacré grip en toute circonstance. On retrouve un peu le feeling de l’ancienne génération de LT.
Au niveau du montage, tout est cohérent pour le programme Enduro avec notamment un guidon bien large (Race Face carbone en 785 mm), des freins constants et endurants (Guide RSC 180 mm), une bonne transmission mono 11 vitesses (XX1) et des suspensions haut de gamme signées RockShox qui fonctionnement à merveille.
Seules les roues ne nous paraissent pas forcément le meilleur choix. On comprend bien que ce sont les roues du team (et d’ailleurs pas tout le temps…) donc c’est en toute logique qu’on les retrouve sur cette version Replica… mais à quel prix ! Elles sont à la fois beaucoup moins confortables sur le terrain (ça ne pardonne pas !) que leur équivalent Roam 50 en alu et surtout elles font certainement exploser l’addition finale de ce modèle.
A 6690 euros le « bout » (d’alu…), le Replica n’est pas bon marché malgré un montage très haut de gamme et un comportement sympa. La parité euros/dollars défavorable y est surement pour quelque chose mais quand même.
Après quelques heures au guidon du Kern LT, le résultat est à la fois plaisant et prometteur. Même si ce vélo a les atouts pour jouer en compétitions (et Thomas Lapeyrie l’a prouvé avec sa cinquième place à l’EWS de Samoëns), ce Kern LT est selon nous tout autant (voir plus) orienté fun/plaisir que performance pure. Une chose est sûre après cette mise en bouche sur le terrain, Sunn a entre les mains une bonne base pour reconquérir le coeur des enduristes.