Sunn Radical – Entre effet « waouh » et âme de descendeur…

Ton cœur balance ?!

Avec son point de pivot haut et son triangle arrière très ramassé, le Sunn Radical attire l’œil autant qu’il intrigue. Mais ce que le terrain nous apprend, c’est qu’en son sein se cache une véritable âme de descendeur. Pourquoi ça ? Comment en tirer parti ? À qui ça se destine et comment ça se positionne versus la concurrence ?! C’est tout l’objet de ce verdict d’essai du Sunn Radical 2025, sur FullAttack !

Sunn Radical Factory

  • Enduro
  • 29 pouces
  • 160/170 mm, Fox 38 & X2 Fact.
  • Full Carbone
  • Reach 485 mm (L) & Offset 44 mm
  • DT Swiss EX1700, 30mm 
  • Michelin Wild MS Racing Line
  • TRP DH-R Evo, 220/203mm
  • 3 modèles, 3 tailles, 4032 à 7032 €
  • 16,7 kg, (L, sans pédales, TL + Préventif)
  • Dispo depuis début 2025

L’effet Wahouh ?! 

Sorti du carton, le Sunn Radical en impose. Oui, il y a cette couleur papaye et ce triangle arrière-hyper ramassé qui attirent forcément l’œil – mais non, ce dont je parle est plus subtil. Le Sunn Radical a une présence de par son gabarit.De celles qui me font douter un instant : « Ce n’est qu’une taille L, ça ? » Oui, et c’est en fait la plus grande proposée au catalogue. Une fois le vélo entre les mains, et surtout une fois dessus, ça se confirme : je sens que ça taille généreux. À mon avis, suffisamment pour loger confortablement un pilote d’1,90/95 cm – selon les morphologies – sans donner l’impression d’être perché sur une boîte d’allumette… Pour autant, les dimensions, sur le papier, restent en accord avec ce que la plupart des tailles L affichent sur le marché : 485mm de reach, ce n’est pas encore un gabarit équivalent à du XL chez la concurrence la plus en pointe sur le sujet… Bref, c’est une taille L qui taille grand. Mais le vrai moment charnière, celui qui déclenche l’effet waouh, arrive dès que les roues tournent, et que la suspension arrière entre en scène. Parce qu’à ce moment-là, c’est plush, mais plush comme rarement. Ça colle au sol en liaison, et ça lit clairement le terrain à ma place. Et ce qui me bluffe, c’est que malgré cette douceur apparente, le vélo conserve un coup de pédale propre, efficace, presque étonnant pour un point de pivot haut. En tout cas, pas de drame au train, ça avance en avalant bien le terrain. Et quand la pente s’inverse, c’est tout aussi bluffant. Si je pousse un peu dans les appuis, il y a un peu de répondant. Surtout, la suspension arrière paraît infinie, ou presque. Du moins, ce n’est pas elle qui limite le Sunn Radical. C’est plutôt le train avant. On y reviendra. En attendant, premier tour de roue, et je comprends déjà que ce vélo joue dans une autre cour. Quelque part, il a des gènes de vélo de Descente… 

D’où ça vient ?

Pas étonnant que j’ai cette première impression, puisque quand je pousse un petit peu mes recherches et mes échanges au sujet du développement de ce vélo, j’apprends qu’à la base, fut un temps, l’intention était de sortir un vélo de descente. Ce n’est donc pas une lubie, mais une réalité. Jusque dans ses développements les plus récents, le Sunn Radical a ça en lui. Après, si l’on revient sur les courbes qui régissent sa cinématique, on trouve quelques confirmations au sujet de ces premières impressions. En matière de sensibilité, on peut forcément lier la trajectoire de la roue arrière, typique du point de pivot haut, et la courbe de ratio ambitieuse de ce Sunn Radical. On en avait parlé en présentant le vélo sur FullAttack, et ça se confirme dans les faits : le ratio de départ à 3,45 fait son effet. Pour ce qui est de l’impression d’infinitude du débattement, il faut ensuite regarder du côté de la progressivité totale de cette courbe : 40%, une des valeurs les plus hautes du marché. CQFD ! Quand on monte sur le Sunn Radical, c’est clairement la traduction de cette courbe de ratio en réalité du terrain, qui saute aux yeux et donne au vélo son caractère singulier… 

Comment ça se règle ?

Jusqu’ici, je n’ai roulé le vélo que sur les réglages de base qui me servent de point de départ, pour me prononcer sur ma première impression : 30% de SAG, détente à mi-plage, compressions ouvertes. Dans cette configuration, il a le tempérament d’un vélo de Descente. À privilégier pour la station et les Bike-Park. Mais en Enduro sur sentiers plus étroits et sinueux, j’ai noté un peu d’embonpoint sur les sections les plus planes, quelques mouvements d’assiette parasites, et un train avant à la peine versus la confortable prestation arrière…

Pour le reste, se dessine une certaine tendance. Concernant le décalage de sensibilité/confort entre l’avant et l’arrière, j’ai validé une observation utile tout au long de cet essai : j’ai systématiquement eu des résultats plus satisfaisants en roulant 5psi de moins que d’habitude dans la fourche. Dans mon cas, avec un SAG de 51mm contre 48mm habituellement. Gardez ça à l’esprit 😉 Pour ce qui est du dynamisme vertical, c’est en jouant finement des détentes hautes et basses vitesses – en fonction des circonstances où se manifestent les besoins – que ça se joue. Tandis que pour peaufiner versus les mouvements d’assiette, les compressions basses vitesses font le job, sachant qu’il faut veiller à toujours utiliser la configuration la moins chargée possible pour ne pas bouffer toute la marge procurée à la base par le point de pivot haut…

AvantArrière
SAG30 à 32%27 à 30%
Détentesmi-plage à 2/3 ouvertesmi-plage à 2/3 ouvertes
Compressionsouvertes à 1/4 ferméesouvertes à 1/4 fermées
Réducteurs de volumed’origined’origine

Pour un gabarit moyen de 75/80kg. Clics de détente et compression comptés depuis la position la plus vissée des molettes. SAG arrière réalisé assis/selle haute – SAG avant réalisé debout/bras en appui sur le cintre / épaules à l’aplomb du guidon. Voir notre vidéo explicative > https://fullattack.cc/comment-faire-les-sag-la-methode-et-les-conseils-fullattack/

Comment ça se pilote ?

L’âme d’un descendeur, le Sunn Radical l’a donc en lui. Ce serait dommage de le renier. En tirer pleinement parti, le laisser purement s’exprimer, ça consiste donc à trouver les situations dans lesquelles ce tempérament s’exprime le mieux, et savoir qu’en faire le reste du temps… 


À la pédale…

La giclette, au début, je la sens. Pas celle d’un XC affûté, évidemment, mais il y a un petit quelque chose, une réactivité sur le premier quart de tour qui intrigue. Et puis… Plus rien. Ou presque. Deuxième, troisième, quatrième coup de pédale : l’élan s’essouffle. Pas de relance explosive, pas de coup de reins qui change la donne. À la pédale, c’est un vélo qui aime qu’on l’installe dans un tempo et qu’on le laisse filer. Il roule au train avec une belle assise – le tube de selle parmi les plus redressés du marché est un régal – une bonne inertie, un genre de fluidité qui pousse à lisser le terrain et son pilotage. Mais dès que je cherche à relancer, à changer de rythme ou à sortir d’un virage en mettant du jus… Des watts se dissipent clairement dans le vide. Et ça, pour tous ceux qui jouent la course, en coupe de France d’Enduro notamment, où il faut souvent pédaler à la moindre occasion, ça peut devenir une vraie question. Parce que même si le Radical permet de rouler quand le sol est un chantier — là, oui, il brille — dans les sections plus roulantes ou punchy, le Sunn Radical est plus en difficulté. Pas un vélo de sprinteur, clairement. Il me fait plutôt penser à un vélo de Descente en la matière : mieux vaut emmener de la vitesse et savoir la conserver, que devoir lui en redonner en permanence. Le Radical n’est pas là pour ça.

En l’air

À l’impulsion, tout dépend évidemment des réglages, mais si je reste dans l’optique de tirer parti du point de pivot haut — avec un setting qui le laisse bosser correctement — alors le Radical me surprend par son équilibre. Dans les appels, il est stable, rassurant, presque posé. À l’arrière, il absorbe un peu le kick en sortie d’appel, là où d’autres se font secouer. C’est clairement un des bénéfices du point de pivot haut dans les pratiques gravity : il adoucit les arêtes vives, lisse les mauvaises compressions, et permet de garder le cap sans se crisper.

En l’air, le vélo garde la ligne. Il n’y a pas de mouvement parasite, pas de roulis bizarre ou de tangage imprévu. C’est stable, solide, comme porté par une certaine inertie qui rassure plus qu’elle ne pénalise. Et à la réception, c’est là que la cinématique fait des merveilles. Peu importe si ça tombe à plat, si le terrain est éclaté ou si la prise de vitesse était un peu optimiste : le Sunn Radical encaisse. Je peux me permettre des tirs bien gras sans me soucier de la suite. Le châssis ne bronche pas, la suspension absorbe ce qu’il faut, et on reste dans le coup pour la suite… 

En courbe

Dans les grandes courbes à plat, un peu défoncées, où il faut engager l’angle et jouer finement avec la limite des crampons, le Radical est dans son élément. Il garde le cap, se cale bien sur l’angle, et donne ce sentiment de lisser les imperfections du terrain sans jamais perdre en précision. Un vrai régal à piloter à l’instinct, en laissant faire le grip. Mais dans les virages plus serrés, qui tournent bien, l’histoire change un peu. Ce n’est pas son gabarit qui gêne – il se manie plutôt bien pour sa taille – c’est plus une question de dynamisme. Il y a une petite vivacité au boîtier, ça oui, mais elle ne se transforme pas vraiment en élan. Pas de coup de reins naturel, pas de propulsion évidente en sortie de courbe. Il faut tourner propre, rouler rond, et accepter que ça ne renvoie pas comme d’autres. Ce n’est pas le vélo d’enduro le plus vif quand il s’agit de découper les virages à la pédale ou au physique. Il préfère les grandes lignes et les trajectoires fluides aux enchaînements nerveux. Là aussi, vous reconnaissez le tempérament d’un vélo de Descente qui se tapit dans l’ombre ?! Bien vu ! 

Pumper ?!

Il y a une certaine dynamique au boîtier, c’est indéniable. Un petit mouvement d’assiette qui donne l’impression que le vélo veut aller de l’avant. Ça met en confiance, ça incite à jouer un peu avec le terrain… Mais ça reste plus une intention qu’un vrai moteur. Sur des spéciales en faux plat descendant, c’est moins évident. Le Radical roule au train, un train de sénateur dans ce cas. Et les petites aspérités du terrain, qui normalement permettent de faire monter la vitesse avec un bon coup de bassin, ne donnent ici pas grand-chose.

C’est là que le tempérament DH reprend le dessus. Le vélo filtre tellement le relief que les petits appuis utiles pour pumper passent à la trappe. Il faut des mouvements marqués, des compressions bien franches pour que ça réponde. Sur les gros appuis, oui, on peut générer de la vitesse. Mais sur les microvariations du terrain, non. Le Radical préfère encaisser que relancer. Encore une fois, il se comporte plus comme un descendeur pur jus que comme un enduro joueur.

Quand ça brasse ?! 

C’est dans le défoncé que le Radical montre son vrai visage. La sensibilité de la suspension arrière est dingue. Là, le point de pivot haut prend tout son sens, et apporte exactement ce qu’on attend de lui : du confort, de l’effacement, une capacité à lisser le terrain comme peu savent le faire. Ça roule sur des tapis d’aiguilles là où d’autres tapent à chaque pierre. L’amortissement, lui, joue son rôle à fond. Ça absorbe, ça enroule, ça évite que les pieds et les mains ne fassent caisse de résonance.

Mais attention, faut pas croire non plus qu’il efface tout sans discernement. Les racines en travers, les cailloux saillants, il faut quand même les lire. Ce n’est pas non plus un tapis volant. Il filtre beaucoup, très bien, mais pas à l’aveugle. Il reste un vélo à piloter. Et c’est ça qui me plaît : dans le cassant, il faut le faire rouler, mais une fois lancé, il sait faire. Il supprime du relief, il gomme une partie de la carte. Et au guidon, c’est simple : je me régale.

Dans la pente ?! 

Là encore, le Radical tient ses promesses. Dans les passages raides, au freinage, quand ça penche et que ça frotte, il garde une assiette agréablement stable. Très peu de mouvement parasite, très peu de transfert de masse vers l’avant. La suspension arrière reste active, libre, sans jamais se figer. Le vélo s’assoit si je le pousse à le faire, mais il ne s’effondre pas de lui-même. Il garde de la tenue, tout en laissant la possibilité de le charger pour le plaquer dans le terrain. Une marge intéressante que tous ne procurent pas de telle sorte. Le grip reste présent, constant, sur les deux roues, et c’est ce qui me frappe : ce sentiment qu’il reste posé, équilibré, même quand la pente devient sérieuse. C’est là que son ADN de vélo de descente ressort. Il en a clairement l’âme. La stabilité, le comportement au freinage, le confort en bas de pente… Tout y est. Au point que je me surprends à regretter un tube de selle un peu long, dicté par des besoins de pédalage de ce vélo d’Enduro, mais qui bride légèrement la liberté de mouvement dans les grosses pentes. Parce que sous le vernis d’un enduro, il y a un vrai petit DH qui sommeille au sein du Sunn Radical.

Pour qui ? Pour quoi faire ?

La Concurrence ?

Lapierre Spicy
Santa Cruz Megatower
Cannondale Jekyll
Forbidden Dreadnought

Le Sunn Radical, c’est le vélo qui me donne la confiance d’un vélo de descente, avec l’efficacité d’un enduro bien né pour rouler du gros. Parce qu’il gomme le terrain sans m’endormir, et me permet d’attaquer là où d’autres reculent. Et parce qu’il me donne envie de rouler vite, loin, longtemps — sans jamais me demander s’il va suivre.

Rédac'Chef Adjoint
  1. Interressant ce retour. Dommage pour ce manque de dynamisme car on aurait pu penser au retour d une bête de course mais enduro ou la relance est primordiale.
    Tu semble décrire le comportement d un vélo monté ressort, un peu comme le Marin Alpine ?

  2. Je n’arriverais jamais à comprendre comment vous arrivez à rouler avec des fourches gonflées à 30% de SAG ou plus.
    Même avec des vélos souple derrière qui ne poussent pas sur la roue avant, 25% c’est déjà très souple sur une fourche si on veut un minimum de maintiens …

    1. Tout à fait d’accord avec ce constat. C’est quasi le double du sag avec lequel je roule (pourtant je suis seulement à +6psi des recommandations fox et j’utilise la même procédure de mesure du sag que celle présentée dans vos vidéos.
      Je serai intéressé de connaitre votre pression d’air vs celle préconisée par fox pour votre poids si cela est possible ?
      Sinon tjrs un réel plaisir de lire vos articles hyper détaillés, je ne connais pas de concurrents même dans la presse anglos-saxone

      1. Ah les SAG de fourche, vaste débat. Pour illustrer : RockShox a justifié l’arrêt des graduations des plongeurs en partie pour ça. Arguant que c’est plus précis/sain de raisonner en pression. Problème pour nous ici : si je donne mes pressions, c’est pas très universel comme message. Raison pour laquelle à la base, raisonner en % parait plus logique. Après, outre le fait de respecter ce qu’on indique dans la vidéo tuto, ça dépend aussi du gabarit du pilote et de comment il s’appuie sur le cintre. Pour ma part : 1m82, 81cm d’entrejambe (buste plutôt long) 80kg, appui assez franc sur le cintre (épaules vraiment à l’aplomb de la potence, bras qui presse le guidon). Pour 51mm de SAG, je suis à 85Psi. C’est bien 10Psi sous la préconisation FOX… Et ce depuis un très long moment (de mémoire, plus de 5 ans au moins que c’est le cas pour avoir un déclanchement concurrentiel). Reste à voir si ça peut évoluer avec les dernières fourches sorties il y a peu. Je devrais bientôt en avoir le coeur net. En attendant, merci pour le retour au sujet du boulot effectué. Très apprécié 😉

      1. Attention à ne pas tout mélanger > La dynamique d’un vélo, c’est généralement plus le SAG arrière qui joue dessus. Pas l’avant. Ici, on n’est pas dans le cas d’un vélo pataud de l’avant et qui plonge au moindre freinage. Ce n’est pas ce que je recherche, je sais identifier ça, et si tel était le cas, je me serai d’abord remis en question, c’est pas ce que j’aurai préconisé de toute façon. L’assiette est bonne, le maintient aussi, et c’est simplement le décalage avant/arrière dû au point de pivot haut qui implique un SAG/ une basse pression un peu généreux devant. Après, une fois ça établi, c’est juste qu’en chargeant le boitier pour relancer ou pumper, ça rend pas quelque chose de très vif. C’est de cette dynamique là dont il est question dans l’article 😉

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