Mondiaux DH // Champéry 2025 – Ce qui se trame avant la course la plus folle de la saison ?!

Le moment de vérité approche. À Champéry, l’air est lourd, les regards se croisent et chacun sait qu’il n’y aura pas de seconde chance. Les Mondiaux, c’est l’instant d’une saison où tout peut basculer : un run pour affirmer sa place, un run pour prouver qu’on peut prétendre au maillot arc-en-ciel. La piste est raide, impitoyable, et la moindre erreur se paie au prix fort. Ici plus que jamais, rien n’est écrit d’avance, mais parvenir à vaincre ne se fait pas sans savoir composer avec un contexte forcément particulier… Les dernières nouvelles du front, ce qui se trame à Champéry ? À lire sur FullAttack !

Balanche tire sa révérence, Walker & Earnest forfaits

Avant même que les premiers runs ne s’élancent, Champéry est déjà chargé d’émotions fortes. À commencer par l’annonce de Camille Balanche : la Suissesse disputera ici son dernier Championnat du Monde de Descente. Elle mettra un terme à sa carrière de Coupe du Monde en fin de saison, et boucle ainsi la boucle à domicile, devant son public. Un moment à la fois symbolique et émouvant pour celle qui aura marqué de son empreinte l’histoire de la DH féminine avec une carrière somme toute plutôt courte, mais très vite couronnée de succès. Qui plus est, en s’étant forgée la réputation d’une pilote redoutable quand la pente est la plus pronnoncée… 

Côté absents, Matt Walker ne prendra pas le départ : victime d’une chute aux Gets, il souffre toujours d’une commotion et ne se sent pas en état de rouler. Le Britannique, qui espérait s’aligner à Champéry, doit se résoudre à suivre l’événement depuis le bord de piste. Même constat pour la Néo-Zélandaise Sacha Earnest, blessée aux Gets également : épaule démise sur chute. Elle devait découvrir la catégorie Élite en Championnat du Monde, mais son rendez-vous est repoussé.

Ce que la piste exige des pilotes

Les premiers tous de roue ont eu lieu en piste. De quoi en savoir plus sur le défi particulier que représente le tracé. À Champéry, la première clé, c’est le freinage. La pente incite à rester cramponné aux leviers du haut en bas, mais les meilleurs savent qu’il faut parfois accepter de « lâcher un peu ». Savoir doser, freiner fort pour se placer juste où il faut, puis relâcher au bon moment, c’est toute la subtilité de ce tracé. D’autant plus que pour être certain d’avoir du mordant jusqu’en bas, savoir laisser respirer les freins a toute son importance. Plus facile à dire qu’à faire quand chaque portion demande de trouver l’équilibre entre contrôle et vitesse.

La deuxième spécificité, ce sont les enchaînements de virages. Dans la partie haute notamment, la piste oblige à enchaîner six ou sept relevés d’affilée. Certains pilotes n’hésitent pas à parler d’une piste de bobsleigh bien raide par endroits. Ici, le placement dans le premier virage conditionne les suivants. Ensuite, une fois engagé, c’est une affaire de tactique autant que de réflexe, avec des « micro-ajustements » permanents – ces petits changements de position qui permettent d’être fluide et verrouillé du début à la fin de la séquence. Les pilotes de classe mondiale savent faire ça à l’instinct, mais sur une piste si engageante et étroite, ça peut faire toute la différence si l’on sait en jouer comme nul autre. 

Le reste du tracé ajoute des couches de difficulté : quelques rares sections où on peut s’engager à 150 %, rugosité permanente avec des rochers carrés qui attendent les roues, passages raides où la chute ne pardonne pas. On dit parfois que c’est une piste « bike park »… mais d’une rudesse qui ne laisse aucune place au hasard. Elle réclame autant de finesse que de brutalité précise, un équilibre subtil que seuls les plus solides sauront trouver. Dans ces conditions, les pilotes plus légers comme Jackson Goldstone ou Gracie Hemstreet pourraient avoir un atout, capables de mieux gérer vitesse et freinage sur cette pente extrême. Mais encore faut-il savoir exploiter cet avantage sans franchir la limite – une limite pas évidente ici, où la moindre erreur se paie cash et peut vite se transformer en vol plané dans les filets ! 

Le défi particulier du programme des Mondiaux

Aux Mondiaux, le temps ne s’écoule pas comme en Coupe du Monde. Le programme s’étire, les créneaux d’entraînement sont courts, disséminés, et la semaine prend un rythme inhabituel avec cette journée de plus en piste pour les Élites. Deux heures par-ci, une heure par-là : beaucoup de moments pour réfléchir, mais finalement assez peu de roulage effectif. La moindre erreur, le moindre contretemps en piste et c’est tout un processus qui peut gripper. 

C’est dans cet entre-deux que naît une grande partie du défi. Trop rouler, c’est risquer l’usure, voire une forme de lassitude qui émousse la vigilance. Rouler trop vite, trop tôt, c’est risquer de plafonner dans la progression, et ne pas être à son prime, au moment clé. Ne pas rouler assez, c’est s’exposer à douter, à cogiter sans fin. Même les plus aguerris peuvent tomber dans le piège de cette « fatigue d’ennui », qui pousse à se relâcher ou au contraire à forcer trop tôt, trop fort.

La gestion devient alors un exercice d’équilibriste. Les équipes doivent orchestrer leurs pilotes comme on gère un pic de forme : trouver la bonne dose de roulage, maintenir la motivation intacte, éviter le piège de la complaisance. C’est un combat psychologique autant que physique, où patience et stratégie priment. Et c’est ce qui rend les Mondiaux si particuliers : l’impression de courir une semaine entière… Pour en réalité ne jouer sa saison que sur quelques minutes. Un seul run, un seul instant où tout doit converger.

Ce que la piste exige des vélos

À Champéry, certaines évidences s’imposent pour affronter la pente. Le montage mulet/MX (29’’ devant, 27,5’’ derrière) fait figure de choix privilégié, tant il combine stabilité et maniabilité. Les ajustements de géométrie vont dans le même sens : un vélo un peu plus court pour mieux négocier les virages plutôt serrés, un poste de pilotage relevé pour gagner en confiance dans la pente, et, quand la cinématique le permet, un jeu sur la hauteur du boîtier afin de trouver le compromis idéal entre garde au sol et assiette.

Reste ensuite à s’attaquer au casse-tête des suspensions. Ici, chaque run use le vélo et pousse les ressorts et cartouches dans leurs retranchements. Les compressions massives font talonner de partout. On voudrait donc faire le nécessaire pour éviter ça… Mais dans le même temps, en dynamique, on ne veut pas d’un arrière qui se redresse à chaque freinage, sans pour autant perdre de maintien ni de vitesse de reprise. À l’avant, on veut garder un avant précis pour encaisser et guider, sans plonger. Globalement : trop ferme, et le vélo rebondit et t’éjecte ; trop souple, et il s’enfonce jusqu’à plier la trajectoire. Le réglage du rebond devient alors critique : un arrière légèrement ralenti pour éviter que ça ne renvoie trop fort, et un avant plus vif pour conserver de la précision dans les appuis. La progressivité joue aussi un rôle clé : rajouter des tokens ou de la cale d’air pour contenir les fins de course, sans brider le milieu de débattement où tout se passe. Bref, c’est une équation pleine de contradictions, et rares sont ceux qui parviennent à trouver le « sweet spot ».

Et comme si cela ne suffisait pas, la piste réclame une gestion extrême du freinage. Toujours sur les leviers, les pilotes doivent identifier les rares endroits où ils peuvent relâcher quelques secondes pour laisser les freins respirer. Beaucoup optent pour des disques de 220 mm, indispensables pour encaisser chaleur et contraintes. Mais quoi qu’il en soit, on imagine à quel point la constance (de haut en bas de la piste) et la régularité (du comportement d’un freinage à l’autre) font partie des clés. En définitive, tout se joue dans ces détails : un vélo pensé pour la pente, des réglages suspendus entre contradictions, et des freins capables de tenir la distance. Ce sont ces choix, plus que jamais, qui conditionnent la performance et peut-être même l’arc-en-ciel à Champéry. 

Une nouvelle fourche de DH signée Fox dans les paddocks

Après avoir été aperçu sur le vélo de Gracey Hemstreet aux Gets, la voilà qui refait surface à Champéry : une nouvelle fourche de descente Fox circule discrètement dans les paddocks. De quoi alimenter les discussions techniques, tant on sait que la rigidité du châssis de la Fox 40 divise depuis longtemps pilotes et mécanos.

Difficile encore de confirmer le diamètre exact des plongeurs – restent-ils à 40 mm, ou bien Fox explore-t-il une autre voie ? – mais plusieurs détails frappent déjà. Le revêtement noir, plus proche de ce que l’on retrouve habituellement sur les versions Performance Elite,que du Kashima emblématique, interpelle. Et surtout, l’arceau présente un dessin inédit : ajouré à sa liaison avec les jambages, comme pour travailler différemment la rigidité et la raideur de l’ensemble. Qui plus est, on sait que le design génératif fait partie des outils dont disposent et usent les têtes pensantes chez Fox des derniers temps…

Alors, simple proto de validation interne ou future génération de fourche DH ? Difficile de l’affirmer pour l’instant, mais une chose est sûre : Fox teste en conditions réelles à Champéry, et sur une piste aussi raide et brutale, chaque détail de comportement du châssis sera scruté de près.

Le chiffre qui pèse : 8 !

Heureusement, le temps semble plus clément à Champéry qu’il ne l’était aux Gets la semaine passée. Car là-bas, la boue collante a rappelé à quel point elle peut transformer une descente en calvaire. Le chiffre qui circule dans les paddocks en dit long : 8. C’est le nombre de kilos supplémentaires qu’un vélo de descente peut embarquer dans ces conditions.

De 18 kg en configuration classique, la machine grimpe alors à près de 26 kg en bas de piste. Presque 50 % de poids en plus, collé partout, sauf sur les plongeurs, les disques et les poignées… Pour des vélos déjà lourds et exigeants, c’est un fardeau considérable qui met les corps à rude épreuve. Les pilotes le savent : pousser un tel surpoids, sur une piste aussi physique, use les bras et les jambes à vitesse grand V.

Alors, si les prévisions restent favorables, on ne s’en plaindra pas. Les Mondiaux promettent déjà assez de difficulté sans qu’il soit nécessaire d’y ajouter huit kilos de boue collante, cette fois-ci… 

Brendog en piste…

Pour les nostalgiques d’une autre époque, le simple nom suffit à éveiller un sourire : Brendan Fairclough retrouve la piste de Champéry. Ici même, il terminait 4ᵉ des Mondiaux 2011 et 3ᵉ de la Coupe du Monde 2010. Cette fois, il n’est pas au départ de la course, mais endosse un rôle d’ouvreur. Une évidence quand on connaît ses liens avec Scott, et avec Ben Walker, impliqué dans la gestion de la piste et partenaire de longue date de la marque. 

Brendog se dit « tellement ravi » de ce rôle, qui lui permet de rouler avec les autres coureurs, de profiter de l’ambiance sans subir la pression du chrono. Le seul impératif : être en piste dès 7h30 du matin pour un run complet, destiné à balayer et vérifier que tout est en place. Pour lui, revenir à Champéry reste un moment spécial. Ici, il a brillé au plus haut niveau, et le fait de redescendre la piste aujourd’hui, libre de toute contrainte, prend des airs de retour aux sources. Le voir envoyer à nouveau sur ce tracé mythique, avec son style décontracté et aérien, c’est juste cool et core : Brendog dans son élément, comme on aime le voir ! 

Favoris, outsiders et faiseurs de légende

La question est dans toutes les têtes : qui repartira de Champéry avec le maillot arc-en-ciel ? Aux Mondiaux, impossible d’échapper aux spéculations, mais plutôt que de dresser des pronostics, mieux vaut relever quelques éléments qui permettent à chacun de se forger sa propre idée. Sans oublier que ceux dont on ne parle pas peuvent, quoi qu’il en soit, créer la surprise ou écrire leur propre histoire, ici plus que jamais ! Pour commencer, difficile néanmoins de ne pas placer Andreas Kolb dans la liste : champion d’Europe en titre ici même, il retrouve une piste taillée pour ses points forts – raide, exigeante en freinage – et arrive gonflé de confiance après un podium la semaine passée. Chez les femmes, Vali Höll attire tous les regards. Malgré des succès manqués en Coupe du Monde, elle mène le général grâce à sa régularité et se présente « affamée » à Champéry, déterminée à transformer sa constance en arc-en-ciel, elle qui en est la tenante du titre, ne l’oublions pas. 

Dans le camp français, Rémi Thirion joue la carte de l’expérience : seul pilote actuel à avoir couru ici en 2007, 2010 et 2011, il connaît chaque subtilité de la piste – Un peu comme Danny Hart finalement, sur qui tous les regards portent, assez logiquement, ces jours-ci. Autre tricolore incontournable, Loïc Bruni, méthodique et préparé, fort de son vécu et de sa capacité à gérer la pression, débarque avec un vélo fraîchement affûté et de nombreux runs d’essai, comme tout le monde. Face à lui, Jackson Goldstone vit finalement ses premiers Mondiaux Élite avec l’enthousiasme de la jeunesse et la légèreté qui fait sa force, mais aussi la nécessité de rebondir après une compétition difficile aux Gets. Ronan Dunne lui, sans enjeu de classement général de la Coupe du Monde, aborde Champéry le couteau entre les dents et avec, à nouveau, la faveur de nombreux pronostics. Dans un autre registre, Martin Maes pourrait être dans la dynamique qui compte : récent podium en pédales plates aux Gets, déjà médaillé des mondiaux par le passé, donnant des signes de progrès tangibles en cette deuxième partie de saison… Tout ça en fait un candidat crédible à la médaille !

Chez les femmes, Gracie Hemstreet confirme son ascension. Déjà brillante en Coupe du Monde, sa légèreté et sa capacité à monter en puissance en cours de run pourraient lui donner un avantage clé sur une piste aussi raide. Chez les juniors, la jeune Aletha Otsgaard intrigue : ses temps intermédiaires la placent parfois déjà proche des références du plateau, mais elle devra composer avec une Rosa Zierl solide leader du général et avec son besoin de ne pas s’éparpiller en cours de route, pour performer. Enfin, chez les Juniors, les regards se tournent vers la relève française. Till Alrans’affiche à l’aise dans la finesse que réclame Champéry, tandis que son frère Max Alran, talent brut et sur qui la pression ne semble pas avoir d’effet visible en apparence, joue sa dernière carte pour décrocher un maillot arc-en-ciel junior avant de passer chez les grands.

Quoi qu’il en soit, reste que rien n’est écrit d’avance : l’histoire des Mondiaux montre que tout peut basculer en un run, et c’est bien ce qui fait toute la beauté de cette course. 🌈