Ce jeudi 7 mai, c’est à travers une communication de son Comité Social d’Entreprise et de son intersyndicale que l’on apprend de Mavic, depuis le 2 mai, sa mise sous régime de redressement judiciaire. Une mesure qui vise à préserver cette marque au fort potentiel. Les détails qui filtrent à cette occasion apportent d’ailleurs un éclairage nouveau aux errements pressentis ces derniers temps…
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Mesure de redressement
Dans l’esprit collectif, une procédure judiciaire n’est jamais bonne dans la vie d’une entreprise. Il y a quelque chose d’anxiogène dans ces informations, à tort ou à raison. Dans le cas de Mavic, la lumière sur les faits est néanmoins intéressante.
En premier lieu, pour préciser qu’il s’agit, pour le tribunal de commerce de Grenoble, d’observer le fonctionnement de l’entreprise durant les six prochains mois. Le temps pour l’instance de prendre connaissance de tous les éléments permettant d’apprécier sa situation économique et sociale.
C’est à l’issue de cette période qu’un jugement sera exprimé, permettant de saisir clairement les tenants et aboutissants de l’activité économique de ce joyau industriel annécien. Soit pour la mise en place d’un plan de redressement si l’entreprise est viable, soit à une liquidation, dans le pire des cas.
Qui détient Mavic ?!
Pour Mavic, la procédure a au moins le mérite de pousser à faire la lumière sur la situation actuelle de l’entreprise. Car pour l’heure, c’était surtout un flou artistique qui entourait la marque, au départ de l’affaire intégrée au groupe Salomon. Depuis plusieurs années, ce dernier appartient à Amer Sports, un groupe Finlandais disposant également de Enve, Suunto, Atomic et Wilson notamment.
Fin 2018, Amer Sports faisait savoir son souhait de vendre ses marques de cyclisme au plus offrant. En décembre de la même année, Amer Sports annonçait avoir été acquise par un consortium chinois dirigé par Anta Sports. On apprenait par la suite que Amer Sports avait sorti Mavic de ses comptes pour cette même année, et aurait vendue l’enseigne française à Regent, une firme américaine.
En juillet 2019, des représentant du nouveau propriétaire venaient à Annecy pour faire savoir leur intérêt, mais depuis, silence radio traduit par l’absence d’échange et d’investissement. Jusqu’à ce printemps 2020 et la procédure de redressement judiciaire qui permet aux représentants du personnel d’apprendre que « contrairement à ce qui avait été publiquement annoncé, Salomon n’avait pas cédé leur entreprise à Regent LP mais à une société M Sports, basée au Delaware (USA), sans lien capitalistique avec Regent ! »
Errements et potentiel
Un imbroglio qui offre une lumière plus complète sur le paradoxe Mavic de ces dernières années. Pour ce qui nous concerne, la marque est en effet passée d’une position de leadership important dans son domaine d’origine, la roue, à une offre prometteuse dans divers secteurs (roues, vêtements, équipements) sans jamais réellement concrétiser. Un petit quelque chose qui manque à chaque fois pour que le succès soit à la hauteur des attentes de tout ceux à qui la marque parle.
Une situation traduite dans les chiffres par les résultats financiers de l’entreprise. Alors que le catalogue s’est enrichi, le chiffre d’affaires, lui, a diminué : 127 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2015, contre 88 en 2018, tandis que le bénéfice s’est retourné, de 8,7 millions de bénéfice en 2015 contre 9,1 millions de perte trois ans plus tard. Un revirement qui permet néanmoins de mesurer le poids que représente encore Mavic – Manufacture d’Articles Vélocipédiques Idoux et Chanel – marque apparue il y a plus de 130 ans ! Un certain potentiel…
Notamment parce que ces derniers temps, la mondialisation, la re-localisation, les chaines de valeur et la propriété des outils industriels font débat. Mavic, qui partage les locaux avec le groupe Salomon à Annecy, en possède d’autres dans l’Ain, et produisait aux dernières nouvelles également en Roumanie pour une partie de son catalogue. Un outil industriel et un savoir-faire dont on a régulièrement l’occasion de côtoyer et mesurer toute la valeur et le potentiel au sein de la rédaction. Souhaitons simplement que la période d’observation actuelle sache en faire la bonne appréciation, et apporte les solutions au paradoxe du moment !