Texte : Adrien Mantez & Quentin Chevat # Quentin Chevat
Le renouveau espagnol
Orbea nous a convié fin octobre dernier à Finale Ligure pour la présentation de son tout nouveau Rallon. Après trois années d’existence, l’ex-Rallon plus typé Trail/AM qu’Enduro laisse place à une toute nouvelle plateforme sans compromis : le Rallon R4, 160 mm de débattement et roues en 27,5 pouces. Issu d’une étroite collaboration avec Simon André et les pilotes de l’Orbea Méribel Enduro Crew, ce Rallon 2014 va nous réserver de belles surprises des sentiers secs de Finale Ligure aux racines glissantes du Jura…
Sans compromis
Le cadre, en aluminium 7000 Tricone, est annoncé à 2,75 kg sans amortisseur (3,15 kg avec amortisseur en taille M). Les tubes ont subi une cure d’amaigrissement, le tube diagonal (grâce à l’utilisation de la protection contre les impacts) passe de 1,6 mm sur le Rallon R3 à 1,2 mm d’épaisseur sur ce nouveau vélo.
Comme la plupart des marques, Orbea a décidé d’abandonner le format 26 pouces en Enduro au profit du 650B. Pour développer le R4, l’équipe Orbea est repartie d’une feuille quasi blanche. Finie donc la cinématique avec la très compliquée courbe d’amortissement « Lamba Curve » de l’ex-Rallon; place aujourd’hui à une cinématique plus classique (avec une courbe la plus simple possible, linéaire puis progressive) qui repose en grande partie sur la gestion hydraulique de l’amortisseur.
Pour ce faire, Orbea a fait confiance à BOS pour développer des settings de suspensions parfaitement adaptés au nouveau Rallon. L’objectif étant (grâce à une grande plage de réglages) de faire fonctionner la suspension plus haut et de récupérer plus rapidement le débattement. Au passage, le Rallon R4 gagne 1 cm de débattement pour offrir maintenant 160 mm de débattement à l’arrière comme à l’avant.
De la même façon que sur l’Occam, le Rallon R4 adopte un pivot concentrique C9/12 sur l’axe de roue arrière. En plus d’avoir l’avantage de dissocier les forces de freinage du fonctionnement de la suspension, ce dispositif permet le meilleur compromis entre rigidité/encombrement/légèreté.
Côté géométrie, Orbea n’y a pas été avec des pincettes ! Le Rallon R4 s’allonge de l’avant (+11 mm de top tube effectif, +25 mm pour le top tube projeté), se dote de bases ultra courtes en 420 mm et possède aussi une géométrie ajustable (par une simple rotation de la fixation frontale de l’amorto) qui permet de jouer sur l’angle de chasse (de 66° à 66.5°), l’angle de tube de selle et la hauteur du boîtier (de bas à très très bas…).
Le Rallon R4 est disponible en quatre versions (voir présentation) allant de 2499 euros à 6499 euros. Pour ce test, nous avons essayé la version XTEAM (4 999 euros – 13,7 kg). Notre vélo est équipé d’une fourche BOS Deville 160 mm et de l’amortisseur BOS Kirk. Niveau transmission, on est en présence d’un groupe 2×10 vitesses mêlant pédalier Race Face SIXC carbone et dérailleurs Shimano XTR Trail. Les trains roulants sont confiés à Mavic avec son récent ensemble Crossmax Enduro roues/pneus. Le poste de pilotage est équipé par Race Face avec un énorme cintre carbone en 780 mm et une potence de 50 mm (sur les tailles S et M) qui donnent le ton « engagé » de la bête.
On retrouve au guidon des freins Formula T1 et une commande qui nous mène à la tige de selle Reverb Stealth. A noter que seule la gaine de la Reverb est intégrée, Orbea a fait le choix de garder les passages de gaines en externe afin de faciliter l’entretien. Les plots ISCG permettent de monter un anti-déraillement.
Place maintenant au roulage !
De Finale Ligure au Jura
Notre Rallon XTEAM aura vu du pays… On a eu l’occasion de le tester sur les spéciales de l’Enduro World Series de Finale Ligure, sur les superbes singles des environs de Peillon à l’occasion de la présentation Michelin, pour finir enfin sur les sentiers calcaire et truffés de racines glissantes du Jura.
En selle, d’entrée de jeu on se sent bien, la potence courte et le cintre en 780 mm nous mettent tout de suite à l’aise. La présence de l’ingénieur BOS sur place lors de la présentation nous a permis d’optimiser à plusieurs reprises nos réglages de suspensions au fur et à mesure des spéciales.
Au premier tour de roue, on sent bien que c’est un vélo rigide qui ne rechigne pas à pédaler. C’est une agréable surprise de découvrir que malgré sa géométrie très agressive (66° d’angle de chasse), ce vélo a de bonnes aptitudes à pédaler. Les deux positions possibles de l’amortisseur BOS Kirk permettent de s’adapter facilement et en 1 minute à la nature du terrain. Sur la position la « moins » basse, le Rallon offre la configuration la plus efficace au pédalage. A la longue et après avoir beaucoup roulé en position « très basse », on s’aperçoit que le vélo est suffisamment efficace en relance d’autant qu’il est bien aidé par le mode ferme du Kirk (ajustable grâce au levier sur l’amortisseur). Dans cette position, on sent la suspension travailler légèrement ce qui permet de garder du grip lorsque le terrain est cassant tout en gardant une certaine fermeté pour les portions plus roulantes. BOS a su trouver le juste milieu entre ouvert et fermé et ce n’est pas pour nous déplaire…
Une fois arrivé au sommet en navette ou à la force des mollets, il est temps de passer à l’attaque ! Dès les premiers hectomètres de caillasses, le Rallon nous met la banane. Le vélo est à la fois agile et hyper sécurisant. Avec son boîtier au plus bas, on a la sensation d’être dans le vélo et que rien ne peut nous arrêter ! Ou pas…
Plus on lache les freins, plus le vélo en redemande. On a vraiment la sensation que notre bête se bonifie avec la vitesse. Lorsque le terrain devient cassant, les roues de 27.5 permettent de gommer les petites erreurs de trajectoire. Les pneumatiques Michelin Wild Rock R2 montés spécialement pour le test, se sont révélés démoniaques dans le technique. Dès que ça se ressert, le vélo est très maniable. Ses bases courtes en font le roi du manual.
C’est impressionnant, les suspensions BOS fonctionnent en parfaite harmonie. On reste toujours assez haut dans le débattement tout en ayant un maximum de confort. Si l’on est pas habitué, le « bruit » du fonctionnement de l’hydraulique est un peu déstabilisant.
Dans le terrain gras et avec le montage d’un garde-boue, on a eu quelques soucis de blocage de la roue avant par manque d’espace entre le pneu et l’arceau de la fourche. Attention donc à ne pas monter des pneus de section supérieure à 2.4.
Niveau transmission, nous n’avons eu aucun souci de fonctionnement ni de saut de chaîne à déplorer. Preuve que la monte choisie par Orbea est bonne. Le dérailleur arrière XTR Shadow + est super efficace ce qui rend le vélo silencieux, à se demander si on se traînerait pas un peu !
Enduro et mini DH à la fois
En définitive, cet Orbea Rallon XTEAM est taillé pour l’Enduro pur et dur, où ça monte et ça descend. C’est un bon randonneur qui ne rechignera pas à quelques excursions très engagées sur pistes de DH ou bike-park. malgré son débattement de « seulement » 160 mm, le Rallon R4 vous offre le confort et la sécurité d’un mini DH. A noter enfin, quelque soit le niveau de gamme sélectionné, vous aurez la possibilité de choisir entre les deux coloris disponibles du Rallon (jaune fluo/noir ou noir/blanc), un peu comme en automobile.
Pour terminer et être tout à fait honnête/complet, il faudrait maintenant tester une version équipée en suspensions Fox (probablement le cœur du marché..) pour voir si le Rallon R4 est aussi réussi que notre Rallon XTEAM…