Pour les plus assidus d’entre nous, vous n’êtes pas sans savoir qu’une réforme de la Coupe du Monde est en cours – mesure voulue par le conglomérat Warner Bros/Discovery/ESO à la tête des organisations et promotion du circuit international depuis quelque temps désormais, et ce jusqu’en 2028. Parmi les intentions du promoteur, le fait de réduire à 3 le nombre de pilote présent sur chaque podium dès cette saison. Une décision qui rassemble une large opposition parmi les athlètes et leurs équipes, premiers concernés…
[M-à-J du 4 avril, 10h15 – Calendrier oblige, les athlètes de la Coupe du Monde XC 2025 sont les premiers à s’exprimer sur le sujet des podiums. Les Descendeurs – dont la rentrée est prévue à la mi-mai – s’expriment à leur tour pour soutenir la revendication. L’article est mis à jour en ce sens.]
Historiquement, ça fait un moment maintenant que la Coupe du Monde VTT a cette particularité : elle accueille 5 pilotes sur la plupart des podiums de chaque course, et à l’issue de la saison. En réalité, cette initiative date d’une période où la popularité du circuit international était en berne – la faute, à l’époque, à une gestion compliquée, des retombées limitées, et des moyens limités issus d’une industrie en difficulté. Le podium à 5 athlètes avait alors l’intérêt d’offrir plus de visibilité à un plus large groupe d’athlètes, équipes et sponsors. Si bien que ce format est devenu emblématique de la Coupe du Monde VTT, et faisait jusqu’à peu encore, sa force… ou du moins, part entière de son ADN.
Un format historique et structurant
Au-delà de l’exposition, ce format a jusqu’ici eu deux autres effets notoires :
- Il reflète la densité et le niveau de compétition dans une discipline où les écarts sont souvent serrés. Il n’est ainsi par rare, par exemple, de communiquer sur le fait que le podium d’une manche de Coupe du Monde de Descente se tienne en une seconde à peine.
- Il permet à des coureurs outsiders ou en progression de se faire remarquer et d’accéder à des opportunités professionnelles plus facilement. Le Top 5 est ainsi devenu une référence, un objectif tangible pour de nombreux coureurs et équipes. Une étape dans la progression des pilotes, offrant une certaine exposition au-delà des parfois un, deux ou trois athlètes qui dominent leur discipline et trustent les honneurs.
Un choix dicté par la standardisation ?
Dans sa communication, WBD justifie cette réduction par un alignement avec les autres disciplines cyclistes, où les podiums sont généralement limités aux trois premières places. C’est d’ailleurs déjà le cas sur les mondiaux de VTT, où seules trois médailles sont décernées lors des cérémonies. Pour autant, les Championnats du Monde sont autre chose, et l’argument de la normalisation peine à convaincre. D’autant qu’en matière de discipline sportive et cycliste, le VTT s’est toujours distingué par son format et sa philosophie propre, repoussant une standardisation qui ne correspond pas forcément aux réalités du sport ni à ses valeurs fondatrices. Un peu à la manière du Biathlon, qui lui aussi a choisi de tracer sa propre voie pour conquérir la notoriété… Et offre des podiums à 6 athlètes, via sa cérémonie des fleurs qui complète le top 3.
Bref, la normalité a la peau dure dans ce bas monde, mais à l’aube de l’ouverture de la Coupe du Monde 2025 au Brésil, le paddock XC monte donc au créneau. Les athlètes dénoncent une décision prise sans concertation, qui ignore l’histoire du VTT et les conséquences directes pour les coureurs, en particulier ceux qui se battent pour la quatrième ou la cinquième place, souvent déterminantes dans une carrière ou du moins, l’étant devenu avec insistance dans le milieu.
Répercussions sportives et économiques
En creux, on distingue forcément les impacts négatifs qu’une telle disposition semble provoquer, et qui sont avancées par les athlètes et équipes signataires de la contestation actuelle :
- Moins de visibilité pour les athlètes : seuls trois coureurs bénéficieront d’une reconnaissance officielle, diminuant les opportunités de mise en avant pour les autres.
- Un effet négatif sur les sponsors : la quatrième et la cinquième place restent des positions valorisables, cruciales pour les contrats et le soutien des marques.
- Un appauvrissement du storytelling des courses : en réduisant le nombre d’athlètes mis en avant, on limite aussi les récits de performances et de progression qui dynamisent la discipline.
Une fronde des athlètes
Face à cette décision, de nombreux coureurs de haut niveau ont signé une pétition adressée à WBD pour demander le maintien du podium à cinq places. Parmi eux, la plupart des athlètes majeurs et pas moins de 167 pilotes XC – 106 garçons et 61 filles au total. Avec eux, 13 des 20 équipes officielles de la saison 2025 sont également signataires. Reste désormais à voir la réaction de Warner Bros et des éventuelles suites que les protestataires entendent donner. En premier lieu desquelles, le soutien affiché par les descendeurs qui doivent entrer en piste à la mi-mai. Calendrier oblige, ce sont les crosseurs qui s’expriment en premier à ce sujet. Mais quelques 24h après la publication des premiers concernés, les seconds affichent publiquement leurs soutien et se joignent à la revendication. Quelques 61 pilotes viennent s’ajouter à la massive protestation en cours, la plupart ayant affiché le communiqué sur leurs profils Instagram, accompagné d’une photo de leurs premier podium en Coupe du Monde en guise de symbole… Fort !
Un message à Warner Bros Discovery de la part des athlètes de VTT cross-country (XCO) UCI :
Depuis plus de 30 ans, le podium en Coupe du Monde de VTT se compose de cinq coureurs. Unique à notre discipline, ce format a offert à de nombreux athlètes et équipes une plus grande visibilité et de meilleures opportunités. Il a été un véritable tremplin pour de nombreux riders et a permis aux équipes plus modestes d’exister. Viser un podium dans notre sport, au plus haut niveau, a toujours signifié intégrer un Top 5. Ce format apporte de la valeur et de la profondeur à notre discipline, en offrant plus de chances aux coureurs d’être mis en lumière et en augmentant l’intérêt pour les équipes, les sponsors et les marques qui soutiennent le VTT de haut niveau.
Warner Bros Discovery n’a qu’un seul argument pour justifier la réduction du podium à trois places : la conformité. Une volonté de se calquer sur les autres disciplines sportives, une décision prise malgré la forte opposition des athlètes qui sont pourtant le cœur de ce sport. Nous avons été ignorés et laissés sans voix face à ces changements qui affectent directement notre avenir.
Comme le savent nos fans, le VTT a toujours refusé de se conformer aux normes imposées par d’autres disciplines. Depuis la création des Coupes du Monde dans les années 1990, nous avons tracé notre propre chemin, forgé notre propre identité. Nous voulons conserver ce qui fait la singularité et le caractère de notre sport. La grande majorité des coureurs et des équipes se sentent totalement mis à l’écart dans cette décision.
Ceci est notre sport, et nous ne laisserons pas la conformité lui enlever son identité ! Nous exigeons le maintien du podium à 5 places en 2025 !



