Fox abat une carte inattendue avec la Podium, sa fourche à conception inversée simple té ! Un format longtemps resté marginal, mais qui refait surface ici avec méthode et ambition. Rigidité frontale, fluidité sous charge, réduction de la masse non suspendue, mise à profit des technologies GRIPX2 et GlideCore… La marque américaine a empilé les bons atouts pour relancer un concept à contre-courant. Reste à savoir où, et pour qui, cette Podium trouvera sa vraie place. Enduro engagé ? VTTAE musclé ? Bike park moderne ? Une chose est sûre : la partie est lancée, et on s’intéresse à ses arguments et sa logique, sur FullAttack…

À contre-courant, mais pas sans raison…
Dans l’histoire du VTT, le concept de fourche inversée revient cycliquement comme une promesse intéressante, mais jamais totalement tenue : plus de sensibilité, plus de précision, mais une rigidité – notamment tortionnelle – pas toujours évidente à maitriser. Plusieurs marques s’y sont essayées – on se souvient de la Marzocchi RAC et de la Manitou Dorado entre autres – sans que le format ne s’impose durablement dans les usages.





Aujourd’hui, C’est Fox qui s’y colle à son tour, avec la Podium. Une initiative qui n’a rien d’anecdotique : elle vient répondre à certaines limites identifiées sur les modèles traditionnels de la marque, et s’appuie sur des briques technologiques que Fox a patiemment affinées ces dernières années. On pense à ce fameux effet de suspensions un peu « collées » pas toujours des plus réactives, que la concurrence ne se prive pas de mettre à l’amande dans certains domaines. Ces derniers temps, l’apparition des nouvelles cartouches GripX et GripX2 ainsi que du GlideCore ont bien tenté de faire progresser le comportement des fourches à jambage bas. Mais FOX s’intéresse aussi au concept de fourche inversée et ses avantages, pour tenter d’aller plus loin…

Une rigidité frontale qui change la donne
Si l’on a longtemps reproché aux fourches inversées leur manque de tenue, Fox s’attaque au problème par un autre angle : renforcer au maximum la rigidité frontale – cette capacité à rester stable sous les gros appuis, lors des freinages appuyés, ou dans les sections rapides et cabossées sans que la roue avant ne donne le sentiment de « passer sous le cadre ».
Sur ce point, la FOX Podium se montre offensive. Elle adopte des tubes supérieurs de 47 mm de diamètre – soit 9 mm de plus que les plongeurs d’une 38 classique – solidarisés par un té massivement surdimensionné, obtenu par design génératif – on en a déjà parlé en commentaires il y a quelques temps, sur FullAttack. Résultat : une rigidité frontale digne d’une Fox 40, le modèle double T de la marque, référence en DH – mais aussi connue pour être la plus rigide du marché…
Cette stabilité renforcée n’est pas un luxe, mais plutôt un prérequis pour les objectifs de la Fox Podium : offrir un châssis plus stable, permettant à la suspension d’avoir un comportement plus réactif, car moins parasité par les déformations de l’ensemble. L’idée est donc, ici, d’opter pour un concept qui ait des chances de mieux faire passer les sollicitations, les mouvements, l’énergie aux éléments de suspension qui doivent en faire leur affaire…

Rigidité torsionnelle : un défi propre aux fourches inversées…
On l’a dit plus haut, l’un des points faibles historiquement associés aux fourches inversées, c’est la rigidité torsionnelle. En l’absence d’une arche intermédiaire reliant les deux bras, comme c’est le cas sur une fourche traditionnelle, la précision de la direction devient un défi. Pour compenser cette absence structurelle, Fox a dû construire cette rigidité ailleurs…
En haut, c’est le té surdimensionné, sculpté via conception générative, qui doit se charger d’éviter les torsions. Contrairement à ce qu’on pourrait imaginer à la vue de la pièce massive, il ne s’agit pas d’un ensemble monobloc avec le pivot, mais bien de deux pièces serties, comme c’est habituellement le cas.
En bas, finalement, c’est là que le gros du travail doit s’effectuer. Fox opte pour un axe Boost DH de 20×110 mm en acier, plus robuste qu’un axe classique de 15 mm en alu, typique des fourches simple té habituelles. Reste à savoir si cette solution suffit à rendre la FOX Podium cohérente en matière de précision/raideur, et pour quel rendu sur le terrain. À Ce propos et à ce stade, FOX précise simplement qu’en optant pour cette conception inversée, c’est à un autre équilibre globale que la marque s’attelle. Cet axe surdimensionné, la rigidité frontale en hausse et d’autres points qui restent à voir, veulent en attester…

Une distance entre les bagues de guidage pensée pour encaisser…
Autre bénéfice structurel permis par le format inversé : la distance entre les bagues de guidage, c’est-à-dire l’écartement entre la bague supérieure et la bague inférieure, est plus importante grâce à ce que les encombrement de la FOX Podium permettent. Ici, cet intervalle atteint 175 mm – un recouvrement massif, supérieur de 32 % à celui d’une Fox 38, et même 7% au-dessus d’une Fox 40 pourtant taillée pour la descente.
Pour ceux que l’intérêt de cette distance intrigue, il est en lien avec le phénomène d’arc-boutement. Il s’agit du phénomène de blocage de deux pièces en mouvement de glissement l’une par rapport à l’autre, lorsque les ajustements entre pièces créent des conditions de blocage par frottement. Un des paramètres prépondérants entrant en compte dans ce phénomène étant l’écartement des points d’appui, il est communément reconnu que plus la distance est grande, plus le phénomène est restreint et donc, plus le glissement est favorisé.

Quand la distance entre bague de guidage d’interface et axe de roue peut faire la différence…
Dans le fonctionnement d’une fourche, la distance entre la bague de guidage d’interface – celle située au plus près de la « sortie des jambages » – et l’axe de roue joue un rôle clé dans la manière dont le châssis se comporte. Sur une fourche traditionnelle, cette distance reste constante : la bague et l’axe étant solidaires du même jambage, quand la fourche s’enfonce, le bras de levier sur cette interface reste le même, voir s’intensifie si l’enfoncement est logiquement produit par une forte sollicitation.
À l’inverse, sur une conception inversée comme celle de la Podium, cette distance se réduit à mesure que la fourche travaille, l’axe se rapprochant naturellement du coussinet.
Ce changement de dynamique permet de réduire l’effet de levier de flexion, limitant ainsi les déformations parasites et la friction là où la contrainte est la plus forte. Résultat espéré : une suspension qui reste plus fluide et plus homogène, même lorsque le terrain se dégrade.
Fox n’hésite donc pas à relayer le propos de ses pilotes qui retournent que « plus je la pousse fort, plus elle est fluide » : ce ressenti provient en grande partie de cette géométrie variable, rendue possible uniquement par la conception inversée. On commence donc à se figurer le rendu que cette FOX Podium doit pouvoir procurer sur le terrain…

Moins de masse non suspendue, plus de réactivité ?!
Autre levier d’amélioration que FOX considère intéressant via l’architecture inversée : la réduction de la masse non suspendue. On parle ici de tout ce qui se trouve sous le ressort et l’amortisseur – typiquement, la roue, le pneu, l’étrier de frein, le disque, mais aussi les jambages d’une fourche classique.
Sur la FOX Podium, la logique s’inverse : les tubes les plus lourds – les fourreaux qui reçoivent les plongeurs – sont désormais positionnés en haut, et deviennent une masse suspendue. Résultat ? Moins d’inertie à chaque impact, moins d’énergie nécessaire pour que la suspension bouge… et donc plus de réactivité recherchée.
Ce gain doit se ressentir autant en compression qu’en détente, dans les petits chocs comme dans les enchaînements rapides… Pour aller au bout de la logique, Fox a opté pour des protections de plongeurs en fibre de carbone sur cette version Factory : de quoi préserver les performances sans alourdir ce qui doit rester le plus léger possible…

Une lubrification par gravité, aussi simple qu’efficace ?
La FOX Podium ne fait pas que s’aventurer vers un autre concept de mécanique structurelle, elle tire aussi parti de sa géométrie inversée pour optimiser des aspects plus discrets, mais tout aussi déterminants – à commencer par la lubrification des joints. Sur une fourche traditionnelle, l’huile de lubrification des jambages remonte uniquement par éclaboussures lorsque la suspension travaille – à moins de stocker, par moments, sa fourche tête en bas… Ici, c’est la gravité elle-même qui s’en charge : l’huile est naturellement attirée vers le bas, directement contre les joints, garantissant une lubrification constante sans dépendre du seul mouvement.
À cela s’ajoute un effet secondaire bienvenu : les saletés et micro-débris, eux aussi, tendent à migrer vers le bas – loin des zones sensibles. Résultat, les risques de contamination sont réduits, et les joints spy fonctionnent dans des conditions plus propres et plus constantes. C’est à la fois plus fluide à l’usage, et plus durable dans le temps.

GRIP X2 : la cartouche qui donne tout son sens à la Podium ?!
Quelque part, on l’a noté jusqi’ic, l’architecture inversée de la FOX Podium a pour intention d’apporter quelque chose de différent en matière de dynamisme et de sensibilité. Quid du maintien dans tout ça ?! C’est là qu’entre en jeu la cartouche GRIPX2, fer de lance Fox depuis un peu plus d’un an officiellement. Avant ça, Fox n’aurait pû apporter du maintien sans grêver la raideur contenue de sa suspension. Mais on sait que c’est le principal apport de cette cartouche GripX2, son apport vient donc en corrélation avec le développement de la FOX Podium. La version utilisée ici est néanmoins spécifiquement ajustée pour la Podium.
L’idée ? Adapter l’amortissement au comportement très particulier de la fourche : plus rigide, plus fluide, avec une friction de châssis plus faible, et une masse non suspendue réduite. Pour cela, Fox a opté pour un amortissement en compression renforcé, afin de conserver du maintien malgré l’extrême sensibilité de la fourche. À l’inverse, la détente a été légèrement libérée, pour permettre à la roue de suivre plus naturellement le terrain – un choix cohérent avec le poids réduit des éléments mobiles mais qui peut aussi accompagner la fourche à se tenir plus haute en dynamique…

GlideCore : pour préserver la fluidité sous contrainte…
Parmi les innovations récentes chez Fox, le ressort pneumatique GlideCore s’impose aussi comme une pièce du puzzle Podium. Ce système a été pensé pour répondre à une problématique bien réelle : la déformation interne que subit le ressort pneumatique lorsque la fourche est soumise à de fortes charges de flexion dynamiques – comme lors d’un impact latéral sur une racine ou un caillou à haute vitesse. Dans ces cas-là, la tige du ressort peut se décaler et engendrer des frottements parasites du piston, qui nuisent à la fluidité.
La solution ? On l’a déjà vu il y a peu sur FullAttack. Le GlideCore introduit un degré de liberté latéral, qui permet au ressort de accompagner les mouvements de la fourche au lieu de les contrer. S’y ajoute undegré de liberté axial : le système peut légèrement se comprimer sur lui-même avant que le ressort principal ne prenne le relais, absorbant les micro-chocs dès la mise en charge.
Bref, sans GlideCore, le comportement fluide et constant que vise la FOX Podium serait vite mis en défaut…

Une Fox à part, pour un usage qui reste à définir
Avec la Podium, Fox franchit un cap. En s’engageant sur le terrain des fourches inversées, la marque ne se contente pas d’explorer une piste déjà connue – elle la remet sur le devant de la scène avec des arguments techniques et des choix assumés, le tout dans une cohérence d’approche qui est séduisante, sur le papier. Mais le concept n’est pas nouveau : certaines des meilleures fourches de Coupe du Monde y ont déjà eu recours, les BOS de Nicolas Vouilloz et Anne-Caroline Chausson en tête. Mais jusqu’ici, aucun acteur majeur comme Fox ne s’y était sérieusement replongé dans une optique produit aussi structurée sur le format simple té.




Avec ses 170 ou 160 mm de débattement, ses roues en 29 pouces, son ressort FLOAT EVOL, son axe flottant de 20×110 mm, la Podium affiche un positionnement qui reste à définir. À 2695 g sur la balance et près de 2 860 € au tarif public, elle joue dans tous les cas un registre à part. Reste à savoir lequel ! Enduro ? VTTAE ? Bike park ? La Fox Podium arrive fin juin 2025 en magasin. Les opportunités de roulage doivent désormais nous dire si ce choix audacieux de format et de technologie a un effet stimulant sur le marché, ou s’il s’affirme comme une alternative intéressante. Dans tous les cas, Fox a joué une carte forte – voyons l’effet qu’elle a sur le jeu…