Stoïque !
Récemment présenté par Canyon comme un vélo tout terrain moderne, le nouveau semi-rigide Canyon Stoic avait de quoi séduire… Effectivement entre son look agréable, son rapport équipement / prix intéressant et ses chiffres dans l’air du temps, il nous a fait de l’oeil malgré la discrétion de son créneau/sa catégorie dans nos colonnes !
L’occasion pour moi de remettre le pied à l’étrier sur un semi-rigide… Pour découvrir ce que ce Canyon Stoic nous réserve dans les sentiers. Alors est-il véritablement moderne ? Est-il si attrayant visuellement que dans les faits ? L’essai est lancé…
Canyon Stoic 4
- Usage All Mountain / Enduro
- Roues 29 pouces
- RockShox Pike Select 140 mm
- Cadre alu 6061-T6
- Reach 480 mm / bases 428 mm (taille L) & offset 51 mm
- Pneus Schwalbe ST Addix Soft 2.35
- Freins Sram Guide T, 200/180 mm
- 3 modèles, 6 tailles, de 899 à 1699 €
- 14,46 kg (L, tubeless, sans pédales)
- Fiche technique sur canyon.com/
Première impression !
15 ans après mes derniers tours de roues sur un VTT semi-rigide, j’appréhendais forcément de me faire secouer le prunier sur ce Canyon Stoic. Finalement, c’est là que toute la magie du corps humain opère… Les souvenirs ressurgissent, les sensations reviennent rapidement et les réflexes refont vite surface !
Ce qui me permet de m’apercevoir très tôt que ce Stoic m’oblige à me mouvoir d’avant en arrière en permanence. Je dois sans cesse jouer de la répartition des masses et donc de la position de mon corps pour réussir à tirer un manual, pour tourner à plat, pour franchir une marche…. Il faut s’employer pour le bouger. Ça demande à piloter, mais qu’est ce que c’est bon !
Puis, bien que ce soit un semi-rigide, certains m’ont paru plus confortables. Le Canyon Stoic a son petit côté bout de bois ou stoïque, notamment dans la dimension verticale. Au pédalage, les aspérités du sol remontent sèchement dans le derrière, une fois debout le moindre cailloux qui dépasse de la surface peut vite rappeler à l’ordre les chevilles ! Enfin, certaines morphologies pourront lui reprocher une position de pédalage un poil couchée… J’ai moi même volontairement avancé la selle au maximum dans les rails pour trouver une position confortable. Mais tout ça s’explique facilement…
D’où ça vient ?
Pour son côté long, il suffit de se pencher sur sa géométrie pour s’en saisir. Reach de 480 mm, bases de 428 mm et empattement total à 1222 mm en taille L. Il fait ainsi partie de ces quelques semi-rigides longs de l’avant et pas forcément courts de l’arrière. Le rapport AV / AR implique donc de se déplacer beaucoup en avant ou en arrière pour charger une roue et délester l’autre. De plus, son tube de selle à 75° pourrait être plus redressé pour recentrer les masses au pédalage et redresser la position assise pour certains.
Ensuite, c’est le cadre qui est rigide ! Sa construction n’y est certainement pas pour rien : les renforts, la forme et les dimensions des tubes d’alu et leur assemblage ne participent probablement pas à le rendre souple et tolérant. Au contraire : il ne travaille pas beaucoup, il porte bien son nom – il reste stoïque. Et pourtant pas l’ombre d’une fibre de carbone à l’horizon, comme quoi le matériau n’est jamais la seul en cause…
Comment ça se règle ?
Jouer sur la pression des pneus est donc primordial pour gagner en confort. C’est de coutume sur un hardtail, encore plus sur le Canyon Stoic. Cependant les pneus d’origine Schwalbe n’aident pas à trouver le bon équilibre. Quand le gain de confort devient intéressant, le rendement chute drastiquement. Trouver le compromis acceptable est de ce fait délicat : autour des 1,3 bars à l’avant et 1,4 bars à l’arrière pour ma part !
De plus, sa longueur implique que chaque mouvement de fourche influence beaucoup l’assiette du vélo. Pour éviter qu’il n’oscille trop et qu’il impose au pilote de devoir compenser pour se stabiliser à chaque impact, opter pour des réglages de fourches durs et fermes est intéressant… quitte à perdre en confort – au moins ça colle avec l’arrière :
Avant | Arrière | |
SAG | 20% | N/A |
Détente | 1/4 ouverte | N/A |
Compression | 1/2 ouverte | N/A |
Réducteurs de volume | d’origine | N/A |
Clics de détente et compression comptés depuis la position la plus vissée des molettes. SAG arrière réalisé assis/selle haute – SAG avant réalisé debout/bras en appui sur le cintre / épaules à l’aplomb du guidon. Pour un gabarit moyen de 75/80kg.
Comment ça se pilote ?
Nos premiers ressentis laissent déjà entrevoir quelques notions de pilotage… Il est maintenant temps d’entrer plus dans les détails :
En courbe comme en ligne droite !
Quelques soit la situation, les dimensions du Canyon Stoic impliquent de jouer entre un positionnement plus sur l’avant ou plus sur l’arrière. Et de ne pas conserver cette position a vitam eternam. Il faut jouer et en jouer pour bouger le Stoic.
Certes, c’est au coeur du pilotage moderne avec des vélos plus longs qu’auparavant et ça demande de plus s’employer, mais ça permet aussi de calibrer plus finement l’appui que l’on souhaite mettre sur le vélo, de gagner en place… On ne se sent pas enfermé dans une cage, il faut profiter de cette liberté pour s’épanouir et s’exprimer !
En manual, en wheeling…
Les bases pas forcément courtes du Canyon Stoic et son empattement assez long ne facilitent pas la tache lorsqu’il est question de lever l’avant. Pour le coup, il faut marquer assez franchement l’impulsion pour inciter l’avant à décoller du sol.
C’est une piqûre de rappel. Ça peut demander un petit temps d’adaptation pour se dire qu’il ne faut pas hésiter. Puis, ça va aussi dans le sens qu’il faut se mouvoir pour en tirer parti.
Quand ça tape !
Semi-rigide oblige, la souplesse est de rigueur ! Mais encore plus avec ce Canyon Stoic particulièrement rigide verticalement. Notamment de l’ensemble arrière bases / haubans / tube de selle…
On doit faire le job à sa place quand il est question d’absorber les vibrations et les impacts : toutes les articulations doivent être mobilisées, au garde à vous : fléchies, prêtes à réagir. L’anticipation est aussi une bonne chose si elle permet d’éviter certains gros impacts… contourner, ne pas forcément prendre la trajectoire la plus directe ou la plus courte est parfois ici salvateur !
Au pédalage
Et c’est aussi le cas au pédalage. Assis sur la selle, les impacts remontent fort dans les fesses et le bas du dos : anticiper, se lever sur les pédales, choisir la ligne la plus lisse est souvent plus raisonnable…
Lorsque c’est lisse, entre le pneu Schwalbe Hans Dampf Super Trail Addix Soft qui perd fortement en rendement à ces pressions et un tube de selle qui pourrait être plus redressé, on prend son mal en patience. On ne vole pas sur le Canyon Stoic, autant le savoir !
NDLR : à 1,4 bars de pression, un Maxxis Minion DHRII EXO/EXO+ Maxx Terra 2.4 rend bien mieux que le Schwalbe cité précemment
Pour qui ? Pour quoi faire ?
Par une géométrie moderne mais pas forcément radicale et une rigidité prononcée, le Canyon Stoic vogue entre 2 mondes : All Mountain et Enduro. D’autres hardtails, avec une géométrie plus radicale et un cadre plus tolérant, s’accaparent forcément le segment le plus engagé de la pratique VTT. Le Canyon Stoic s’y frotte sans vraiment avoir la carrure pour concurrencer sur ce créneau. Il s’adresse donc à ceux qui ne se soucient pas vraiment de le catégoriser, mais veulent tout simplement rouler et s’en délecter à chaque sortie.
Reste que le Canyon Stoic impose, par ses proportions, d’exacerber les gestes pour jouer de sa position et en tirer parti. Il demande soit le bagage technique, soit un temps d’adaptation, pour composer avec ses dimensions, mais aussi le bagage physique pour s’accommoder de sa rigidité accrue – autant en montée qu’en descente.
La Concurrence ?
Santa Cruz Chameleon
Chacun appartient à son époque ! L’américain faisait la passerelle entre le XC et une pratique plus Gravity à l’époque, quand l’allemand est clairement dans ce créneau Gravity comme on l’entend aujourd’hui, pour une pratique plus engagée : par sa géométrie notamment.
Kona Honzo ESD
À l’essai en ce moment, le confort du Kona me confirme que la raideur ressentie sur le Canyon n’est pas imputable à ce retour sur un semi-rigide après 15 ans d’abstinence. Le Kona est aussi bien plus long de l’avant et plus court de l’arrière. Mais il est bien plus facile à manier, plus joueur : il confirme que les proportions du Stoic impose de bouger dessus !
Au travers de ce Stoic, on retrouve les traits qu’on pourrait prêter à sa marque Canyon : une volonté de satisfaire le plus grand nombre sans forcément délaisser l’image et l’aspect cool du VTT, notamment par son look discret mais ravageur. Comme avec le Spectral, Canyon vise juste avec le Stoic, sans forcément se mouiller en terme de caractère et de géométrie. Mais son placement prix, nous rappelle qu’il est franchement bien monté ainsi et qu’à chaque sortie il y a vraiment de quoi s’amuser à son guidon ! Simplicité, sans distinction d’usage, juste pour le plaisir de rouler !
Malheureusement et souvent montés sur les vélos d’entrée de gamme, les freins Sram Guide T prennent aussi place sur ce Canyon Stoic 4. Ce que l’on déplore encore une fois puisqu’ils manquent cruellement de puissance et de confort, pour les débutants comme les pilotes plus expérimentés. Dommage ! Après plusieurs sorties, des craquements se faisaient entendre à chaque coup de pédales. C’est la tige de selle qui bouge dans le tube de selle : la graisse est donc de rigueur ! Certes le montage du porte bidon d’origine est louable, mais j’ai perdu le bidon à plusieurs reprises. Alors méfiance : bidon éjectable !