Revivez l’EWS argentine de Cerro Catedral au travers des aventures exclusives du kiwi Justin Leov (Canyon Factory) au guidon du Strive CF ! Il nous présente son journal…
Texte : Justin Leov # Photos : Sebastian Schieck
Tango en Argentine
Pour cette deuxième manche, j’ai dû revoir encore un peu les réglages de mes suspensions, changer les cales de volume et diminuer la pression légèrement. Des changements dictés par les premières reconnaissances. Un parcours plutôt typé DH, sablonneux et exposé aux quatre vents. Avec certaines ornières si profondes que l’on risquait d’y rester planté dedans.
Autre changement effectué sur le vélo, un plateau de 36 dents devant au lieu de 34 et un guidon relevé de 5mm supplémentaires. Cinq des six spéciales étaient très raides ou contenaient des passages très raides, parsemées de trous près à vous engloutir, donc un poste de pilotage un peu plus haut ne ferait pas de mal. Enfin je choisissais des disques de 200 mm au lieu de 180 pour mieux freiner la bête !
Je dois dire que lors des reconnaissances j’eu du mal à mettre correctement aux point mes passages. Nous utilisions les remontées pour accéder aux parcours donc contrairement à la semaine passée il était possible de reconnaître chaque spéciale au moins deux fois. Par contre je ne m’attendais pas à ce qu’elles changent aussi radicalement au fur et à mesure des passages. Les trajectoires que je mémorisais lors d’un premier run n’existaient plus lors du run suivant. C’est une chose à laquelle je ne suis pas habitué, j’ai plutôt besoin de pouvoir visualiser mentalement la trajectoire idéale pour ensuite essayer la retrouver sur le terrain au passage suivant.
L’autre aspect spécifique du parcours, l’omniprésence de la poussière. Pas facile d’y voir clair et carrément impossible de rouler derrière quelqu’un. Les lunettes n’ont pas quitté mon nez du week-end, sauf pour être nettoyées après chaque run avec la housse de protection du masque, recyclée en chiffon de luxe.
Je négociais la première spéciale, un mélange de sections très rapides dans de grands espaces et de passages beaucoup plus serrés avec ornières, sans grosses erreurs et avec le 12ème temps à la clé. Bien-sur j’aurais voulu faire encore mieux mais c’était quand même une bonne façon de commencer.
La deuxième spéciale était un sprint de deux minutes. Dans ces cas là, ça passe ou ça casse, dans mon cas ça ne passa pas vraiment 😉
Je ne réussis jamais à trouver le bon rythme. La particularité de ce parcours sablonneux et profond, c’est que la moindre faute te coupe dans ton élan et la vitesse perdue ne se retrouve plus. Passons à la spéciale suivante….
La troisième spéciale était ma préférée du week-end. Elle commençait par ce qui semblait être un terrain lunaire. Grands espaces, parsemés de petits rochers. J’avais adoré pendant les reconnaissances et j’avais hâte d’y passer en course à toute vitesse. Il y avait aussi une section en montée, assez raide, au milieu de la spéciale. Il fallait donc gérer ses forces correctement et être vigilant techniquement. Dès le départ j’avais de bonnes sensations. De bonne augure pour la suite.
À un certain moment je notais que des piquets et un morceau de rubalise avaient été arrachés et gisaient au milieu du parcours. Trop tard pour les éviter, je roulais sur un des piquets de bambou et il venait se coincer entre mon dérailleur et le cadre. Quelle poisse ! J’essayais de pédaler mais je dus rapidement me rendre à l’évidence, il n’allait pas s’enlever tout seul et risquait d’arracher mon dérailleur, ce qui serait synonyme d’une fin de week-end prématurée. Je m’arrêtais donc pour déloger ce p….. de piquet. Je repartais et j’avais vraiment les boules. Au bout de quelques mètres je sentais qu’il y avait encore quelque chose qui n’allait pas, les vitesses ne passaient pas. J’arrivais à la partie en montée et je devais me la faire en courant ! Je lançais des insultes au monde entier dans mon casque. Au sommet de la côte je parvenais à remettre mon dérailleur en état de marche, et je repartais pour la fin de mon run. Cette fois j’étais tellement en colère que j’en oubliais toutes mes bonnes résolutions de prudence. J’abordais le reste du parcours à fond et cela fut finalement une bonne façon de me calmer et de retrouver un peu de sérénité !
Je me retrouvais à la fin de la première journée en 25ème position, pas vraiment ce que j’espérais au départ.
Typée DH, la spéciale 4, le lendemain, ne m’épargna pas quelques sueurs froides mais dans l’ensemble je m’en sortais assez bien.
La 5 s’annonçait comme très physique. À peu près sept minutes d’effort sur un tracé avec assez peu de dénivelé et une montée raide qui précédait la dernière partie très technique. J’y allais de bon cœur, un peu trop d’ailleurs en certains points, j’y laissais pas mal d’énergie mais c’est souvent le cas dans les spéciales très physiques, pas évident de tracer des trajectoires bien fluides lorsque l’on manque d’oxygène ! À l’arrivée, le 9ème temps, et une grosse satisfaction de voir que la vitesse est de retour.
La dernière spéciale était à nouveau très typée DH. Celle-ci se passa mieux que celles du matin, j’étais content de mon pilotage et je finissais avec de bonnes sensations. Sur cette deuxième journée j’avais réussi à refaire un peu de mon retard pour finir à la 16ème place au général.
Des progrès, petit à petit. Cela est parfois frustrant de ne pas pouvoir se mêler à la lutte pour le podium, voir d’autres pilotes gagner les spéciales en ayant bien présent à l’esprit quel effet cela fait. Mais c’est une de ces situations où il n’y à pas de solutions rapides, il faut du temps pour se reconstruire et retrouver son meilleur niveau après un accident. Un changement de team et de matériel est lui aussi synonyme de période d’adaptation. Je repars donc d’Amérique du sud avec mes deux premiers résultats de la saison. Je sais maintenant où j’en suis, et je sais là où je veux arriver. J’ai du pain sur la planche !
A très bientôt en Irlande.
Justin