Val di Sole, DH – 2023 I À quoi ça s’est joué ?! Courbes habituelles + bonus !

Quelles courses ! Certes, Val di Sole ne déçoit jamais… Mais une fois de plus, il y a eu de l’action du suspens et des émotions à suivre cette troisième manche de la Coupe du Monde de Descente 2023. À tel point qu’on y mettrait bien encore quelques éléments de récit pour ne pas laisser filer trop vite cette étape avant la prochaine, fin août en Andorre. Analyse Entre les Chiffres, sur FullAttack, pour compléter le tableau !

Potentiel et accomplissement…

Je parle de ces deux notions pour résumer la course féminine parce qu’elles sont liées… Liées dans la progression d’une carrière d’une athlète, et liées en piste ce samedi à Val di Sole parce que Gracey Hemstreet en est à afficher son potentiel, et Vali Höll à l’accomplir. Et c’est d’autant plus intéressant que jusqu’à il y a peu, l’accomplissement n’était pas forcément encore au rendez-vous pour la pilote RockShox/Trek… Mais ça y est ! Ce bloc de compétition du début de saison 2023, qui s’enchaîne avec la fin de saison 2022, en a le sens, comme ça a été dit dans le Débrief, sur FullAttack.

Première observation, et non des moindres, pour étayer ça : la courbe de Vali Holl occupe les devants de la scène de bout en bout. Personne, de près ou de loin, ne vient prendre la tête ne serait-ce qu’un instant, pour faire douter sur la domination de la Championne du Monde en titre. Domination totale pour autant ? Pas tout à fait. Certes, les autres courbes plongent toutes, sans exception jusqu’à la fin du troisième secteur. Mais ensuite, certaines remontent sur les deux derniers. C’est donc signe que l’Autrichienne ne signe pas le temps parfait ce week-end, en final.

Il aurait fallu, pour ça, égaler Gracey Hemstreet dans les secteurs 4 & 5. Et dans ce cas, le chrono de référence aurait été établi en 4 minutes 4 secondes et 169 millièmes. Le temps du jour, pour la gagne, est 3 secondes et 271 millièmes plus lent. Le prix de la gestion, de la prudence, de l’expérience, quand on voit que Gracey Hemstreet, avant de finir en trombe, abandonne 6,5 secondes dans le secteur 3 suite à sa chute. C’est en tout cas la deuxième observation intéressante de ce graphique. La jeune Canadienne – première année élite – montre des signes qui ne trompent pas. La vitesse et l’engagement sont là. La gestion et la finition doivent encore se perfectionner, mais quand elles seront au rendez-vous, ça pourrait faire mouche.

Du moins, ici, ça serait très certainement venu faire au moins jeu égal avec Camille Balanche, le métronome. Elle aussi se permet de reprendre du temps dans le quatrième secteur, soit la partie difficile du bas de parcours. C’est d’ailleurs ce qui la met à l’abri des autres, et lui évite de se retrouver dans le mouchoir de poche que Jess Blewitt, Marine Cabirou et Nina Hoffmann forment sur la ligne d’arrivée. Elles se tiennent en une demi-seconde alors qu’elles ont compté jusqu’à une seconde et demie d’écart plus tôt, en course. C’est dû au deuxième secteur prudent de la Française, avant qu’elle ne se rattrape dans le fameux quatrième. Sans quoi, sa courbe serait venue se superposer sur celles de Nina Hoffmann & Jess Blewitt, qui signent deux runs très, très proches !

Entre les gouttes…

Il y a à dire chez les garçons ! D’abord, en présentant un graphique différent de d’habitude. Celui-ci reprend les temps signés par chaque pilote de la finale, dans leur ordre de passage. Greg Williamson – premier à s’élancer – à gauche, Loris Vergier – dernier à partir – à droite. L’idée, étant d’illustrer l’impact de la pluie tombée un temps, pendant la finale. De source sûre, on l’a vu s’abattre sur la piste dès le premier passage, puis s’arrêter au moment de voir Baptiste Pierron s’élancer. Mais avec le temps que l’eau fasse son effet en piste, puis que cette dernière sèche, il y a une certaine inertie qu’il nous faut préciser.

Ce graphique permet d’en avoir une idée plus précise. Pour ce faire, outre chaque barre qui représente le temps du pilote, il fait usage d’une courbe de régression polynomiale. Par définition, il s’agit de déterminer de quelle manière un ensemble de données aléatoires – le passage des pilotes – varie sous l’effet d’un facteur extérieur – l’apparition de la pluie. Si cette courbe avait été plate, ou en zigzag d’apparence aléatoire, on aurait conclu à aucune influence de la pluie nulle. Mais ici, quel que soit le degré de définition choisi pour établir la courbe – on lisse plus ou moins – une constante revient sans cesse : la forme en cloche, au milieu de la finale – entre les 4e/5e pilotes à s’élancer (Rémy Thirion & Mattéo Iniguez) et les 10/12 derniers. Elle représente l’influence de la pluie. Si l’on en croit la courbe, la prestation de Loïc Bruni est à la hauteur de l’impression qu’elle donne. Malgré son plateau en vrac, le pilote Specialized Gravity a signé une grosse prestation, et ça s’est vu ! Quoi qu’il en soit, la courbe présentée ici confirme aussi les propos de Chris Killumray dans le Débrief FullAttack : au plus fort de son influence, cet épisode pluvieux a une influence qui peut se chiffrer autour des 10 secondes de pénalité. À ce petit jeu, Baptiste Pierron – 11e à s’élancer – et Thomas Estaque – 16e à partir – peuvent être fiers de leur prestation. On voit déjà sur ce graphique que malgré la pluie, ils se distinguent clairement. Sans ce handicap, on peut aisément placer leurs chronos dans le top 10, voir dans le coup pour le podium…

Quoi qu’il en soit, les dix derniers pilotes, les dix meilleurs des demi-finales, ont eu une course équitable pour se départager. On s’y intéresse donc pour voir à quoi elle s’est jouée… Sur les erreurs de Thibaut Daprela et Jordan Williams ? Peut-être bien. Le pilote Commençal/Muc-Off est le seul à partager la tête de la course avec Jackson Goldstone, le vainqueur du jour. Sur le premier secteur, logiquement, puisque le pilote du Santa Cruz Syndicate a commencé par se mettre une chaleur dès le premier virage. Mais aussi plus tard, à l’issue du troisième secteur, secteur clé on l’a vu précédemment. Il faut donc ses erreurs de fin de parcours, dont le passage en draisienne qui en aurait tué plus d’un, pour lui ôter la victoire. Même sentiment de ne pas être passé loin pour Jordan Williams. Ce qui est d’ailleurs intéressant à voir sur tout son début de course, c’est l’allure de sa courbe. Jusqu’à la fin du secteur 4, elle a la même que celle du vainqueur du jour, Jackson Goldstone. Portés par le fait qu’ils roulaient en junior, donc au même endroit et au même moment, ces deux-là ne se lâchaient pas l’an passé, et on venait facilement à dire ça d’eux. Les voilà dans le grand bain, et voilà que ça continue. Eux seuls semblent avoir trouvé un flow et un rythme sur cette piste qui en fait capoter tellement. Sauf que cette fois, Jordan Willliams aussi en est victime. Sa chute, droit dans les filets à la sortie du dernier bois, scelle tout espoir de bien figurer. Alors certes, vu que jusque-là, le Britannique reprenait du temps, on pourrait dire de Jackson Goldstone profite de cette erreur… Mais ce serait oublier que lui-même a fait des cadeaux à ses rivaux, pas plus tard qu’à Leogang quinze jours plus tôt. À lui donc, de récolter les lauriers du jour après un dernier secteur qui fait plonger une nouvelle fois tout le monde. Un dernier secteur qui lui avait été fatal l’an passé – guidon cassé – et qui comme un symbole, un de plus, sécurise cette fois la première victoire en Coupe du Monde Élite de la pépite que tout le monde attendait sur la plus haute marche, à un moment ou à un autre. Ça n’aura que guère traîné !