De retour de Tasmanie, Justin Leov (Canyon Factory Enduro Team) nous fait partager sa course et impressions sur l’EWS de Derby…
Temps de lecture estimé : 4 minutes – Texte : Justin Leov – Photos : Sebastian Schieck
Fête de la Boue et pneumonie en Tasmanie
Après la « fête de la boue » de Rotorua, il était temps de traverser la mer de Tasman pour la seconde manche des Enduro World Series où tout le monde avait hâte de retrouver le soleil et des pistes sèches.
Dès ma descente de l’avion, direction le parcours pour reconnaître à pied deux des spéciales chronométrées. Le tracé me rappela mes années en DH. Des rock gardens qui s’annonçaient comme de sérieuses menaces pour les roues les plus solides, de nombreux choix de trajectoires à disposition et un bon mélange de pilotage technique et physique… le menu du week-end était des plus appétissants.
Cet après-midi là, en rentrant des reconnaissances, je sentis rapidement que je couvais un rhume. Je ne savais pas encore qu’un damné microbe allait me clouer au lit les trois jours suivants ! Il n’était plus question de reconnaître à pied les spéciales restantes, je devais simplement essayer de récupérer un minimum de vie en vue des entraînements vélo. Mon niveau d’énergie restait fixé sur le zéro et avec une fièvre incessante il était même difficile de dormir. Alors que le jour de la course se rapprochait, les prévisions météo commençaient à se détériorer et celles pour le dimanche virèrent au catastrophique, avec de fortes pluies et orages prévus. Devoir courir sept heures sous la pluie, après avoir passé la semaine au lit avec la grippe… je me sentais condamné à une double peine !
Ce sont les moments où être un sportif professionnel n’est pas tout à fait aussi glamour que cela peut paraître vu de l’extérieur. J’étais en tout cas décidé à faire de mon mieux compte tenue de cette situation et essayer au moins de ramener de Tasmanie quelques points pour le classement général des EWS.
Le jour J, il y avait trois spéciales à courir le matin avant de pouvoir profiter de la zone d’assistance technique, puis quatre autres spéciales l’après-midi. Cette pause en fin de matinée devait être notre seul accès à eau et nourriture, à part les deux bouteilles de 350 ml d’eau fournies par l’organisation et ce que chacun pouvait transporter sur lui. Nous n’avions que vingt minutes à disposition dans la zone technique, donc dans de telles conditions, même cette pause devenait une course : nettoyer son masque tout en essayant de manger quelque chose, puis boire et remballer liquides et aliments dans nos sacs à dos trempés pour les quatre heures suivantes.
Je toussais beaucoup pendant toute la journée et à chaque arrivée de spéciale, je terminais avec la satisfaction d’avoir donné tout ce que j’avais et un peu plus. Je savais que je n’étais pas dans le rythme des meilleurs mais je courais avec la même détermination que lorsque je suis en bonne santé…
L’organisateur n’avait pas été très généreux sur les temps de liaison, il fallait donc surveiller sa montre et chercher à se ménager quelques minutes de repos avant chaque spéciale pour pouvoir au moins s’alimenter et nettoyer son masque avant de repartir.
Ne pas abandonner dans ces conditions fut déjà une petite victoire. Cette pensée me traversa souvent l’esprit tout au long de la journée. Terminer cette course était mon objectif et j’étais heureux de voir le contrôle horaire final et descendre du vélo. J’étais physiquement vidé et je ne souhaitais qu’une chose : rentrer en Nouvelle-Zélande au plus vite. Comme à Rotorua, félicitations à toutes celles et ceux qui ont terminé.
Je suis maintenant de retour chez moi et mon médecin a diagnostiqué une pneumonie dans un de mes poumons. Priorité donc au repos avant de penser à reprendre les entraînements, en espérant que Madère nous concocte des conditions plus agréables que celles que l’hémisphère Sud nous a réservé jusque-là.
À très bientôt !
Justin Leov