Il y a quelques semaines, le Specialized Enduro Racing Team a surpris tout son monde. Après les grands noms qui ont fait les premières heures de la marque au niveau international de la discipline, et ceux qui, d’une manière plus générale, ont fait l’histoire du S rouge dans toutes les pratiques cyclistes…
Le Specialized Enduro Racing Team 2019 fait la place aux jeunes ! La moyenne d’âge est à peine au dessus de 20 ans et jusqu’ici, Maxime Chapuis, Cecce Camoin et Killian Callaghan étaient pilotes privés. Quelles sont les motivations du team ? Qui sont ces nouvelles recrues ? Comment le vivent-ils ?!
Tout le monde était réuni à Finale Ligure, en ce début de saison, pour se caler avant les premières échéances internationales qui arrivent à grand pas. On en a profité pour poser quelques questions, et dresser un premier portrait du Specialized Enduro Racing Team, millésime 2019…
Temps de lecture estimé : 10 minutes – Photos : Specialized
Au sommaire de cet article :
Le cadre
On aurait tendance à l’oublier quand de fortes personnalités font partie du collectif et attirent tous les feux des projecteurs sur eux… Mais une équipe, c’est aussi voir surtout, le travail d’un team manager chargé d’y donner un cadre, des valeurs, un fonctionnement, et de la fluidité.
C’est le job de Benno Willeit, au sein du Specialized Enduro Racing Team. Présent depuis plusieurs années au sein de la marque, il a bien conscience de ce que représente l’équipe dans sa version 2019…
« Ça a fait l’objet de grosses discussions en interne avant de prendre la décision. Brendan Fairclough, Troy Brosnan en étaient de bons exemples : on a toujours soutenu des jeunes dans nos programmes… Mais jamais nous avions poussé le bouchon à ce point, avec un casting entièrement jeune. »
Benno Willeit
Alors, folie la marque au grand S ?! On pourrait le penser si les ambitions étaient démesurées ou incohérentes. Mais au contraire, c’est une démarche et une approche sensée et lucide qui transpire des propos de son manager…
« Oui, notre stratégie peut paraître agressive et risquée… Mais si on bosse tous comme il faut, ça marchera. C’est l’occasion d’apprendre énormément, pour tout le monde dans l’équipe. Et dans ce contexte, nos partenaires sont précieux pour nous inculquer de bonnes choses. »
Benno Willeit
Voilà pour le message qui plante le début de saison, et pose les bases pour la suite. En 2019, le Specialized Enduro Racing Team a forcément un visage jeune. Un axe qui n’est décidément pas pour déplaire à son manager…
« Finalement, on se retrouve comme une petite marque, jeune, qui a tout à construire. Ça apporte de la fraîcheur. L’objectif est donc de montrer que l’on est là, que l’on bosse, et que l’on progresse. Ce Team Camp est l’occasion de finir de se familiariser avec l’équipement, faire venir la vitesse… Et créer un collectif ! »
Benno Willeit
Du rêve…
Pour créer des affinités, le Specialized Enduro Racing Team peut en tout cas s’appuyer sur le passé commun de Maxime Chapuis, Cecce Camoin et Killian Callaghan. Si le Suisse, le Corse et l’Irlandais viennent de pays différents, tous trois étaient encore privés il y a peu…
« Je dois remercier mes parents pour leur soutien important… Mais l’an passé, par manque d’argent, c’était impossible pour moi de faire toute la saison EWS, comme l’année d’avant. Là, ce n’est plus pareil ! »
Killian Callaghan
Le soutien des parents, Maxime Chapuis aussi le connait, lui qui a, comme beaucoup d’enfants, eu son premier Specialized Rockhopper offert par son père à l’âge de 9/10 ans avant de progresser avec de grands noms comme exemple…
« Quand j’ai commencé en Descente, Sam Hill occupait le haut des classements en Descente… Maintenant, il l’occupe toujours… En Enduro ! Quand je pense à lui, et à d’autres grands noms qui ont fait partie des teams Specialized… C’est fou ! Je me rappelle la première discussion avec le manager de l’équipe. J’en suis sorti en me disant « ce n’est pas possible, il n’y a eu que des grands noms! »
Maxime Chapuis
Les grands noms, et l’opportunité de prendre la relève ?! Cecce Camoin aussi y a forcément pensé au moment de faire un premier essai au sein de l’équipe pour les deux dernières manches EWS 2018…
« Rouler Spé ?! Pour moi c’était un rêve, quelque chose d’impossible ! Quand je regardais les replays des EWS, je voyais Curtis Keen, Jared, Hannah Barnes… Jusqu’à il y a peu, je roulais sur mon île, puis je suis venu sur le continent […] Et maintenant, je vais voyager, rencontrer du monde, me faire une expérience ! »
Cecce Camoin
À la réalité !
Forcément, chacun a eu son moment d’euphorie et de rêve, mais il ne faut pas s’y tromper. C’était il y a déjà six mois au moins. Tous ont donc connu ce basculement, de prise de conscience, au moment où le rêve devient réalité, et qu’il permet d’avancer…
« Pour moi, la bascule s’est faite très vite. L’an passé, j’ai participé à l’EWS de Finale en tant que privé. J’ai dormi dans mon van, mon vélo était rincé après une saison bien remplie… Et le lendemain, j’étais habillé en Spé, sur un vélo neuf, entouré de l’équipe, pour prendre mes marques ! Whaoh ! »
Killian Kallaghan
Maxime, lui, a réalisé quelques temps après, à la suite d’un entretien avec Benno, pour finaliser leur accord…
« J’ai vraiment réalisé en rentrant chez moi avec le vélo dans le coffre de la voiture. Là je me suis dit « ça y est, c’est fait » […] Et puis, voir l’entourage et le soutien dont on bénéficie au sein de l’équipe, c’est beau ! »
Maxime Chapuis
Cecce, lui, a eu plus de temps pour prendre contact. Notamment parce que l’an passé déjà, il était en lien avec Pure Agency – qui gère le team de Descente et la carrière de Loïc Bruni notamment – qui lui fournissait un vélo. Il était aussi, comme Maxime, en contact avec Specialized France pour faire usage d’un Team Kit. C’est donc lui, le plus jeune, qui embraye le mieux avec la suite du programme…
« Je suis dans le Specialized Enduro Racing Team, où il y a eu de grands pilotes, mais je ne me considère pas comme un grand nom ! »
Cecce Camoin
Ce que ça apporte…
C’est effectivement tout le travail que l’équipe va pouvoir faire ensemble qui doit maintenant porter ses fruits. Et Cecce en a bien conscience. Mieux, il le ressent à chaque opportunité de se retrouver…
« Je pense que j’ai une marge de progression importante en matière d’expérience. J’ai besoin de rouler avec des top-pilotes, faire de grosses courses. D’ailleurs, je sens les progrès que je fais à chaque fois que l’on roule ensemble. […] À côté, je passe le Bac S en juin, et c’est jamais facile de re-connecter après une semaine comme celle-là ! »
Cecce Camoin
Killian, lui, est légèrement plus âgé, et a fait un choix : celui de s’y consacrer à fond. Il saisit l’opportunité et en mesure les apports indéniables…
« Chez moi, c’est un luxe d’avoir l’opportunité de t’entraîner en journée, quand il fait jour, sans avoir à travailler entre deux séances. Et sincèrement, c’est un tel soulagement de ne plus galérer pour monter un vélo, l’entretenir et gérer l’argent/la logistique pour voyager… »
Killian Callaghan
Les tempéraments
Maxime, lui, semble fonctionner à l’affectif, et on le comprend. Comme d’autres, c’est la relation avec son père qui fait partie de ses moteurs. Le vélo comme prétexte pour parler de ses prestations, et avoir un échange qui le motive. Forcément, le soutien de l’équipe vient en écho…
« Pour moi, le plus précieux est l’entourage, l’assistance, le support sur les courses. Avoir l’opportunité de me concentrer sur ma tâche principale : rouler. […] Au début, je me demandais comment j’allais réagir, mais au final, je me sens entouré, c’est beau ! […] Du coup, j’ai eu l’occasion de rouler avec Loïc Bruni. Pour l’ancien descendeur que je suis, c’est inspirant. Un bel exemple à suivre… »
Maxime Chapuis
Une approche que partage Cecce, et qui doit lui permettre de développer sa manière d’appréhender la compétition. Continuer à construire un parcours posé sur de bonnes bases…
« J’ai débuté par le BMX à l’âge de 8 ans. C’est la meilleure école, et c’est là que j’ai pris goût à la compétition. J’en garde ma principale force : je ne lâche jamais rien. Je garde le bon esprit, le mental, j’évite de me laisser emporter dans le mauvais sens. […] Pour moi, en Enduro, c’est super important de gérer, d’être régulier. Je préfère rouler légèrement en dedans, avec une petite marge, mais être propre et sans erreur, plutôt que prendre des risques. »
Cecce Camoin
Une approche raisonnée et prudente qui va forcément profiter de celle très anglo-saxonne et différente de Killian. Si la base est la même, le parcours est ensuite différent, et enrichissant…
« J’ai débuté par le BMX et m’y plaisais, jusqu’au jour où je me suis cassé la jambe. Pendant la rééducation, j’ai essayé un VTT. Et puis, j’ai commencé à en faire de plus en plus avec Greg et des amis. C’était tellement drôle et fun ! J’adore rouler et m’amuser, c’est ce qui me motive. […] Mes modèles d’inspiration ne sont pas forcément des compétiteurs, mais plutôt des styles : Fabio Widmer, Danny McAskill, Josh Bryceland… »
Killian Kallaghan
Les objectifs
Voilà donc une équipe qui prend forme, des tempéraments qui se rencontrent et qui, si le travail paye, devraient s’apporter mutuellement. C’est en tout cas ce qu’on leur souhaite pour cette saison 2019, et après, en fonction de chacun. Tous ont signé pour une à deux années de contrat, en fonction des options de renouvellement dont leurs contrats font l’objet.
Pour le reste, ce n’est pas le team, mais eux-même qui se fixent les objectifs. Une liberté qui doit permettre à chacun d’éprouver son mode de fonctionnement…
« C’est à nous de se fixer les objectifs. La pression vient de moi, pas du team. De cette manière, je sens que l’on croit en nous chez Specialized, et ça c’est très important. […] Après, il n’y a aucun doute : je fais du vélo pour être pro, devenir Champion du Monde ! Je fais tout pour ! »
Killian Callaghan
De cette manière, Maxime confirme le besoin de se fixer des objectifs…
« Il en faut, des personnels et bien placés, pour avancer, et pour éviter de tomber dans une routine ou un confort. C’est comme ça que je fonctionne, que je suis compétiteur. J’ai quelques idées pour la suite, mais pour l’heure, je suis pleinement focalisé sur la saison ! »
Maxime Chapuis
Plus jeune de l’équipe à 17 ans, Cecce est celui qui a le plus de temps devant lui pour progresser, mais n’est pas en reste au moment de définir ses objectifs. Une approche focalisée sur la performance personnelle et dans laquelle le résultat est à sa place…
« Mes propres objectifs sont d’être sérieux, et d’apprendre tout au long de la saison. Je passe le Bac en juin, donc je me focalise sur un calendrier raisonnable d’ici à juin : ouverture de la Coupe de France, EWS à Madère et championnats de France en Mai… Puis il y aura les EWS, cet été. […] Je me focalise sur le plaisir à faire les choses, les résultats suivront. Ça pourrait me permettre d’entrer dans le top 10, voir m’approcher du top 5 U21 ? »
Cecce Camoin
C’est tout ce qu’on peut souhaiter, et suivre, avec attention, à travers les résultats de la saison 2019, à retrouver sur les comptes Instagram des pilotes et sur Endurotribe, bien entendu !
@cecce_camoin / @maxchapuis / @killiancallaghan