Depuis l’essai comparatif des formats de roues 27,5 / 27,5+ / 29, les grandes roues m’intriguent. Je l’évoquais en préambule à l’essai du BMC Trailfox, le 29 pouces a ses arguments. C’est ce que j’ai pu confirmer au verdict de cet essai à grand diamètre, d’un vélo millésimé 2016.
Le test s’est avéré concluant et instructif. Le vélo est même entré dans le cercle très fermé de ceux que je cite lorsque l’on me demande lesquels j’ai le plus apprécié cette saison.
Il n’empêche qu’à certains égards, je suis resté sur ma faim. Notamment lorsqu’il s’agit de tricoter entre les arbres. Depuis, j’ai à nouveau utilisé mon vélo perso – Canyon Spectral EX, 27,5 pouces – en compétition. L’occasion de mesurer à quel point, on peut mieux faire en pareilles circonstances…
Alors, forcément, ce goût d’inachevé a pesé au moment d’envisager le test suivant. Existe-t-il un 29 capable de mieux tourner, ou est-ce une constante avec laquelle composer irrémédiablement ?
Me voilà donc en quête de nouveaux éléments d’enquête et de réponse… Il se pourrait bien que je les obtienne au guidon du tout dernier Yeti SB5.5C. À première vue du moins, certains signes ne trompent pas…
Yeti SB5.5C XO1
[cbtabs][cbtab title= »Prix »]8399 euros PGC[/cbtab][cbtab title= »Poids »]12,7 kg (annoncé, sans pédales)[/cbtab][cbtab title= »Fiche produit »]http://www.yeticycles.com/bikes/sb55c[/cbtab][/cbtabs]
Yeti fait en effet partie de ces marques qui ne manquent jamais une occasion de lancer un vélo quand il est à propos. En la matière, ce 29 pouces doté de 140mm arrière, 160mm avant tombe à pic. Il s’inscrit dans la mouvance actuelle des Santacruz Hightower, YT Jeffsy et Evil Wreckoning qui traduit l’idée que le grand format n’a pas dit son dernier mot en matière d’Enduro…
Au moment d’écrire ces lignes, le Yeti SB5.5C est d’ailleurs le dernier né de la gamme américaine. La marque du Colorado l’a présenté mi-avril 2016, et le vélo gagne tout juste les shops.
Autant dire qu’il s’agit d’un 29 pouces de toute dernière génération. Une bonne raison de croire qu’il porte en lui les dernières avancées du format ?
Peut-être, si l’on en croit le programme qu’on lui prête… Celui d’être « à l’intersection entre Trail, All-Mountain et gravity… » Comprendre par-là : couvrir l’ensemble des usages balayés au comparateur d’essai Endurotribe. Ni plus, ni moins !
Et donc celui, entre autre, de remplacer ponctuellement son équivalent 27,5 pouces aux mains de Richie Rude, l’actuel leader et homme fort des Enduro World Series…
Ce qui se cache dans les détails…
À première vue, le SB5.5C partage en tout cas plusieurs aspects du SB6 qui a conduit le jeune Américain au titre 2015 et à la domination qu’on lui connait en ce début de saison 2016. Un cadre dans la lignée directe et intemporelle à laquelle la marque nous a depuis longtemps habitué…
Les détails ne s’arrêtent d’ailleurs pas au cadre, puisque certains éléments intéressants du montage font aussi la part belle à quelques pièces d’exception…
Un montage Fox qui promet d’ailleurs, si l’on tient compte de la proximité des deux marques. Le team EWS du champion en titre ne s’appelle d’ailleurs pas « Yeti/Fox » par hasard. Les deux marques partagent une collaboration étroite depuis de nombreuses années maintenant.
Vers l’infini…
En matière de suspension, le Yeti SB5.5C ne s’arrête pas à l’usage de produits à la queue de renard. Au coeur même de sa conception, il s’appuie sur le concept de suspension qui fait l’ADN des VTT tout-suspendus de la marque : le Switch Infinity, son architecture et la cinématique particulière qui en découle…
Un principe unique qui a le mérite de se démarquer des concurrents, soient-ils mono-pivot, horse-link ou à point de pivot virtuel. Ici, l’habituelle biellette basse laisse place à ce pivot monté sur glissière qui translate vers le haut, puis vers le bas, au fur et à mesure de la prise de débattement.
Je ne vais pas manquer l’occasion de me pencher sur ce que cette subtile nuance de deux principes éprouvés. À une époque où l’on entend si souvent dire que tous les vélos se ressemblent…
… Et au delà ?!
Le Yeti SB5.5C ne manque de toute façon pas une occasion de se démarquer. Sa géométrie particulière y participe. Et à plusieurs égards, elle revêt un intérêt particulier dans la logique d’essais Endurotribe menée jusqu’à présent.
Notamment parce qu’à quelques millimètres près, le Yeti SB5.5C (taille L) utilise certaines côtes très similaires à celles du BMC Trailfox (taille L) essayé précédemment. À l’empattement, le Yeti est à peine 5mm plus court. Les bases de l’américain sont seulement 2mm plus longues. Les tubes de selle sont à 3mm d’être identiques. Et il y a moins de 0,5° de différence aux angles de selle et de direction.
Mais alors, doit-on craindre que le comportement en courbe du Yeti et du BMC soient proches ? Pas impossible. D’autant que certaines valeurs intriguent. Le boitier du Yeti est annoncé 8mm plus haut… Pas un bon signe sur le papier.
Il y a pourtant certains éléments importants que le Yeti SB5.5C met sur le tapis. C’est une nouvelle fois du côté des reach et stack qu’ils faut se pencher pour y voir tout l’intérêt. Sur cette taille L – préconisée pour les gabarits de 1m80 à 1m91 – la position est 18mm plus courte et 5mm plus haute que sur le BMC Trailfox. Par ailleurs, cette taille L n’est pas la plus grande, comme l’est la taille L chez BMC. Chez Yeti, le 29 est accessible à partir de 1m70 en taille M, et au dessus de 1m90, en taille XL.
J’appréciais pourtant les reach et stack du BMC, par ailleurs plébiscités sur les Mondraker Dune Carbon R et Devinci Troy RR.
Autant dire que la problématique a de quoi m’intriguer. D’autant que je confiais en commentaire d’essai du Trailfox que j’envisageais avec ouverture d’esprit, qu’un autre couple de reach et stack puisse fonctionner à mes yeux… Me voilà donc servi pour en avoir le coeur net !
Le luxe de la simplicité
J’ai beau m’étaler un peu sur l’étude comparative de la géométrie du Yeti SB5.5C, à l’usage, le rendu est bien plus limpide. Et il me faut avant tout m’assurer de certains détails primordiaux. Notamment en matière de réglages des suspensions.
En la matière, la collaboration Yeti/Fox ne ressemble pas à un simple argument marketing. Et ce, pour plusieurs raisons qui deviennent évidentes au fur et à mesure de mes essais.
À commencer par l’ajustement des SAG. le Yeti SB5.5C a beau ne pas proposer le même débattement à l’avant et à l’arrière, je n’ai pas à batailler avec les SAG pour trouver un bel équilibre. Dans les deux cas, c’est autour de 30% que l’assiette du vélo sont les plus sains.
Tout juste suis-je tenté de jouer de quelques Psi pour répondre à mes habitudes et goûts personnels : ceux de pouvoir compter sur un cintre suffisamment porté pour pouvoir m’y appuyer sans arrière pensée. Je fais donc tendre le SAG avant vers 28% (45mm) tandis que j’exagère légèrement celui de l’arrière à 31% (18mm) en anticipation du programme montagnard qui nous attend.
En matière d’hydraulique aussi, les suspensions du Yeti SB5.5C démontrent le soin du détail porté à leurs ajustements. Milieu de plage – 11/22 clics à l’arrière, 6/12 à l’avant – délivre un comportement sain, à propos pour un usage raisonnable. La même proportion de changement vers une détente plus rapide – 7/22 arrière, 4/12 avant, pour atteindre le tiers plus rapide de la plage – permet de dynamiser le vélo en vue de la compétition, tout en conservant tout son équilibre.
Dans tous les cas, la suspension arrière offre un comportement progressif très intéressant. Il n’est pas sans rappeler celui du Devinci Troy : aussi facile et juste à exploiter. Si tout le débattement est utilisable et utilisé, jamais la sensation de talonner ne se fait sentir…
Plus qu’à la lecture de son descriptif, c’est donc au moment de ces premiers réglages que le Yeti SB5.5C s’exprime. Il n’y a qu’avoir les SAG et plages de réglage de détente. Tout est exploitable, l’avant et l’arrière évoluent de concert lorsque l’on touche aux réglages, la mi-plage des détentes est un bon repère… Tout est facile !
Le Yeti SB5.5C apporte ici quelques éléments pour justifier qu’il vaille son pesant d’or ! Comme sur une horlogerie Suisse à laquelle on ne tolérerait aucun défaut, le Yeti SB5.5C ferait presque tourner la tête. Pourquoi diable, n’a-t-on pas droit à pareil justesse et simplicité plus bas en gamme ?!
La suite ?
Peut-être justement parce qu’un tel résultat est le résultat d’un travail qui mérite salaire, en amont. Toujours est-il que de telles promesses et premières impressions ne sont pas sans risques. Ceux d’aller plus loin et plus haut : trouver un terrain où pousser une telle monture sur un défi à sa mesure !
C’est toute la tâche qui m’incombe pour la suite de cet essai. De la séance All Mountain à la pédale, sur les collines des Alpes de Hautes-Provence, pour faire quelques intensités… Au point culminant du secteur pour chercher le run le plus long et le plus sinueux qui doit me permettre de confirmer ces aptitudes en courbes, même à la longue… De la sortie d’acclimatation en altitude pour prendre la mesure d’un terrain de haute montagne… Au pentes d’un glacier redouté par tant de compétiteurs…
Oui, je décris là les derniers instants de préparation à un sommet de la saison : la Megavalanche de l’Alpe d’Huez ! Après tout, il faut bien, entre autre, envisager de ramener le Yeti dans son élément… La montagne sous tous ses angles, en occurrence !
C’est tout l’enjeu de la seconde partie de cet essai, à lire sur endurotribe :