Endurotribe s’en faisait le relais il y a quelques semaines, et depuis, la rumeur enflait. Depuis que Chris Ball avait officialisé qu’une enquête de l’Agence Française de Lutte contre le Dopage (AFLD) était en cours, des noms circulaient en off, avec plus ou moins de pertinence.
Aujourd’hui, Richie Rude et Jared Graves mettent en partie fin aux rumeurs en officialisant qu’ils font l’objet de cette enquête. Ils se sont livrés à nos confrères anglo-saxons de Pinkbike et permettent ainsi d’en savoir plus sur la procédure en cours. Endurotribe fait le point.
Temps de lecture estimé : 8 minutes – Photos : Enduro World Series
Au sommaire de cet article :
- Résultats acceptés…
- Où en est la procédure ?
- Lignes de défense…
- L’autorité compétente…
- La suite ?!
- En aparté – D’autres incriminés ?!
Résultats acceptés…
Comme nous le précisions dans notre précédente publication, le Code Mondial Anti-Dopage stipule qu’un test anti-dopage comporte deux phases : l’analyse des échantillons A et B. L’athlète est informé d’un résultat anormal de l’échantillon A et peut demander l’analyse de l’échantillon B.
Selon nos confrères de Pinkbike, cette procédure a été respectée pour Richie Rude & Jared Graves. Les deux pilotes ont été notifiés par l’AFLD du résultat anormal des échantillons A courant juillet. Ils ont eux-même décidé de ne pas solliciter l’analyse des échantillons B, acceptant ainsi directement le résultat des premières analyses.
Où en est la procédure ?
En rendant ces faits officiels, Richie Rude & Jared Graves nous renseignent donc sur le stade de l’enquête. Ces résultats anormaux doivent maintenant être qualifiés et instruits. La procédure n’est donc pas terminée. Il est clair qu’en attente de jugement Richie Rude & Jared Graves ne sont pas reconnus coupables.
Même si l’officialisation des résultats a souvent un effet certain dans l’opinion publique, reste désormais aux deux protagonistes à se défendre, et aux instances compétentes à faire leur travail et rendre leurs jugements. Chose que l’on suit forcément avec attention.
Lignes de défense…
Dans ce cas précis de résultats anormaux, l’AFLD demande aux sportifs incriminés de produire une explication plausible de la présence des substances découvertes dans leurs organismes. Dans certains cas, les substances peuvent déclencher une procédure de suspension à titre provisoire. Higenamine et Oxilofrine – les substances incriminées (stimulants et « brûleurs » de graisse) – ne semblent pas en faire partie.
Dans ces cas de figure, plusieurs lignes de défense peuvent être tenues par les pilotes incriminés. Les deux plus évidentes portant sur l’ingestion accidentelle ou le plaidé coupable. Pour l’heure, il semblerait que Richie Rude se soit orienté vers la première, à en croire les mots de Chris Conroy, parlant au nom de Yeti Cycles, son sponsor principal…
« Nous sommes au courant de la position de Richie Rude quant au contrôle anti-dopage positif dont il a fait l’objet à l’occasion de la manche française des Enduro World Series plus tôt cette année. Nous croyons fortement en un sport propre et dans les procédures de contrôle anti-dopage. Nous avons milité et continueront à le faire pour que des contrôles soient régulièrement menés sur les EWS et dans toutes les disciplines cyclistes.
En nous basant sur les déclarations de Richie et sur ses engagements pour un sport propre, nous pensons qu’il s’agit d’un incident isolé et qu’il n’a pas sciemment pris une substance interdite. Yeti Cycles continue de soutenir Richie Rude tout au long de cette procédure. Par respect pour lui, pour la procédure et pour les Enduro World Series, nous attendrons le verdict final avant de faire tout nouveau commentaire. »
Du côté de Jared Graves, en proie à la guérison d’un cancer, l’affaire revêt une importance relative. Le pilote a lui même déclaré que pour l’heure, il ne serait de toute façon pas présent en 2019, lui restant six mois de chimiothérapie intensive et plusieurs mois ensuite pour revenir à un état de santé satisfaisant. Chez Specialized, Sean Estes va plus loin…
« Comme vous le savez, Jared se bat actuellement contre un cancer. C’est une situation qui requière 100% d’attention. Pour l’heure, notre seule préoccupation consiste à le soutenir dans cette démarche, de quelle que manière que ce soit. Tout le reste est secondaire. »
L’autorité compétente…
On l’a donc compris, même après les initiatives de Jared Graves et Richie Rude, la procédure n’est pas terminée. D’autant que les entités susceptibles de prendre des sanctions à leur encontre s’en remettent aux préconisations de l’AFLD. À l’UCI, Louis Chenaille – responsable relation presse – indique que…
« La manche 3 des Enduro World Series, qui se déroulait les 12 et 13 mai 2018 dans les Montagnes du Caroux, France, n’était pas enregistrée au calendrier officiel des épreuves UCI. L’UCI n’est donc pas l’autorité de contrôle anti-dopage compétente dans ce cas précis. […] De ce fait, à ce jour, aucun cas relatif à cet événement n’a été rapporté à l’UCI pour qu’elle instruise le dossier. L’UCI n’est donc pas en mesure de commenter. »
Chris Ball, lui, va désormais plus loin dans ses déclaration à la presse, indiquant qu’avant l’entrée en vigueur de l’accord entre UCI et EMBA pour 2019, les EWS ne sont pas directement en charge du contrôle anti-dopage. Ainsi…
« Comme c’est le cas dans une situation telle que celle-ci, et même si les EWS ont spécifiquement oeuvré pour que l’AFLD mène ses contrôles en France, nous ne sommes pas impliqués dans le détail des discussions à propos de quelconque découverte ou des procédures qui en découlent. »
Il est donc désormais clair que la balle est dans le camp de l’Agence Française de Lutte contre le Dopage. C’est à elle de donner suite à la procédure et de livrer ses conclusions, dont les préconisations de sanction qu’elle transmet aux fédérations qu’elle juge compétente, et rend publique.
Pour avoir suivi de près des procédures similaires, l’AFLD voit parfois large, prévenant certaines fédérations multi-disciplinaires en plus de celle plus spécifique à la pratique sportive concernée par le contrôle à l’origine de la procédure. Les conclusions ne devraient donc pas passer inaperçues…
La suite ?!
Tous les regards sont donc désormais tournés vers l’AFLD et ses déclarations. Les cas qu’elle instruit font l’objet d’un passage au collège de l’AFLD, qui se réunit plusieurs fois par an. Il reste deux sessions avant la fin de cette année 2018, l’agenda 2019 n’étant pas connu à l’heure d’écrire ces lignes. Ses délibérations sont ensuite publiées au cas par cas, dans les jours et semaines qui suivent.
Nul doute, bien sûr, que l’on suive ces parutions avec attention. Tout comme il semble que les Enduro World Series, UCI, sponsors et pilotes du milieu aussi. Rappelons pour conclure que si elles ne sont pas directement impliquées dans la procédure de jugement à cause de leur position particulière, les Enduro World Series n’en ont pas moins un règlement qui stipule que…
« Afin de préserver la propreté de l’Enduro VTT dès le départ, et pour éviter à l’esprit de la discipline d’être discrédité, tout pilote, quelle que soit la discipline cycliste concernée, qui a déjà été reconnu coupable par un tribunal ou organisme de contrôle d’usage de substances interdites, améliorant les performances, ne sera pas autorisé à participer ou concourrir à un événement Enduro World Series. »
Une position qui traduit une optique zéro tolérance en première instance, qu’il est bon de nuancer par la suite de cet article du règlement EWS…
« Tout pilote empêché de participer à un événement Enduro World Series en vertus du paragraphe précédent peut faire appel auprès du Board des EWS pour obtenir une dérogation à cette règle et, dans des circonstances exceptionnelles, le Board EWS peut, à son entière discrétion, accorder une telle exemption. Cependant, par soucis de transparence, le conseil d’administration d’EWS se réserve le droit de maintenir une tolérance zéro en matière de consommation de substances interdites et communiquera publiquement toute décision d’appel. »
Pour l’heure, la balle est donc dans le camp de l’AFLD – rompue à l’exercice – mais nul doute qu’elle rebondisse chez les EWS, qui se préparent à la recevoir. Le Board EWS – composé de Enrico Guala,Darren Kinnaird,Chris Ball et Fred Glo – sera-t-il saisi ?! Affaire à suivre !
En aparté – D’autres incriminés ?!
De source concordante, au moins 9 pilotes auraient été contrôlés à l’occasion de cette manche française des Enduro World Series 2018. Il appartient à chacun de révéler ou non s’il en a été l’objet. Pour l’heure, par voie de presse, les pilotes suivant ont indiqué avoir participé au contrôle et n’avoir reçu aucune sollicitation de l’AFLD en retour : Adrien Dailly, Martin Maes, Greg Callaghan et Jose Borges. Il seraient donc hors de soupçon.
Richie Rude et Jared Graves, eux, ont pris l’initiative d’officialiser leur implication dans l’enquête. 4+2=6. Ceci ferait donc 3 pilotes pour lesquels nous n’aurions aucune précision. Certaines de nos sources proches du dossier nous indiquent qu’il n’y aurait eu que deux résultats anormaux au cours de cette instruction. Les trois derniers ne seraient donc pas incriminés.
Néanmoins, nous n’avons pas, pour l’heure, pu recouper cette dernière information. Nous nous y affairons, étant notamment prêt à relayer dans nos colonnes toute déclaration de leur part leur permettant de faire la lumière sur leur propre situation et coupant court à toute rumeur inutile.