CDM DH // Lenzerheide 2025 – Ce qui se trame dans les paddocks…

Entre nouvelles sections piégeuses sur la piste, ajustements matériels qui se confirment, discussions animées autour du mercato, classements généraux sous tension et favoris prêts à tout donner… les paddocks de Lenzerheide bruissent d’infos et de signaux à ne pas manquer. On a fait le tour, pour vous livrer ce qui se trame vraiment avant un week-end qui s’annonce bouillant à plus d’un titre…

⚡ Les nouveautés en piste

Le départ n’a plus grand-chose à voir avec celui des éditions précédentes. Finis les grands virages dans l’herbe où affleuraient ces rochers blancs qui en piégeaient certains : la zone a été remodelée, densifiée désormais de plusieurs lignes du bike-park. Pour la Coupe du Monde, les pilotes s’élancent sur une section de virages relevés serrés, empierrés artificiellement, qui gardent souvent deux vraies options – intérieur/extérieur – avec leurs propres sauts, élargissements et rythmes. Autant dire que le travail d’analyse et de choix de lignes sera capital dès les premiers mètres.

Un peu plus bas, le premier gros dévers – celui qui avait coûté cher à Amaury Pierron en 2023 – semble avoir été laissé à la merci des éléments. La terre pour lisser le passage a disparu avec le temps : les racines et les pierres pullulent, rendant la ligne haute encore plus délicate à tenir que par le passé. À l’inverse, dans le bois raide du bas, on retrouve toujours cette terre caractéristique qui comble les trous entre les racines et rend la section plus rapide, plus vivante : grip, points de freinage et trajectoires y deviennent un vrai terrain de jeu… et de gains potentiels.

🔧 Le matériel

Fin de saison oblige, ce n’est pas vraiment le moment où l’on découvre les prototypes les plus fous. Ceux qui ont quelque chose d’important dans les cartons préfèrent rester discrets : inutile de donner des idées à la concurrence, qui aurait tout l’hiver pour rattraper son retard et arriver prête dès le printemps prochain. Du coup, les vraies nouveautés sont rares, mais on sent que les travaux menés tout au long de l’année se cristallisent.

Chez Commençal/Muc-Off, par exemple, le travail mené en coulisses sur les triangles arrières avec Loris Vergier, Myriam Nicole et Amaury Pierron commence à se traduire sur les vélos des frères Alran. Après plusieurs itérations testées, une nouvelle version des bases avec patte de roue plus massive est désormais validée comme candidate à la série. Les Alran, qui roulaient jusque-là avec des cadres très proches des modèles de production, commencent eux aussi à en profiter. Un signe que les ajustements apportés sont suffisamment pertinents pour mériter d’entrer dans la gamme, tout comme il s’agit peut-être du bon moment pour commencer à offrir des possibilités d’upgrade et mettre le pied à l’étrier des jeunes en matière d’accès à plus de développement, d’ajustement et de quête de performance en vue de la suite…

💼 Le contexte du mercato

Deuxième partie de saison oblige, le mercato s’active. Si on n’en découvrira le résultat qu’en décembre/janvier prochain, les discussions vont bon train… Dans un contexte qui a toute son importance. La Coupe du Monde a le vent en poupe : c’est the place to be pour l’industrie. Mais si le circuit attire, les budgets ne suivent pas forcément la même courbe. Certains se stabilisent, d’autres baissent, et le tout crée plutôt une ambiance de chaises musicales dans les paddocks. Plusieurs équipes lorgnent sur les mêmes pilotes, certaines marques cherchent à revenir dans le jeu au bon moment – car manquer le train maintenant, c’est risquer de ne jamais raccrocher les wagons ensuite, ou à des coûts qui pourraient rendre la chose dérisoire.

Avec les nouvelles régulations qui conditionnent les places disponibles aux points marqués en Coupe du Monde, les athlètes sont remis au centre des discussions. Les sponsors n’ont plus d’autre choix que de s’appuyer sur une présence forte sur le terrain. Il faut voir, comprendre et sentir ce qui se joue dans les paddocks et en piste – sur le plan sportif – pour identifier les vrais potentiels. Dans cet esprit, les mécanos et ingénieurs prennent de plus en plus de valeur : certains sont courtisés comme les pilotes, d’autres pourraient faire leur retour, porteurs de projets et de liens avec des marques qui s’intéressent à nouveau à la discipline.

En arrière-plan, les chiffres d’audience Warner alimentent aussi les conversations. La nature du public interpelle : plus grand public, moins pratiquant qu’à l’ère Red Bull, se murmure-t-il. De quoi partir en chasse des sponsors extra-sportifs, mais aussi obliger les partenaires historiques de l’industrie à revoir leur copie : comment continuer à toucher leurs clients, conserver leur place et s’assurer une exposition pertinente ? C’est toute une équation qui se joue en ce moment dans les allées des paddocks, avec des métiers, des rôles et des enjeux qui pourraient bien évoluer dans les mois et années à venir…

📊 Les classements généraux

De par son positionnement au calendrier, Lenzerheide, c’est l’étape charnière. Après ce week-end, il ne restera que deux manches, et si personne n’est encore assuré de coiffer la couronne, l’étau se resserre dangereusement. Passé Lenzerheide, certains seront mathématiquement hors course : c’est maintenant ou jamais pour rester dans le coup !

Chez les Élites garçons, la lutte est des plus claire : Jackson Goldstone et Loïc Bruni se tiennent en seulement 25 pointsLoris Vergier reste encore dans la danse, mais il lui faudrait une victoire et que ses rivaux connaissent une journée noire pour garder un espoir. Du côté des Juniors filles, la championne du monde Rosa Zierl possède plus d’une victoire d’avance au général, mais ses 65 points d’avance ne suffisent pas encore à la mettre à l’abri de Aletha Otsgaard– la victoire rapportant 60 points.

Chez les Élites fillesValentina Höll mène le jeu sans avoir remporté de manche cette saison (hors Mondiaux). Elle compte 59 points d’avance sur Gracey Hemstreet, et affiche clairement l’intention d’aller chercher le général via des victoires. Tahnee Seagrave, derrière, n’a plus d’autre choix que de s’imposer si elle veut garder un fil d’espoir. Enfin, chez les Juniors garçonsMax Alran domine le général de 29 points, mais la densité est folle : son frère TillAsa Vermette et Tyler Waite roulent à des temps comparables au top 10 Élite. Rien n’est joué dans une catégorie où chaque position et chaque milliseconde peuvent faire basculer le classement.

Dans ce contexte de batailles serrées, même les points de qualification prennent de la valeur. Et à côté, ceux qui sont déjà hors course pour le général n’ont plus rien à perdre… Ils pourraient bien hausser le ton sur une piste qui réclame déjà une précision chirurgicale, et faire grimper les enchères sans aucun scrupule.

🏆 Les favoris de la course

On complète donc la liste des favoris en allant au-delà de ce que le classement général peut suggérer. Chez les Juniors filles, en plus d’être leader et d’avoir remporté le maillot arc-en-ciel, Rosa Zierl a déjà gagné l’IXS Cup de Lenzerheide par le passé : elle coche toutes les cases. Mais Aletha Otsgaard a montré à Champéry qu’elle pouvait être plus rapide sur certaines sections raides. Si elle parvient à enchaîner sans erreur, ça peut faire mouche.

Côté Juniors garçons, la densité est telle qu’un outsider pourrait créer la surprise. En plus des frères Alran, d’Asa Vermette et de Tyler Waite, il faudra garder un œil sur Casper Hickman : coéquipier de Rosa Zierl, il avait signé le meilleur temps de la journée lors de l’IXS Cup ici même. De quoi densifier encore un plateau déjà bouillant.

Chez les Élites femmes, plusieurs cartes maîtresses. Camille Balanche, à domicile, rêve de corriger l’erreur de 2023 qui l’avait privée de victoire derrière Rachel Atherton. Miriam Nicole, elle, revient d’une commotion mais a prouvé aux Mondiaux qu’elle pouvait jouer la gagne, seulement 0,6 s derrière Valentina Höll. Avec un vélo qui lui “permet de rouler sans être à la limite du contrôle”, la Française a tout pour décider du niveau d’engagement qu’elle mettra sur cette piste. À surveiller aussi : Lisa Baumann – impressionnante pour son retour après fracture et victorieuse ici en IXS Cup –, Marine Cabirou – déjà gagnante en 2019 et proche du succès à Leogang –, ou encore Gracey Hemstreet – deuxième du général, qui adore les fins de pistes raides ; en 2023, elle avait remporté les secteurs 4 et 5 ici même.

Enfin, chez les Élites hommes, le casting est cinq étoiles. Jordan Williams garde le souvenir intact de sa victoire ici il y a deux ans, sa première en Coupe du Monde Élite. Henry Kerr, impressionnant aux Mondiaux, avait aussi été rapide à Lenzerheide en junior. Mais les deux grands noms restent Jackson Goldstone, porté par un moral gonflé à bloc après sa démonstration aux Mondiaux et un vélo – le Santa Cruz V10 – qui a toutes les qualités pour performer ici, et Loïc Bruni, qui sait ce que gagner à Lenzerheide signifie depuis son sacre mondial de 2018. Derrière eux, Martin Maesretrouve de la forme et pourrait rejouer les trouble-fête, comme il avait failli le faire en 2018. Et puis il y a les “libres” : Ronan Dunne, plus mûr, plus complet, sans pression au général, dans un bon mood après Les Gets et prêt à tout risquer, et Andy Kolb, dans une situation délicate avec son équipe YT Mob mais déterminé à prouver qu’il a encore les moyens de voler des points aux favoris.