Marine Cabirou, et les suites de son impressionnante chute aux Gets…

Marine Cabirou n’a pas gagné cette année. Pourtant, sa saison restera comme un des faits marquants de l’année 2021. En juin dernier, elle chutait lourdement sur le road gap qui posait tant soucis, même aux meilleurs mondiaux. Abandon, puis difficile convalescence avant de revenir en fin d’été, et signer deux impressionnantes secondes places sur les pistes les plus violentes de la saison…

On pourrait donc croire la pilote Scott sortie d’affaire, mais stupeur ! Les hématomes étaient simplement trop importants pour s’en rendre compte sur les premiers examens : depuis tout ce temps, Marine souffrait en fait d’une rotule fracturée. La nouvelle est tombée la semaine dernière via les réseaux sociaux, on a donc saisi l’occasion pour prendre de ses nouvelles, et lui faire partager son expérience du moment…

FullAttack : Salut Marine, est-ce qu’on peut revenir sur ta chute aux Gets qui a tout déclenché ? Tu t’en souviens en détail, ou c’est le black-out ? Tu te souviens notamment avoir particulièrement tapé le genou, ou ça a tapé comme le reste, en faisant des tonneaux ?

Marine Cabirou : Oui je m’en souviens parfaitement, je suis resté 100% consciente vu que je n’ai pas tapé la tête. Je n’ai même pas eu le temps de faire des tonneaux, j’ai pris un arbre au niveau des jambes à pleine vitesse qui m’a arrêté net ! J’ai de suite eu des très fortes douleurs dans les deux jambes, la jambe droite et le genou gauche, tellement fortes que ça m’a tétanisé tous les muscles et j’étais incapable de me relever et de tenir sur mes jambes ! Ça d’ailleurs pendant presque une semaine, je ne pouvais même pas me lever d’une chaise toute seule, je vous laisse imaginer le reste… :sueur_et_sourire: J’ai eu l’impression de devoir réapprendre à marcher et ça, ça met un coup au moral !

FA : Rapidement, dans l’été, on a bien vu en te suivant que les suites de la chute t’ont posé soucis. Au point de revenir sur le circuit à Maribor en ayant très peu pu t’entrainer non ? À ce moment là quand même, il y avait des améliorations qui t’ont convaincu de revenir en compétition, lesquelles ?

Marine Cabirou : Oui en effet jusqu’à Maribor je n’ai rien pu faire, uniquement des soins. J’ai marché pendant 3 semaines en béquille, jusqu’à enfin pouvoir commencer la rééducation et les petits exercices chez le kiné !

J’ai repris à Maribor tout en sachant que ça allait être très compliqué pour moi et que mes capacités physiques étaient encore fortement limitées. Ma principale et unique motivation, c’était le championnat du monde quelques semaines après. Je préférais reprendre sur une piste « facile » au lieu de me jeter directement dans une piste comme Val Di Sole… En gros si je voulais avoir une petite chance à Val Di Sole, je n’avais pas d’autre solutions que de reprendre à Maribor, même si tous le staff médical n’était pas forcément pour ! Il ne fallait surtout pas que je retombe dessus.

J’ai juste décidé de rouler sans objectif, juste arrivé à faire du vélo. Je tiens d’ailleurs à remercier mon team, ma famille et mes sponsors qui ont été incroyables pendant cette période. Ils savaient tous que j’étais loin d’être prête, et ils m’ont tous dit de prendre le temps qu’il me fallait pour revenir, quitte à sacrifier une partie importante de la saison. Mais quand on a l’esprit de compétition c’est compliqué de regarder une course derrière sa télé…

FA : Après ça, tu fais 2 à Val Di Sole et Snowshoe ! Sur les pistes les plus violentes de la saison ! Maintenant que l’on sait la nature de ta blessure, ça parait dingue non ?! Ça allait mieux ? Tu te sentais en forme ? Ou il y avait toujours quelque chose au fond de toi qui te disait de faire attention ?

Marine Cabirou : Je ne vais pas vous cacher que la fin de saison a été très dure pour moi ! Oui c’est clair que faire 2 à Val Di Sole et Snowshoe c’était presque inespéré vu les circonstances… Honnêtement, arrivée à Val Di Sole, je me sentais mieux mais pas en grande forme, j’avais encore beaucoup de mal à marcher normalement. Les track walk ont d’ailleurs été très compliqués pour moi cette année !

Tout au long de la semaine, j’ai eu l’impression de pas savoir rouler. Même lorsqu’on travaillait sur les vidéos avec l’équipe de France, on voyait bien que je n’arrivais pas à être moi sur mon vélo !Tout le staff a fait un travail incroyable pour m’aider, mais malgré tout c’était toujours compliqué pour moi, je n’avais plus beaucoup de muscle dans les jambes…

Le championnat du monde on sait tous que c’est l’objectif d’un jour et que tout peut arriver, du coup je me suis dit, c’est maintenant où jamais ! L’adrénaline m’a permis d’oublier la douleur le temps d’un instant et de me concentré sur mon run.

D’ailleurs à l’arrivée tout le monde m’a dit que ça faisait plaisir de me revoir faire du vélo comme ça, et que honnêtement, vu comme ils m’avaient vu rouler toute la semaine, ils ne pensaient pas que je serait capable d’arriver à sortir un run pareil ! Ça m’a fait tellement plaisir d’entendre ça car j’avais vraiment l’impression de commencer enfin à retrouver la « vraie Marine » !!

Mais après ça, tout n’a pas était si simple… J’étais vraiment aller chercher ce run au fond de moi et je suis arrivé à la course d’après épuisée. Mes jambes étaient en très mauvaise état. Honnêtement j’ai subi toute la semaine d’après à Lenzerheide. Le petit break avant de partir pour les US m’a fait du bien. J’en ai profité pour me reposer et travailler avec tout mon entourage pour essayer de récupérer au mieux avant la fin de saison.

Dès le départ, je savais que Snowshoe ne serait pas facile pour moi car il y avait une double manche dans la semaine. En plus le physio du team n’a pas pu faire le déplacement avec nous. Ça faisait déjà 3 mois que je vivais avec la douleur au quotidien. Mes jambes allaient un peu mieux de semaine en semaine, mais c’était encore loin d’être comme avant ! J’ai juste roulé comme j’ai pu, avec les moyens que j’avais, en essayant de m’économiser toute la semaine, et d’oublier la douleur pendant les courses. Mais une fois passé la ligne d’arrivée, la réalité me rappelait vite à l’ordre …

FA : La saison s’est terminée, et ce n’est finalement que maintenant, début novembre, que tu es certaine que ton genou n’est pas guéri. Qu’est-ce qui t’a mis la puce à l’oreille ? Des douleurs persistantes ? Une gène ?

Marine Cabirou : Au retour des US, j’ai coupé un peu pour me reposer et récupérer, je n’ai pas fait de sport pendant 3 semaines. J’essayais déjà à ce moment là d’avoir rendez-vous pour un IRM car j’avais une gène permanente : je n’étais pas encore capable de faire un footing. Rien que certains mouvements du quotidien qui peuvent paraitre banals pour tout le monde, étaient très compliqués pour moi. Lorsque j’ai repris l’entraînement, ça n’a pas loupé : après chaque séance mon genou enflait et tous les soirs j’avais du mal à marcher… je savais que quelques choses n’allait pas !

FA : Dans quel état est ton genou désormais ? Et sais-tu quel est le protocole à suivre pour guérir maintenant ? La saison va attaquer très vite l’an prochain : fin mars à Lourdes. Tu penses avoir le temps d’être prête ?

Marine Cabirou : Au résultat de l’IRM le verdict est tombé : j’avais la rotule fracturé depuis maintenant 4 mois ! J’ai vu un médecin du sport à Montpellier qui m’a dit que ma rotule n’était pas en bon état du tout et que si on l’avait vu de suite après ma chute je n’aurait rien dû faire pendant 3 mois (jusqu’a fin septembre) pour que ma rotule se remette à 100%. Au lieu de ça j’ai roulé toute la saison, et j’ai en quelque sorte fait que maintenir, si ce n’est pas même empiré, les dégâts…

Au vu de l’état actuel de mon genou, je n’ai aucune autre solution que de ne rien faire pendant 1 mois. Plus je sollicite mon genou, plus il mettra de temps à guérir. On commence par 1 mois et on verra au fur à mesure au fil de l’évolution. Je ne sais pas exactement combien de temps cela va prendre mais je n’ai pas le choix, sinon je vais recommencer la saison 2022 avec les mêmes douleurs que lors de la fin de saison 2021… Et je peux vous dire que je préfère couper un peu plutôt que de refaire une saison comme ça !

Certes Lourdes va arriver très vite cette année, mais sois je prends le temps de me soigner en prenant le risque de ne pas être prête à 100% en mars. Sois je continue à m’entrainer dans mon état actuel, et je suis sure d’arriver à Lourdes avec des douleurs car mon genou ne guérira pas ! Je ferais tout ce qui est en mon possible pour arriver au meilleur de ma forme à Lourdes, mais je préfère sacrifier l’ouverture de la Coupe du Monde plutôt que de sacrifier une saison entière.

On comprend ! On te souhaite un bon repos, plus que mérité donc, et une belle reprise à savourer une fois guérie, pleine d’envie et de motivation, telle qu’on te connait sur le circuit 😉