CDM DH // Mont Sainte-Anne 2025 – La Der’ de ce qui se trame avant la « off season »

Dernier week-end de la saison, dernière ambiance de paddock avant le grand silence de l’hiver. Annonces marquantes, bricolages malins et duel de titans entre Bruni et Goldstone, le Mont Sainte-Anne boucle la Coupe du Monde 2025 comme il se doit : avec du cœur, du bruit et cette effervescence qu’on ne trouve qu’ici. Voilà ce qui se trame au Canada… 🇨🇦

Monika Hrastnik tire sa révérence

Après Camille Balanche, c’est une autre figure habituelle du plateau féminin qui s’apprête à boucler la boucle. Monika Hrastnik disputera ce week-end sa dernière Coupe du Monde, ici même au Mont Sainte-Anne, là où tant de carrières ont trouvé leur apothéose. La Slovène quitte la scène après dix années au plus haut niveau, marquées par une progression exemplaire et un mental de roc.

Pas de victoire en Coupe du Monde à son actif, mais 17 Top 53 classements généraux dans le Top 59 titres nationaux3 couronnes européennes, et un bronze mondial — un palmarès qui en dit long sur sa constance et sa ténacité. Partie de rien, pilote privée en 2015, elle s’était révélée en 2018 avec une 5ᵉ place au général, synonyme de signature chez Dorval AM, où elle est devenue une athlète à part entière.

Dans un message plein d’émotion, elle confie quitter le circuit “avec le sourire et la fierté de tout ce qu’elle a accompli”, rappelant que le sport lui a appris la discipline, la confiance et la résilience. Toujours passionnée de vélo, mais plus prête à se pousser “jusqu’à la limite”, Monika tourne la page sans amertume, prête à entamer “un nouveau chapitre”.

🔧 Un stand ouvert signé Williams Racing Products

Parmi les bonnes ondes du paddock cette semaine, l’initiative venue de Williams Racing Products mérite d’être signalée. La marque australienne, plus connue pour ses pièces usinées de précision – biellettes, potences, systèmes d’idler – a cette fois posé ses valises au Mont Sainte-Anne pour une raison toute simple : donner un coup de main. Après avoir vu à Lake Placid plusieurs privés australiens et néo-zélandais bricoler leurs vélos en plein soleil, WRP a décidé de réagir. La marque a acheté un espace d’équipe sur le paddock et l’a transformé en stand en libre accès : portes ouvertes, outils à disposition, et même la promesse d“agrandir la tente si besoin”. Et puisque la tente se trouve juste devant le stand de lavage des vélos, c’est bingo ! Une démarche rare à ce niveau, qui rappelle que la Coupe du Monde, malgré ses structures de plus en plus verrouillées, reste avant tout une histoire de passion et de débrouille pour certains ! 

👨‍🍼Un bébé arrive, mais pas celui qu’on attendait…

La saison touche à sa fin, et pour certains, c’est un autre terme qui les concerne plus directement. Celui de la grossesse qui doit leur conférer le statut de père. Si on sait que Loic Bruni chasse le général de la Coupe du Monde à quelques encablures de conaitre la naissance de son premier enfant, il en est un autre pour qui les choses se sont précipitées. Oliver Zwar, pilote du Obrea FMD et encore en lice à Lake Placid était supposé rouler au Mont Sainte-Anne pour y boucler la saison. Mais le pilote suédois a dû sauter dans un avion la course passée, pour retrouver les siens. Oliver est à priori arrivé à temps, et la vie suit son cours…

🎪 Comment chacun tire son épingle du jeu…

On le sait, les courses outre-atlantiques représentent un certain défi pour les équipes de Coupe du Monde, pour la majoritée basées en Europe. Même celles qui ont pour sponsor titre des marques américaines ont, pour certaines, leurs moyens les plus conséquents et « leurs bases » en Europe. Courir à Lake Placid ou au Mont Sainte-Anne est donc un défi logistique pour que chacun dispose du matériel nécessaire même si, on s’en doute, les plus équipés des européens ne peuvent pas faire transiter l’ensemble de leur matériel habituel.

À ce petit jeu, certains tirent néanmoins mieux leur épingle du jeu que d’autres à la faveur des partenaires dont ils disposent. À Lake Placid, on découvrait ainsi Frameworks sous la tente du camion Red Bull US, qui offrait autant d’espace à la petite équipe américaine que le camion Fox Europe leur en offrait déjà depuis le début de saison. Et au Mont Sainte-Anne, c’est au tour du Syndicate de trouver la parade : c’est le camion Fox US qui, cette fois, sert de base à l’équipe de Jackson Goldstone…

Et quitte à être dans le registre sponsoring & cie, c’est Ryan Pinkerton qui remporte le gros lot du week-end. L’américain qui s’est révélé cette saison et qui fait partie de la liste actuelle des vainqueur de Coupe du Monde en devenir, vient de signer un partenariat qu’il affichera désormais sur son casque. Il rejoint le contingeant de pilotes Monster Energy aux côté d’Amaury Pierron, Loris Vergier, Theo Erlangsen, Lachlie Steven MacNab, Thibaut Daprela, Troy Brosnan ou encore Danny Hart…

⚙️ Côté matos dans les stands

C’est la der’ de la saison, la dernière occasion donc de parler matos et de ce qui se cache dans les paddocks de la Coupe du Monde. Dernières apparitions publics du matériel des meilleurs mondiaux avant qu’il ne retombe dans l’anonymat de la « off session ». 

Chez Gwin Racing, les mécanos ont sorti la machine à rôder les plaquettes TRP. Fruit d’un développement commun avec Cinter, ce dispositif anime la roue et en mesure la charge de freinage pour amener les plaquettes à leur température idéale de rodage avant même que le vélo ne touche la piste. L’idée : gagner en constance et en mordant dès les premiers tours de roues — un gain simple, mais précieux plutôt que d’envoyer les pilotes ou les mécanos dévaler les rues adjacentes… 

Du côté de Reece Wilson, le développement de son carénage expérimental continue d’évoluer semaine après semaine. L’idée reste la même : offrir une zone que le pilote puisse serrer entre les genoux, façon motocross, pour mieux stabiliser le vélo dans les sections qui bougent. Cette fois, la surface a été recouverte d’un revêtement granuleux, plus adhérent que la plaque métallique d’origine, avec des arrêtes adoucies pour éviter les blessures. C’est encore du proto artisanal, mais le concept séduit visiblement Reece, qui jure y trouver un vrai bénéfice en pilotage.

Chez Commençal / Muc-Off, on surveille surtout l’état des roues. Ces dernières semaines, les inserts Rimpact ont été mis à rude contribution pour préserver les jantes dans les zones les plus cassantes. Outre ces inserts, on se demande forcément tout ce que le team met en oeuvre pour garder le grip sans trop risquer la casse sur les dalles du Mont Sainte-Anne…

Richie Rude, lui, roule avec un amortisseur de direction Pademellon. Après sa chute à Lake Placid, le dispositif pourrait s’avérer bien utile ici, entre les pierres, les racines et les compressions violentes qui font remonter tout le vélo dans les bras. et n’aident forcément pas toujours à garder un cap. 

Après ça, petit détour par le stand MS Mondraker : Hope a usiné du sur-mesure avec de nouveaux tendeurs, protections de boîte et même biellettes taillés à la fraise dans leurs ateliers anglais. De la belle mécanique, brillante et robuste, fidèle à la réputation maison, anodisé en rouge pour se faire remarquer sur les Zerode de l’équipe. 

Et pendant qu’on observe tout ça, difficile de ne pas remarquer du côté du Scott DH Factory un couvre-amortisseur percé sur le vélo de Benoît Coulanges. La pièce intrigue : les perçages disposés tout le long de la nervure viseraient-ils à mieux ventiler l’amortisseur, pour évacuer la chaleur de cet élément confiné dans le cadre du Gambler alors que son rôle principal, à la base, consiste à dissiper une énergie sous forme de chaleur ?! 

🏔️ La piste et ce qu’il s’en dit

Au Mont Sainte-Anne, rien n’est vraiment une surprise — et c’est justement ce qui rend la piste si redoutable. Les pilotes la connaissent par cœur, certains depuis plus de quinze ans, mais elle continue de punir la moindre approximation. Ce tracé “classique” du circuit a tout pour plaire : de la vitesse, du relief, du technique, des rochers bien placés et un sol d’une texture unique. Une piste complète, exigeante, et surtout, impitoyable.

Les discussions du paddock tournent autour d’un même constat : le terrain est mou par endroi. À plusieurs occasions, les équipes en charges de la piste ont ajouté des relevés jusqu’au dernier moment, qui peuvent accélérer la piste. Alors certes, un shark fin en bois au motif a damier est sorti de terre à l’entrée du secteur intérmédiaire à découvert, mais ailleurs, la terre est encore très molle par endroit… Et la veille du trackwalk, des pluies ont détrempé le sol au point de repousser la reconnaissance à pied, histoire de préserver un minimum la piste avant le passage des 200 pilotes engagés cette semaine. Une précaution bienvenue, car même si les conditions devraient s’assécher, ça pourrait se creuser dans ces conditions. On parle déjà d’ornières, de trous qui vont grossir au fil des runs, et il faudra donc voir l’impact réel que ces dispositions ont en piste.

Autre effet des intempéries : l’eau a raviné plusieurs portions, emportant la terre fine et laissant les rochers plus exposés encore, lorsqu’ils sont présents. Résultat, la piste présente un visage plus brut par endroit, avec des zones plus minérales, moins “lissées”. Ce sera sans doute un défi supplémentaire pour trouver le bon rythme entre adhérence et précision, le moment venu. 

Côté entretien – outre la réfection des appuis évoquée précédement – les équipes ont fait un gros travail de préparation. Toutes les feuilles ont été soufflées des trajectoires et des abords, comme à Lake Placid, pour garantir une lecture claire du terrain et éviter les zones glissantes cachées. Bref, une piste connue, oui, mais dans un état mouvant, où chaque run va compter pour ajuster le placement, la lecture et le choix des pneus. Ici, plus qu’ailleurs, la marge d’erreur est fine comme une arête de dalle… 

⚡ Bruni vs Goldstone – Le choc des générations

Difficile d’imaginer plus belle affiche pour boucler la saison : Loïc Bruni, le maître, face à Jackson Goldstone, le prodige, dans ce qui s’annonce comme le duel ultime du Mont Sainte-Anne. On en a déjà parlé, mais ils restent des choses à poser avant que le dénuement se joue…

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : depuis 2017, cinq vainqueurs différents se sont succédé ici en six éditions. Les seuls à avoir réussi le doublé ? Bruni (2018-2019) et Vali Höll (2022-2023). Goldstone, lui, a roulé deux fois au Mont Sainte-Anne — une fois en Junior, une fois en Élite, hors année de blessure — et il a gagné les deux fois. Quant à Loïc, il affiche une constance tout aussi bluffante : chaque course terminée dans le Top 5 depuis 2015, à l’exception de l’an passé.

Autant dire que chacun a de quoi y croire. Les statistiques permettent à tous deux de lire des signes favorables, et le contexte vient ajouter encore une couche d’intensité : course à domicile pour Jackson, porté par un public canadien galvanisé, francophones et anglophones confondus. Mais Loïc Bruni reste Loïc Bruni — le pilote le plus populaire, le plus attendu, celui dont la présence seule semble électriser les paddocks. Partout où il passe, l’aura est la même. Il sait capter cette énergie, la transformer, et s’en nourrir.

L’un des meilleurs de tous les temps face au meilleur du moment, voilà ce que cette finale incarne.
Jackson a déjà prouvé qu’il pouvait rouler à un niveau “scandaleux” sous pression, même si la deuxième moitié de saison a parfois fissuré l’armure. Loïc, lui, adore ce genre de scénario. Une course à enjeu, un titre en jeu, tout repose sur ses épaules : c’est là qu’il marque le mieux les esprits. Avec l’aura de ceux qui savent ce qu’ils font, et cette capacité rare à livrer un run “énorme”, avec du cœur, du style et ce supplément d’âme qui fait les grands champions. Quelque part, l’un est l’autre sont donc attendus pour ce même run ultime, l’heure est venue…

🔥 Et parmi les meilleurs des autres ?!

On parle beaucoup du duel des géants, Bruni et Goldstone, mais derrière eux, la bataille reste ouverte — et pas pour des miettes. Certes, le général se joue entre ces deux-là, mais la troisième marche du podium final reste à pourvoir. Et cette place, on le sait, compte : elle fait partie de la photo, du moment, de la trace qu’on laisse dans une saison.

Pour l’heure, c’est Luca Shaw qui tient la corde. Pas encore vainqueur de Coupe du Monde, mais tout proche à plusieurs reprises, l’Américain a frappé un grand coup à Lake Placid avec sa deuxième place. Résultat : il pointe désormais troisième du général, juste devant Loris Vergier, longtemps troisième homme avant qu’une deuxième partie de saison plus compliquée ne le freine.
Derrière eux, Amaury Pierron s’est repositionné grâce à sa victoire magistrale à Lenzerheide. On ne peut s’empêcher d’imaginer le scénario si ses courses aux Gets et à Lake Placid s’étaient déroulées sans accroc… Bref, le “match dans le match” pour la troisième place se jouera entre ces trois-là — Shaw, Vergier, Pierron — avec tout ce que cela implique d’envie et de panache. Plus loin, Troy Brosnan complète le Top 5, mais il est hors de portée pour venir bousculer son coéquipier Luca Shaw au classement final. 

Chez les filles, le suspense ne porte plus sur le globe — Vali Höll a d’ores et déjà bouclé la mise — mais sur le podium final, entre Gracey Hemstreet et Tahnee Seagrave, séparées par 127 points. Ces deux-là ont alterné les victoires et les passages à vide tout au long de la saison.
Au nombre de victoire, la logique voudrait que MSA serve de juge de paix entre ces deux-là. Pour l’heure, avantage à la canadienne sur ses terres, reste à concrétiser.