Les grandes roues sont là..! Oui, je sais, le sujet peut faire débat. Il est parfois même à l’origine de vives réactions qui font autant appel à la passion, qu’à la frustration. Mais les dernières expériences en date m’ont convaincu d’une question à laquelle répondre : comment pourrais-je mener une saison entière d’essais sans prendre le temps de me consacrer à ce format et mieux en cerner les principales idées directrices ?
Damien Escalier a remporté le Shimano Epic Enduro au guidon du très réputé Specialized Enduro S-Works. Et il fallait être à l’affût en bord de piste – comme je m’y suis prêté toute cette longue journée – pour constater à quel point le 29 peut sembler à propos. Quelque part, c’est indéniable : il a convaincu nombre de participants. Ce ne sont pas non plus mes dernières investigations qui vont me contredire. Le comparatif des 3 formats – 27,5 / 27,5+ / 29 – m’a forcément mis la puce à l’oreille. Les sensations au guidon du Scott Genius 900 Tuned, qui inspire Rémy Absalon, n’y sont pas pour rien…
Et puisque certains commentaires constructifs m’y ont incité, voici venu le temps de me consacrer à l’essai d’un bon 29. Le BMC Trailfox, l’un des premiers vélos à grandes roues qui ait été utilisé en compétition d’Enduro à haut niveau, fait visiblement figure de référence. Autant dire qu’il me tarde de l’enfourcher pour mieux saisir en quoi le « couteaux suisse à grande lame » tel qu’il est présenté, peut, à tort ou à raison, être l’objet de tant de convoitises…
BMC Trailfox 02 XO1 2016
[cbtabs][cbtab title= »Prix »]5599€[/cbtab][cbtab title= »Poids »]13,6kg (annoncé, sans pédale, taille M, pneus montés en chambres)[/cbtab][cbtab title= »Fiche produit »]http://www.bmc-switzerland.com/fr-fr/velos/vtt/allmountain-trailfox-02-x01/[/cbtab][/cbtabs]
C’est un point peu courant, suffisamment du moins, pour être évoqué : dans la gamme suisse, le BMC Trailfox est le vélo disposant du plus de débattement. Cet Enduro 29 pouces à 150mm arrière, 160mm avant, fait donc figure de grand… Voir d’extrême ?! C’est ce que l’on va voir….
En matière de développement, BMC s’est construit la réputation d’être à la pointe, dans le détail le plus fin. Et lorsqu’il s’agit de poser la première fois les yeux sur le BMC Trailfox, nombres d’aspects interpellent en ce sens…
Au contact du BMC Trailfox, un peu comme à l’usage du fameux couteau helvétique, on n’en finit pas de découvrir des fonctions… Et comme l’emblème du pays neutre, il faut aussi parfois un petit moment avant d’en saisir l’utilité…
Tige de selle, hauteur, 29 pouces… Des éléments qui donnent forcément envie de jeter un oeil à la géométrie, point haut combien sensible et primordiale quand on parle de grandes roues et de grands débattements..!
La taille idéale..?!
C’est une habitude à laquelle je tiens : au début de chaque essai, j’évite systématiquement de prendre connaissance de tout un tas d’information. Poids, prix… et géométrie ! Sauf cas de force majeure, je veille à rouler sur une taille L, et basta. Ça permet d’éviter de se polluer l’esprit et le ressenti.
Une fois de plus : bien m’en a pris ! C’est ainsi que j’ai clairement identifié les points forts, du moins les points caractéristiques de la géométrie du BMC Trailfox, pour mieux en apprécier les chiffres ensuite.
J’évoque ici la position procurée, au sens large du terme. Je veux parler à la fois de l’ergonomie offerte, et de l’emplacement du pilote sur le vélo. La distinction des deux étant importante pour les apprécier et les associer, tant l’une sans l’autre peut ne pas fonctionner.
En statique comme en dynamique, il n’y a pas de doute : le BMC à de l’angle devant. J’entends par là que l’angle est couché, et qu’associé au déport de la fourche 29 pouces, la chasse est importante. Effectivement, 51mm de déport et 67° d’angle de direction en imposent. « Comment pourrait-on passer par l’avant ? » résume bien ma première impression.
Dans le même temps, le boîtier est bas, c’est indéniable. Associé aux caractéristiques du train avant, la sensation est immédiate : j’ai littéralement le sentiment d’être logé à l’intérieur du vélo, comme dans le cockpit d’une formule 1. J’ai pu noter cette impression que procure le 29 à travers le comparatif des 3 formats de roues, au paragraphe « assiette et position. » Elle est ici poussée à son paroxysme.
» Le BMC Trailfox réussi la prouesse de nous asseoir très bas, sur un 29 censé être haut perché..! «
Que dire du reach et du stack dans ce cas ?! C’est déjà très intéressant de voir que ce sont les deux notions principales mises en avant pour définir la géométrie des BMC. Sur l’autocollant de cadre et sur les deux premières lignes du tableau des géométries de la marque. Et ça se sent ! Le ratio entre les deux est très intéressant. 460mm de reach, 619mm de stack. Des valeurs que j’ai déjà eu l’occasion de plébisciter pour mon mètre quatre-vingt deux – lors des essais du Devinci Troy et du Mondraker Dune notamment.
Cet ensemble ergonomie positionnement m’inspire, il n’y a pas de doute. Quelques impressions tenaces m’y poussent : j’ai, par exemple, beau mesurer à plusieurs reprise la valeur, j’ai la sensation tenace de rouler la selle plus basse que d’habitude. Je suis pourtant bien aux 74cm habituels. Je pousse à 75cm, idem… Pas de douleurs, bonne efficacité en liaison…
Je finis par me faire à l’idée, tant elle est bonne… Et c’est bien ça : boitier bas, bons reach & stack, de la chasse devant… Ici, il ne faut pas « casser » le bas du dos pour chercher et charger le cintre. Le BMC Trailfox incite simplement à rouler le buste relevé, le regard naturellement porté vers l’avant, bien à l’abris derrière le cintre. Ce vélo réussi la prouesse de nous asseoir très bas sur un 29 pouces que les préjugés suggèrent haut perché..!
J’ai toujours observé avec envie cette caractéristique dans le positionnement de Florian Golay, quelle que soit sa monture. Je comprends mieux maintenant pourquoi le « petit suisse » a remporté deux fois le Shimano Epic Enduro au guidon du BMC Trailfox, entre autres… J’ai trouvé pareille position. La suite de l’essai m’en dira plus sur l’usage que l’on peut en faire… Ou pas !
Dynamique de base…
Avant ça, toutes ces belles sensations ont beau me procurer une bonne première impression, encore faut-il qu’elles se concrétisent en dynamique. Autrement dit, une fois en action, sous l’influence inévitable des suspensions.
À ce sujet, il me faut procéder en deux temps. Notamment parce que la cinématique à point de pivot virtuel du BMC Trailfox actionne le tant commenté Cane Creek Double Barrel Inline. 4 voies d’hydraulique possiblement ajustables : autant de raisons de se perdre pour certains, de s’amuser pour d’autres.
Avec le malin plaisir que je prends à jouer des clics à chaque nouvelle monture, je ne vais pas cacher mon plaisir à voir ce délicat bijou se glisser dans un essai. Pour autant, il me faut avant tout procéder avec méthode et application. D’une part pour rester compréhensible, d’autre part pour éviter d’aller trop vite en besogne. C’est pourquoi, une fois n’est pas coutume, je ne présente pas de tableau des réglages, mais réserve cette particularité au verdict de l’essai. Les choix et conseils n’en seront que plus clairs et limpides.
Avec autant de réglages, la tentation de faire ce que l’on veut est grande. Elle ne doit pourtant pas faire perdre de vue l’essentiel. En l’occurence pour ma part, chercher à comprendre la cinématique naturelle du vélo, avant de chercher à en tirer la quintessence.
Je commence donc par utiliser les réglages hydrauliques préconisés pour l’amortisseur – BMC / Trailfox TF01-TF02 / 2016 pour renseigner le formulaire du site Cane Creek. Ça tombe bien, puisque qu’ils s’avèrent peu chargés en compression haute vitesse, et dans la moyenne de la plage en basse vitesse. De quoi laisser la suspension prendre le débattement et me permettre de juger de son comportement au fur et à mesure de la course.
En balayant les SAG autour de la position préconisée – de 15 à 19mm, +/-2mm autour des 17mm conseillés – j’ai l’occasion de mettre en évidence un trait caractéristique de la cinématique : au-delà de ce point d’équilibre, la suspension a tendance à devenir dégressive. Elle s’ouvre. En clair : avec une pression élevée dans l’amortisseur, la suspension est relativement ferme, avant de se ramollir quand on entre dans la seconde partie du débattement. Anticiper si le vélo va rester haut ou non est alors compliqué. C’est avec moins d’air, dès le SAG préconisé de 17mm, que cette tendance s’estompe de manière intéressante.
À l’avant, j’essaye la Pike avec une cale, par curiosité. Dans ce cas, sur les plus gros chocs, l’avant, déjà couché par l’angle de direction, reste haut. Par transfert de masse, l’arrière plonge dans le débattement. Cette solution n’est pas pour favoriser l’équilibre et s’harmoniser avec la cinématique déjà particulière à l’arrière. C’est donc sans cale, entre 25 et 27% de SAG, que la Pike s’harmonise le mieux avec l’arrière.
La suite ?
Je pourrais aller plus loin dans mon descriptif des essais suspensions. Je m’y suis aventuré… Mais ce serait prématuré. Pour l’heure, je dispose d’un BMC Trailfox équilibré autour du SAG préconisé, offrant un comportement relativement linéaire.
Les réglages hydrauliques préconisés pour le Cane Creek offrent déjà un comportement sain. À moi de prendre le temps de faire bouger les lignes pour en mesurer tout le bien fondé. C’est en soit déjà une très bonne chose.
Suffisamment du moins pour envisager la suite de cet essai… Et lui trouver une raison d’être. En l’occurence, je ne pouvais pas introduire cet essai en citant plusieurs compétiteurs et compétitions sans moi-même me prêter à l’expérience.
Et puis, certains avancent que le 29 n’est pas nécessairement fait pour la chasse au chrono. Qu’ils aient ou non raison n’est finalement pas forcément la question prépondérante. Mais tenter l’expérience doit nécessairement me permettre d’en apprendre plus…
Notamment en m’offrant l’opportunité de pousser le BMC Trailfox dans ses retranchements ! À moins que ce soit lui qui mettent ma condition à l’épreuve. Anyway ! Corréler les performances d’un athlète et de son équipement, n’est-ce pas avant tout là l’essence même de l’épreuve sportive..?! Et une bonne occasion de mieux cerner les atouts et limites du couple ?!
En prenant part au très réputé Enduro des Terres Noires au guidon du BMC Trailfox, je ne risque pas de manquer d’éléments de réponses concrets… Récit complet à retrouver dans la seconde partie de cet essai :