2017 sera pour moi une saison de VTT hors norme depuis mes débuts à VTT car je tenterais au mois de septembre prochain le record officiel du Tour du Mont Blanc à VTT.
Pour préparer cette tentative « exceptionnelle » (160km et 9000m de dénivelé positif) je voulais participer à une épreuve hors norme pour voir où j’en étais physiquement et mentalement. Le Radon Epic Enduro avec ses 114km et 4800m de dénivelés s’est alors présenté à moi tout naturellement. Ayant participé et terminé l’épreuve en 2014 à la 6ème place, mais dans état de fatigue incroyable (crampes dès la 1ère boucle, fringale dans la 2ème boucle…), je savais ce que cette épreuve pouvait m’apporter pour préparer mon record…
Temps de lecture estimé : 12 minutes / Récit : Nicolas Filippi / Photos : A. Bussier
Ma préparation
Depuis le début de l’année, Specialized France me fait confiance et depuis le début de l’année j’ai repris l’entraînement progressivement tout en conciliant mon travail de Coach et ma vie de famille. Je ne m’entraîne plus comme un athlète de haut niveau, mais je sais exactement ce que je dois faire et à quel moment pour arriver dans une forme optimale sur cet Epic 2017.
Mes entraînements sont dans un premier temps basés sur du travail en endurance basse et sont au nombre de 2 à 3 séances par semaines avec aussi 1 à 2 séances de gainage et pliométrie. Je m’organise vraiment en fonction de mon travail et de ma famille et rien n’est vraiment établi… Le dernier mois avant l’Epic, les intensités d’effort se veulent plus hautes avec du travail de seuil et de Puissance Maximale Aérobie dans de longues montées, ainsi que quelques « chronos » sur les sentiers Vauclusiens.
Tout juste un mois avant l’Epic j’ai organisé un stage de 3 jours à Olargues regroupant 4 athlètes que je coache et 8 participants à l’Epic du magasin Singlebikes Paris. Ce stage a permis à l’ensemble des participants de se rendre compte des difficultés de l’épreuve, de leur points faibles et points forts et d’accès leur entraînement en conséquent pour les dernières semaines de préparation. Personnellement, je peux déjà constater que ma condition est satisfaisante et que je récupère très bien des entraînements de 3 à 4 heures et que je peux enchaîner sans soucis des entraînements rapprochés.
Point final de ma préparation, j’ai étais invité à participer à une course Marathon sur l’Île de La Réunion 2 semaines avant l’Epic. Course où j’ai malheureusement subit une sévère déshydratation due à la chaleur et au taux d’humidité. J’ai néanmoins pu m’entraîner en conséquent pendant 1 semaine en réalisant pas moins de 20 heures de VTT ! A mon retour il ne me restait alors plus qu’à sur-compenser, me reposer et préparer minutieusement mon matériel pour le Jour J.
La course
N’habitant qu’à 3 heures de route d’Olargues, j’arrive sur place vers 16 heures et récupère ma plaque dans la foulée. L’accueil y est comme d’habitude très chaleureux et on recroise de vieux amis :-). Je vais ensuite me détendre un peu les jambes en allant marcher un peu sur la spéciale Urbaine puis retourne à mon camion pour préparer mes affaires et mon couchage pour la « demi-nuit » que nous allons passer.
Le matériel utilisé
- Mon vélo : Specialized Stumpjumper Expert Carbon 29er Taille L / Roues Roval Traverse SL / Pneus Avant Hillbilly Grid 29×2.3 à 1,5 bar et Butcher Grid 29×2.3 à l’arrière 1,6 bar.
- Tenue Specialized Enduro + Sac à dos avec dorsale et poche à eau.
- Casque intégral Specialized Dissident pour toute la durée de la course.
- Chaussures Specialized 2FO Cliplite.
- Eclairage guidon et casque puissant et sans faille pour éviter les soucis.
Alimentation et hydratation
Jusqu’à la dernière minute j’ai hésité à partir sans sac et profiter du système SWAT Specialized présent sur mon vélo… malheureusement pour moi, je sais que j’ai énormément besoin de boire, et que une gourde de 750ml que je remplirais au milieu de chaque boucle ne me suffira pas ! Je décide donc de prendre un sac avec seulement une poche à eau de 1,5L avec boisson énergétique sous dosée et mon ravitaillement solide (barres, gels, pâtes de fruits dont j’aurais besoin pour une seule boucle) + une gourde d’eau pure de 0,6l sur mon porte bidon. N’ayant plus trop l’habitude de rouler avec un sac, j’ai cherché à ce qu’il soit le plus léger possible afin qu’il ne me crée pas de douleurs au dos et qu’il ne me gène pas trop en descente.
Tout mon matériel de réparation (chambre à air, multi-tool, dérive chaîne, cartouche, pompe, patte de dérailleur, colliers, couverture de survie…) sont sur ou dedans mon vélo.
Voilà tout est prêt, un repas simple (poulet, jambon) et pas trop lourd vers 19h30 et me voila couché à 20h30. Je m’endors serein et rapidement mais la nuit sera courte… je suis réveillé par le vent qui souffle en rafales vers 1h30… je dors un peu en pointillé jusqu’à 3 heures du matin, heure du réveil. Je n’ai pas de mal à me réveiller, je m’habille et déjeune 1/3 de gâteau sport avec du jus de fruits.
A 3h45 je me rends au départ en passant par le point de contrôle. Le vent souffle toujours, il fait frais mais du coup le ciel est tout étoilé et nous promet une belle journée ensoleillée. Je retrouve le groupe de Singlebikes et les autres participants présents avec moi en début de vague. L’ambiance est toujours particulière sur ce genre d’épreuve, il y a un mélange de joie, d’excitation et de peur somme toute relative, étant donné l’heure qu’il est et de l’ampleur du chantier qui nous attend ! L’organisation fait monter progressivement l’ambiance avec le briefing coureurs et le speaker commence à mettre de la voix et la musique me donne la chair de poule ! On est chaud et tout le monde semble impatient d’en découdre !
4h15, le départ est donné dans les fumigènes et après seulement quelques centaines de mètres on se retrouve déjà dans le début de la première montée dans le noir ou presque… je profite des lumières des autres participants pour ne pas allumer les miennes. Dès le début de la montée, les VTTAE nous doublent et il faut faire attention de ne pas se mettre dans un rythme trop élevé à essayer de les suivre. Je monte dans les premiers, mon rythme est régulier et en endurance (aux alentours de 75 à 85% de ma FC Max) pour ne pas payer le « sur-régime » plus tard. Pendant la montée les sensations sont très bonnes et me sent même très bien lorsque la pente s’élève. Après 1h40 nous arrivons au départ de la SP1 de St Martin du Froid où il fait assez froid ! Du coup je ne traîne pas, je me prépare, allume mes lumières et me présente au départ.
C’est parti ! Je m’élance tranquillement et après un petit temps d’adaptation avec l’éclairage je trouve mon rythme de croisière. Mon début de descente n’est pas parfait, c’est difficile de ne pas faire de fautes de nuit… je remonte quelques pilotes partis devant et ils me laissent gentiment passer quand ils le peuvent dans ce chaos de rochers ! A mi-spéciale arrive un gros pédalage de prêt de 3 minutes, j’ai mal aux jambes car j’ai un peu tétanisé dans la descente, je me fais violence et bascule dans la seconde moitié. Cette partie est assez ludique même si parfois je suis assez hasardeux sur mes lignes… je m’en tiens donc à rester dans la trace et ne cherche pas à trouver des trajectoires qui pourraient me faire gagner du temps et surtout m’en faire perdre !!!
Arrive un enchaînement d’épingles, et là, sans rien comprendre je prends un bout de branche en pleine tête et je sens tout de suite que mon œil droit est touché ! ça ne me fait pas franchement mal mais je sens quelque chose couler sur ma joue et je ne sais pas si c’est de la sueur, des larmes ou du sang… je continue instinctivement et me retrouve bien déconcentré et en perdition totale pendant une bonne minute… la fin de spéciale se passe bien et je suis content d’en terminer ! Assez inquiet je vais voir immédiatement les pompiers présents à l’arrivée. Ils me rassurent, je suis juste un peu écorché et avec déjà un bel hématome… Pas de quoi s’alarmer donc, je me ravitaille et repars pour la liaison vers la SP2 en compagnie d’Alexis Chenevier.
La liaison se passe bien, Alexis monte un poil vite pour moi et je laisse filer. Dans la montée, alors qu’il fait encore nuit, nous assistons à la descente des centaines de pilotes sur la SP1, le spectacle est hallucinant ! Je bois régulièrement et les jambes sont toujours bonnes. Après 1h15 de montée, j’arrive au départ de la SP2. Mise en condition rapide, il ne faut pas traîner car derrière ça arrive vite !
Départ de la SP2, j’ai l’impression rapidement de ne pas être dans le rythme, comme trop prudent d’un coup… sur le moment je n’y pense pas, mais maintenant je me dis que ce choc dès la première spéciale m’aura rendu bien trop prudent toute la course… je ne suis plus dans le rythme, je n’arrive pas à attaquer et mes jambes se tétanisent. Bref, la spéciale se termine et la première boucle aussi en 3h40. J’ai largement le temps d’aller me faire soigner chez les secouristes, me ravitailler, faire le plein en boisson, eau et barres, et me changer pour me mettre au sec.
Le début de la boucle se fait directement dans la pente avec un mélange de poussage et de pédalage. Après 30 minutes, la suite de la montée se fera sur la même piste que pour monter à la SP2. La SP3, dite des « crêtes XXL » est sans doute la spéciale la plus engagée de l’Epic. Je passe partout mais je suis complètement tétanisé des jambes ! Mes 2 années sans compétition se font ressentir dès que je suis dans la pente. Mon run est propre, tout en sécurité et j’ai quand même pris du plaisir.
L’ascension vers la SP4 est assez raide. En vélo au début puis en poussage ensuite pour rejoindre la SP4. Nous avons déjà fait la moitié du dénivelé soit 2400m de D+! La SP4 est courte et je me fais bien plaisir. Même si je ne venais pas pour ça, j’ai compris dès la SP3 que je ne me battrais pas pour un podium cette année et je me concentre juste pour profiter et prendre un maximum de plaisir.
Après cette courte spéciale, on enchaîne directement sur la liaison vers la SP5 et un poussage très très raide ! La fatigue commence à se faire sentir… Cette SP5, des Pins, est vraiment magnifique ! Mon run est fluide, un peu hésitant au milieu… mais je suis encore une fois bien amusé.
Pendant la liaison suivante, je sens un bon coup de moins bien ! Je ne m’affole pas, bois régulièrement et mange un peu. J’essaye de ne pas m’arrêter et continue sur un « petit » rythme en sachant que ça sera passager. J’arrive au départ de la SP6 pas trop lucide et décide de prendre un premier gel pour me redonner un petit coup d’énergie immédiat. La spéciale se passe bien, les pédalages commencent à faire bien mal, mais je gère mon effort et passe sans encombre les parties bien engagées.
Le retour vers Olargues se fait par la voie verte et sera bien longue avec un bon vent de face… A la fin de la boucle 2, je ne suis pas au mieux… je me ravitaille en conséquence, fromage, Tuc, pain… du salé et du gras! Un petit check-up du vélo, le plein du sac, et me voilà reparti sur la boucle 3, la dernière ! J’ai plus d’1 heure d’avance sur la porte horaire et je décide de prendre cette longue longue montée vers Montahut très très tranquillement. Je monte régulièrement, sans forcer et j’essaye de ne pas m’arrêter. Vers la mi montée, j’ai envie de dormir ! Mais le terrain n’est pas franchement accueillant pour une petite sieste… Du coup je m’arrête pour une bonne pause, mange, bois et profite du paysage. Aaaah! Ca fait du bien ! S’enchaîne le difficile portage final vers Montahut, raide et technique. Au sommet, tout le monde à l’air satisfait d’en arriver là, nous savons qu’à ce moment nous avons fait le plus difficile et qu’il nous reste plus que 400m de D+ !
Cette SP7 de Montahut est un véritable « chantier » avec la fatigue. Sur le haut il y a beaucoup de vent et même de face dans le pédalage du haut ! Ensuite arrive un enchaînement d’épingles, cette partie est franchement sympa et je me régale malgré que se soit de plus en plus difficile d’anticiper et qu’il faut tout faire à l’instinct. La fin de la spéciale est très très difficile dans longue voie romaine. Ca frappe ! On se fait secouer ! J’ai du mal à tenir mon guidon et je suis même obligé de lâcher les freins pour tenir le guidon avec tout mes doigts ! Ouf, voilà l’arrivée !
Voilà la dernière porte horaire de franchie et la dernière liaison s’annonce elle aussi longue mais moins difficile que la précédente. Je n’ai plus d’eau… 2L sur les 2 dernières heures ! Je m’arrête à une fontaine pour faire le plein et l’eau fraîche fait du bien. Il n’y a plus grand chose « dans le moteur » mais le mental a bien pris le relais et me fait avancer avec volonté.
Les SP8 et SP9 sont franchement magnifiques. La première est plutôt très engagée et la deuxième très ludique, j’adore et je me surprends à avoir encore de l’énergie à ce moment.
Il est temps de rentrer une dernière fois vers Olargues et rejoindre le départ de la spéciale Urbaine, la dernière de cette longue et belle journée ! Pendant la liaison, on se retrouve à plusieurs et tout le monde paraît satisfait et joyeux d’en terminer. J’ai même l’impression de ne pas avoir mal aux jambes…
La dernière spéciale est une formalité et je laisse échapper un soupire de soulagement une fois la ligne d’arrivée franchie !
Ce Radon Epic Enduro aura bien été Epic et m’aura bien réconforté sur mon état de forme et ma capacité mentale à affronter les moments difficiles. Malgré mes coups de moins bien, je ne me suis jamais senti en perdition au point de vouloir m’arrêter. J’ai profité à fond de chaque instant et suis rester concentré sur ce que j’avais à faire pendant toute la course. Tout mes choix matériels ont été excellents et je pense n’avoir commis aucune erreur pendant les 14 heures de course.
Je tiens à féliciter toute l’organisation pour cette superbe épreuve, remercier les secouristes qui ont pris soin de moi et sûrement d’autres… remercier les concurrents qui se sont gentiment écartés pour me laisser passer et féliciter l’ensemble des concurrents pour s’être dépassés peut importe jusqu’où ils ont put aller !
Bonne récupération à toutes et tous et à l’année prochaine 😉
Pour moi, place à un peu de repos puis la préparation pour le Tour du Mont Blanc reprendra son court.
Nico
Pour en savoir plus sur cette course > http://www.wildtrack.fr/
Résultats complets et VTTAE > https://fullattack.cc/2017/04/radon-epic-enduro-2017-classements-resultats/